A la suite d’une enquête de trois ans de la CIIVISE, la Première ministre présente aujourd’hui le nouveau plan de lutte contre les violences faites aux enfants. En France, un enfant sur dix est victime d’inceste. Sujet du Téléphone sonne ce 20 novembre. Une sélection de messages d’auditeurs à lire ici :

J’ai subi l’inceste, ainsi que des violences sexuelles lors de mon enfance et mon adolescence, je n’ai réussi à en parler qu’à presque 30 ans, à mon conjoint, puis à un psy. Depuis il m’est arrivé d’en parler à des amis dont je sais qu’ils ont aussi été victimes, il me semble que dans ce sujet de l’inceste comme celui des violences sexuelles en général, la responsabilité repose entièrement sur les victimes, à elles de parler, de prendre le risque de briser des familles, de ne pas être entendues, crues, de revivre encore et encore le trauma, de le remuer. Les campagnes s’adressent et se tournent presque toujours vers les victimes. Après tout ce qu’elles ont subi, elles doivent retourner dans cet endroit pour témoigner, chaque spot, chaque émission me fait replonger dans l’effroi, je sais que c’est nécessaire, mais ne pourrait-on pas aussi s’adresser aux agresseurs, leur rappeler leur responsabilité, qu’ils commettent un crime, que c’est eux qui sont le problème, qui brisent des familles et des vies, leur rendre à eux la saleté, la noirceur de l’inceste, et les enjoindre à se dénoncer et se faire soigner.

Ma fille a déposé un témoignage à la police à l’âge de 15 ans concernant sa meilleure amie qui était sous l’emprise mentale et sexuelle d’un entraîneur sportif. Son amie a essayé de l’en empêcher mais ma fille a malgré tout fait sa déclaration.
Plusieurs années après, son amie l’a remerciée car elle avait réalisé et compris ce qui s’était passé. Mais entre temps le lien avait été brisé.
Ce qui est hallucinant c’est que le club n’a jamais suspendu cet entraîneur et qu’il est encore en activité car lors du procès la victime n’a pas voulu témoigner contre lui. La juge a déclaré un non-lieu en indiquant bien que c’était faute de témoignage. Les clubs sont irresponsables.

Merci pour votre émission de ce soir avec les membres de la CIVISE. J’ai vraiment apprécié cette émission, sa construction et les interventions des invités.
Une seule critique négative : je suis assistante sociale à l’Education nationale et je regrette que quasiment à chaque fois dans ces émissions mentionnant cette institution, on ne mentionne jamais qu’au sein de l’Education nationale, il y a des assistantes sociales. Certes, nous ne sommes pas assez, nous intervenons surtout dans le secondaire et une assistante sociale intervient dans 2 ou 3 établissements (voire davantage). Mais nous sommes des soutiens pour les autres personnels, nous accompagnons les enfants victimes de maltraitances, d’inceste quotidiennement et représentons un relais essentiel pour les enseignants, CPE et autres personnels qui recueillent la parole des élèves…

Une amie d’enfance a été victime d’inceste. Elle n’a jamais rien dit et aujourd’hui âgée de 30 ans, son anémie se dissipe. Son père a abusé d’elle pendant des années, ils ne sont plus en contact, il a coupé les ponts et a adopté le fils de sa nouvelle compagne. Comment faire lorsque nous avons un doute qu’il réitère les mêmes atrocités ? Peut-on porter plainte ? Est-ce qu’il y aura une suite ? Des investigations ?

Cadre de protection de l’enfance, j’ai adressé un nombre important de signalements au Parquet suite à des révélations d’agressions sexuelles.
Je suis toujours sidérée par l’absence de protocole et la différence de traitement d’une situation à l’autre, le délai de traitement pouvant varier de 2 semaines à 2 ans suivant la personne en charge du dossier. Un administrateur ad’hoc est rarement nommé pendant l’enquête, ce qui fragilise la protection des intérêts de l’enfant pendant le temps de l’enquête.
Enfin, beaucoup de procédures sont in fine classées sans suite, faute de preuves. Or la connaissance en sciences humaines pourrait nous aider à appréhender ces situations autrement. Je ne comprends pas pourquoi le législateur ne se positionne pas en faveur d’une prise en compte (comme faisceau d’indices) des observations des travailleurs sociaux et des équipes de soins sur les symptômes des enfants. Bravo pour votre belle émission.

Je suis assistant familial, j’accueille depuis 2015 une jeune fille de 16 ans, ainée d’une fratrie de 5 enfants. Trois de ces enfants ont fait des révélations très grave d’inceste, de mauvais traitements. L’aînée que j’accueille semble être dans le déni par rapport aux abus sexuels mais évoque les coups et les privations. La mère a eu un autre enfant depuis âgé aujourd’hui de 7 ans qui vit toujours sous le même toit malgré les informations préoccupantes. J’entends bien qu’il faut appeler le 119 pour faire un signalement et après, RIEN.
Après une enquête et les révélations des enfants victimes de ces agressions les juges ont estimé qu’il y avait encore un doute et l’affaire est classée sans suite. A quoi bon faire un signalement si les révélations ne sont pas suivies d’un procès et d’une éventuelle condamnation ? Comment expliquer aux enfants que leurs parents n’ont pas été jugés et conservent encore l’autorité parentale ? J’ajouterais que nous avons accueilli, mon épouse et moi, trois enfants qui ont eu un petit frère ou une petite sœur dans l’année qui a suivi leur placement comme s’il fallait « remplacer » les enfants retirés.


Tout de suite le sujet s’est tourné vers les enseignants et je comprends qu’on y trouve un lieu privilégié de parole entre enfants et adultes. Mais de grâce donnez à ce lieu du personnel adapté au problème!
Entre sécurité routière, secourisme, harcèlement, enfants à profils particuliers… être enseignant ressemble de plus en plus à cumuler celui d’animateur spécialisé à celui de psychologue.
L’accès à la parole que défend votre invité n’est pas notre quotidien devant nos classes surchargées…

Je suis enseignante. J’entends que Monsieur Le Juge nous dit l’importance de dire “je te crois et je vais te protéger”. Mais comment protéger ? Nous signalons, faisons des IP (Informations Préoccupantes, une fois, deux fois, trois fois…), des faits établissements, on alerte les CMP, CMPP qui suivent l’enfant avec des psys. Mais rien ne se passe. On se sent démuni. On ne sait plus quoi faire.

Trop difficile pour un enfant de comprendre ce qui lui arrive, encore plus difficile pour lui d’en parler s’il a conscience de ce qui lui arrive car souvent il est victime d’une personne qu’il aime. Pourquoi ne pas aussi détecter les auteurs d’inceste ? Pourquoi ne pas mettre à disposition de la population un numéro vert pour les personnes qui sont aussi victimes de leurs pulsions violentes ou sexuelles ?