Je me sens insulté….
Voici la réponse de Bertrand Dicale:
« Cher monsieur,
Je vous sais gré de votre long message, et donc du temps que vous y avez consacré, ce qui est une manière d’hommage à l’importance que vous accordez à la radio de service public.
Néanmoins, je suis obligé de vous inviter à deux réflexions sémantiques.
Premièrement, le dictionnaire Le Robert (qui est celui que j’ai sur mon bureau) donne comme définition au mot « venimeux » un sens propre concernant le cobra, la vipère et les araignées; pour autant qu’Eric Zemmour n’appartient pas au règne animal, cela ne le concerne pas. Ensuite, Le Robert propose cette définition: « Qui a de la haine, de la méchanceté. »
C’est ce sens que j’utilise quand je dis » c’est la teneur des propos venimeux d’Eric Zemmour il y a quelques jours, qui lui a valu une cinglante réponse de Rachida Dati, le maire du VIIe arrondissement de Paris. » Au passage, je vous rappelle que cette personnalité politique a publiquement émis des doutes sur la santé mentale de M. Zemmour à la suite des propos la visant nommément.
Il me semble qu’entraîné par une certaine exaltation, vous empruntiez un chemin fautif en affirmant que je pourrais croire qu’il est venimeux en une quelconque manière de baptiser ses enfants d’une façon ou d’une autre.
Non, je parle simplement de la méchanceté des propos de M. Zemmour à l’endroit de Mme Dati, et qu’elle a manifestement ressentie (et que lui-même ne conteste guère, d’ailleurs, puisqu’il se dit « révulsé », « scandalisé » ou « révolté » – je ne me souviens plus du terme exact – par le prénom qu’elle a donné à sa fille, et donc porté à clamer avec force la réprobation qu’il éprouve).
Deuxièmement, je ne parle pas de pureté raciale, de IIIe Reich ou de quoi que ce soit de cet ordre. Je parle de la pureté en tant qu' »état de ce qui est sans mélange » (notre ami Le Robert, encore). Or vous-même (si je vous ai bien compris) évoquez clairement le fait que votre père et vous-même portez des prénoms français sans ambiguïté. Permettez-moi, cher ami, de trouver un rien pittoresque que vous me reprochiez d’employer un mot qui désigne précisément ce que vous défendez.
Vous me direz qu’il y a un autre mot présent au dictionnaire, et qui est celui de francité. Il est clair, précis, pratique mais, s’il existe depuis quelques générations, ce mot a toujours des résonnances de jargon que l’on préfère éviter à la radio. On ne dit donc pas à l’antenne « la francité » pour désigner ce qui est purement français (ou parfaitement français, ou français sans mélange, selon ce que vous préférez).
Mais je ne parlais pas ici de M. Zemmour. Je parlais, de manière générale, de cette question assez française du caractère français des prénoms par comparaison avec les États-Unis, et justement à cause d’une propagation, au cours des années 60, de la graphie française Michelle dans les pays anglo-saxons. Je cite: » Et les prénoms français ont eu beaucoup de succès à l’étranger. Cette Michelle célébrissime des Beatles date en 1965. L’année précédente était née à Chicago une certaine Michelle Robinson qui, des années plus tard, deviendrait Michelle Obama. Mais il est vrai qu’elle est américaine. Et qu’on ne s’indigne pas souvent, aux États-Unis, sur la pureté des prénoms. Là-bas, on pense facilement que tous les prénoms se valent. »
Vous conviendrez donc – avec un peu de bonne foi – que je n’ai en aucune manière cherché à insulter quiconque (si vous saviez d’où vient ma famille!). Et enfin, pour que vous n’imaginiez pas que je suis un journaliste gauchiste caricatural (ce que je crois déceler dans votre message), permettez-moi de vous rappeler un petit détail biographique que vous n’aurez aucune difficulté à vérifier: j’ai été journaliste au Figaro pendant vingt et un ans. Il me semble même me souvenir que j’y suis entré avant M. Zemmour.
Merci d’écouter Franceinfo.
Bien cordialement. »