À la suite des élections européennes, nous avons reçu de nombreuses réactions de la part des auditeurs. Beaucoup d’entre eux ont exprimé leur point de vue sur le traitement éditorial de toute cette séquence politique, en particulier la dissolution de l’Assemblée nationale, la question de l’abstention, l’analyse des programmes des partis et le temps de parole du Rassemblement national.
Pour répondre aux auditeurs, Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction de Franceinfo, est au micro d’Emmanuelle Daviet.

L’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale

Emmanuelle Daviet : Nous avons reçu de nombreux messages sur toute la séquence politique à laquelle on assiste depuis dimanche soir. Alors on commence avec cette remarque d’un auditeur : « Pourquoi l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale et de nouvelles élections législatives est-elle reçue par vos journalistes comme une surprise totale et dans une sorte de sidération excitée ? Est-ce une fausse naïveté pour mieux dramatiser et mettre en scène l’information ? » Florent Guyotat, que répondez-vous à cette remarque ?

Florent Guyotat : Très sincèrement, il n’y a pas de fausse naïveté. Juste une vraie surprise. Vraiment. On savait que le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, s’il gagnait les élections, allait demander la dissolution de l’Assemblée nationale. On l’a entendu d’ailleurs juste après 20h, c’est ce qu’il a fait. Ce qu’on ne savait pas, en revanche, c’est qu’Emmanuel Macron allait accepter. On a commencé à avoir un petit indice lorsque, peu après 20h, l’Élysée a annoncé qu’il y aurait une allocution d’Emmanuel Macron. Puis cette allocution est arrivée. Nous l’avons retransmise en direct sur Franceinfo aux alentours de 21h. Mais avant cela, très sincèrement, personne ne se doutait de ce scénario. La meilleure preuve, c’est que nous avons dû nous adapter au cours de cette soirée. Nous avons dû prolonger tout simplement les interventions à l’antenne. Nous avions prévu de rendre l’antenne à miuit et nous avons prolongé la soirée électorale jusqu’à 1h du matin parce que nous avons jugé que la situation politique était suffisamment importante évidemment, pour prolonger la durée de nos programmes.

L’analyse de l’abstention

Emmanuelle Daviet : On poursuit avec une question qui revient fréquemment dans les messages cette semaine : « Pourquoi les journalistes ne font pas une analyse approfondie du niveau de l’abstention lors des élections européennes ? Pourquoi personne n’en parle ? » demandent des auditeurs. Florent Guyotat, comment avez-vous traité cet aspect des élections européennes ?

Florent Guyotat : Alors d’abord, petit rappel : les chiffres de la participation en France pour les élections européennes dimanche dernier, c’est 51,5 % en hausse, c’est vrai, c’est ce que nous avons dit. Mais à relativiser, c’est immédiatement ce que nous avons fait remarquer dimanche soir sur Franceinfo. Il y a de nombreuses personnes, toujours, qui ne sont pas allées voter. C’est ce que faisait remarquer notamment notre politologue Mathieu Gallard, de l’institut Ipsos :

(Extrait) Mathieu Gallard : Alors, engouement ? Le mot est peut être un petit peu fort. Il y a quand même près d’un Français sur deux qui ne se mobilise pas. Donc il n’y a pas non plus un engouement massif. Mais c’est vrai qu’il y a une progression par rapport aux précédents scrutins, notamment 2004, 2009, 2014 où les taux de participation étaient faibles. Donc la tendance est très nette.

Florent Guyotat : Mathieu Gallard, de l’institut Ipsos ce dimanche soir sur franceinfo. Pas de minimisation donc de l’abstention toujours très forte avec près d’un français sur deux qui n’est pas allé voter. Ça s’est ressenti aussi et ça s’est entendu dans les reportages que nous avons diffusés dès ce lundi sur franceinfo au lendemain de l’élection. Reportage de Benjamin Recouvreur :

(Extrait de reportage) : Il y a aussi les endurcis de l’abstention : « Oh non, ça fait des années que je ne vote pas ». Comme Fabrice et Ouari, ouvriers de 50 ans, fatalistes et indifférents aux résultats de dimanche et à la dissolution : « A chaque fois qu’on vote, on nous écoute pas. Donc ça nous intéresse plus de voter, c’est la conséquence de leur politique je m’en foutiste en fin de compte. »

« Et les programmes ? »

Emmanuelle Daviet : On termine avec les programmes des candidats. C’est un vrai sujet de préoccupation des auditeurs. Alors l’un d’entre eux écrit : « Vous avez un rôle extrêmement important à jouer pendant cette campagne législative. Arrêtez de parler des propos polémiques et parlez-nous des programmes politiques. Vous avez le pouvoir d’éclairer les citoyens et nous vous écoutons avec la plus grande attention. » Et puis un autre auditeur formule cette demande : « Pourrions-nous profiter de cette élection très particulière pour que le temps médiatique soit consacré à la comparaison des programmes plutôt qu’aux commentaires des sondages d’intentions de vote ? » Florent Guyotat, pour les auditeurs, les sondages ne favorisent ni la réflexion ni le jugement éclairé. Alors, avez-vous prévu le décryptage des programmes ?

Florent Guyotat : Oui, c’est quelque chose qui est prévu dès la semaine prochaine sur franceinfo. Dès lundi, nous allons chaque jour décrypter les programmes des candidats avec des rendez-vous dans la matinale entre 7 h 15 et 7 h 20, puis dont le 12/14 à 13 h 40. Il y aura donc sur chaque thème important de la campagne, je vous en donne quelques uns : le logement, le pouvoir d’achat, l’immigration, la sécurité, la santé, la culture. Il y aura un décryptage avec des comparaisons. Donc il y a un besoin des auditeurs, vous l’avez fait remarquer et il y a de notre part une volonté de nous intéresser au fond de ces programmes. Alors ces derniers jours, sur franceinfo, nous avons beaucoup parlé des tractations entre les partis. Parce que c’est important, parce que, avant de parler des programmes, il faut d’abord savoir qui se présentera, qui s’alliera avec qui, pour savoir tout simplement quel échiquier politique on aura pour ces élections. Désormais, on a à peu près une vision claire de ce qui va se passer. Donc place aux programmes, au décryptage, place au fond. Il y aura aussi chaque jour, dans le choix de franceinfo, la parole donnée à des électeurs qui nous donneront leur sentiment sur cette élection, sur leurs inquiétudes, sur leurs espoirs aussi. En Gironde et dans l’Yonne, chaque jour sur Franceinfo avec nos reporters. Le choix de franceinfo donc à 6 h 40 et à 8 h 10.