Chère Médiatrice de Radio France,
Je vous écris aujourd'hui au sujet d'une question d'intérêt public d'une gravité indiscutable, un véritable fléau qui menace nos précieuses oreilles chaque matin, midi, soir, et parfois même au cœur de la nuit : je parle bien sûr de la propagation galopante des tics de langage sur vos ondes, et plus précisément des redoutables "du coup" et "en fait".
Permettez-moi de poser le décor : tranquille, un café à la main, je m'apprête à profiter d'un débat passionnant sur l'économie, la culture ou même le climat. Soudain, sans prévenir, un premier "en fait" retentit. Puis un deuxième, puis un "du coup". Et voilà, c'est parti : les intervenants se renvoient ces tics de langage comme si c'était une compétition pour décrocher le record du nombre d'occurrences en une phrase. Du coup (oh pardon !), je commence à compter, puis je perds le fil du débat. En fait (zut !), j'en oublie même le sujet principal.
Alors, que faire face à cette épidémie ? Faut-il envisager un décompte en direct, avec un buzzer retentissant à chaque "du coup" et "en fait" lâché à l'antenne, façon jeu télévisé ? Ou bien une alarme sonore de type klaxon à vélo chaque fois que le quota des trois "en fait" est atteint dans une seule intervention ? Autre idée : organiser un "Challenge Substitution". Chaque journaliste et invité se verrait remettre, avant l’émission, une liste d'expressions alternatives qu'il devrait s'efforcer d'utiliser. À la place de "du coup", pourquoi ne pas redécouvrir le charme de "par conséquent", ou même du classique "ainsi" ? Quant à "en fait", un bon vieux "effectivement" pourrait faire l'affaire, ou encore un "à vrai dire" qu’on n’a plus entendu depuis la troisième République.
Ce serait à la fois un exercice de créativité pour vos journalistes, un moment de détente pour vos auditeurs, et surtout un moyen efficace d’éradiquer ces tics ! Les plus joueurs pourraient même se lancer dans une collecte de points : 10 points pour un synonyme original, -5 pour un "en fait" glissé discrètement. Et, à la fin de la saison, un trophée de l'élocution élégante serait décerné au journaliste qui aura su se libérer de ces expressions avec le plus d'inventivité.
Je vous laisse imaginer le bénéfice pour la langue française et pour nos nerfs. De quoi redonner à la parole radiophonique toute sa richesse, son charme, et pourquoi pas son... en fait, non, je ne vais pas le dire !
Dans l’espoir que mes suggestions vous inspirent, je reste à l'écoute de vos ondes, armé de patience (et d'un compteur à "du coup").
Cordialement (et sans tic !),
Un auditeur attentif et un brin taquin
PS : Si vous organisez ce challenge, je me porte volontaire pour compter les points !