Pour répondre aux questions des auditeurs, Emmanuelle Daviet reçoit Sandrine Treiner directrice de France Culture
Emmanuelle Daviet : Sandrine Treiner. Bonjour, nous allons commencer par une question qui revient régulièrement dans le courrier des auditeurs. Ils veulent une certification des invités qui s’expriment. En d’autres mots, avoir la garantie que le propos diffusé est porté par un interlocuteur dont le profil est correctement établi. Voici un message « serait il possible pour les journalistes de vérifier et d’indiquer les liens d’intérêts de leurs intervenants scientifiques et les médecins? C’est courant dans les colloques et cela permet de situer les prises de position des intervenants sans nécessairement les disqualifier ». Sandrine Treiner Lorsqu’il y a soupçon de conflit d’intérêts, notamment avec des laboratoires, évidemment, cela sème le trouble dans l’esprit du public. Alors, comment présenter un invité avec transparence ?
Sandrine Treiner : La question est extrêmement légitime. Je crois que notre travail consiste précisément à ne pas inviter des personnes sous soupçonnables de conflit d’intérêts, le conflit d’intérêts supposant que la chose est gardée secrète et que donc elle n’est pas comme comme une donnée que l’on peut directement critiquer et débattre. Donc, je dirais que vous savez si ici, à France Culture, on ne fait pas ce travail. Je ne sais pas si c’est de certification. Le terme est peut être pas approprié, mais en tout cas de vérification des personnes que l’on invite à l’antenne et de présentation de ces personnes-là dans toutes les dimensions qui sont nécessaires pour appréhender la parole. En fait, si on ne faisait pas, on se tirerait nous-mêmes une balle dans le pied puisque d’abord, on est tout à fait conscient qu’on a une responsabilité particulière dans la mesure où en fait. France-Culture apparaît comme une antenne de la certification des gens qui s’y expriment. Et d’autre part, toute notre légitimité repose sur la qualité de l’expertise que l’on propose à nos auditeurs. Donc, je crois que nous faisons ce travail. Sans doute, on ne réussit pas à 100%, mais il est fait.
Emmanuelle Daviet : On poursuit avec cette question. « Les annonces de mesures sont rarement expliquées sur le fond. Les explications du gouvernement, qui est tenu par ses propres besoins de communication, sont souvent très vagues, donc insuffisantes. Or, nous, citoyens, avons besoin de raisons bien claires pour combattre les inquiétudes infondées et pour nous efforcer de respecter les mesures qui deviennent vraiment lourdes dans certaines situations. » Sandrine Treiner Ce travail de décryptage est à l’œuvre sur votre antenne. Faut il encore l’accroître ? Est ce que cela vous paraît possible ?
Sandrine Treiner : Ecoutez, on peut toujours faire faire davantage et faire mieux. Je crois qu’effectivement, comme auditeurs auditrices le souligne, nous nous efforçons de le faire, y compris dans nos journaux. Une information, ce n’est pas la reprise d’un communiqué gouvernemental. Ça doit être davantage que ça. Avec la distance critique et nécessaire et la capacité à expliciter les mesures du gouvernement, je pense que ça fait partie pour le coup vraiment, de notre rôle de service public. Et donc, oui, on s’y attelle. C’est pour cela qu’on a développé, par exemple, le fait que dans la matinale du vendredi, chaque vendredi, notre spécialiste scientifique Nicolas Martin vient en lieu et place de la question du jour pour reprendre les grands sujets de la semaine et essayer de les éclairer au maximum.
Emmanuelle Daviet : Et puis, on peut aussi inviter les auditeurs à consulter votre site, qui est quand même très richement fourni en décryptages. Et c’est vrai qu’ils se complètent très bien. Le travail fait sur l’antenne.
Hier, à l’occasion de la Journée de la laïcité. Vous avez proposé un dispositif spécial à l’antenne et à cette occasion, un auditeur écrit « J’écoute votre invité sur la laïcité. Je me pose la question de la diffusion du culte chrétien sur la radio publique le dimanche. N’est ce pas un pied de nez à la loi de 1905 ? Je parle bien de la messe et du culte protestant. De temps en temps, et non pas des émissions sur les religions qui sont passionnantes. Sandrine Treiner C’est une question que nous avons déjà abordée, mais il semble utile de rappeler que ces émissions religieuses font partie du cahier des charges de Radio France.
Sandrine Treiner : Oui, il faut rappeler, et vous avez raison, il faut toujours le réexpliquer, rappeler que ces émissions font partie du cahier des charges de Radio France et également de France Télévisions, c’est à dire de l’audiovisuel public, de manière générale, rappelez, et je sais que ça n’est pas simple, que la laïcité, ce n’est pas l’élimination des religions de l’espace public, mais la codification de leur présence dans l’espace public. En effet, les cultes qui choisissent de diffuser le culte pour les auditeurs, d’autres qui choisissent une approche plus culturelle, c’est le cas. Ghaleb Bencheikh avec son émission sur le monde musulman. C’est le cas de Marc-Alain Ouaknin sur le monde juif, mais enfin bon, dans tous les cas, il s’agit bien de répondre à un cahier des charges extrêmement précis.
Emmanuelle Daviet : Terminons en citant une lauréate que l’on a pu entendre sur France Culture. Je vous lis sans propos. « La chose la plus destructrice, c’est de devoir être responsable de ce à quoi on a consenti. » Cette formule très pertinente est signée Lola Lafon. Et vous vouliez dire quelques mots à son sujet ? Sandrine Treiner
Sandrine Treiner : Oui, puisque puisque c’est une information que Olivia Gesbert a été amenée à donner à nos auditeurs, nous, auditrices, il y a juste un instant, au terme d’un parcours toujours exaltant qui a engagé cinq romancières et romanciers présélectionnés par les producteurs et les journalistes de France Culture et de Télérama, dans tout le territoire, grâce à des rencontres virtuelles puisque cette année, nous n’avons pas pu tenir le prix Roman des étudiants habituellement. Mais du coup, on en a décuplé grâce grâce aux rencontres virtuelle, l’impact. Lola Lafon est effectivement notre lauréate de cette année pour un roman publié chez Actes Sud qui s’intitule Chavirée. J’ai bu, je boude pas mon plaisir. J’aimais beaucoup les cinq livres. J’aime beaucoup celui de Lola Lafon, qui avait déjà été sélectionné par notre jury. C’est une très bonne auteure. Elle est à la fois une véritable romancière. C’est en même temps aussi une femme extrêmement astucieuse, comme vous le montrer à travers cette citation. Et je voudrais remercier ici à la fois le ministère de l’Enseignement supérieur qui soutient ce prix, et également les universités qui se sont engagées, les auteurs, les éditeurs. C’est un grand moment. Vous vous rendez compte qu’il y avait 1500 jurés cette année, 1500 jurés ? On est peut être le prix le plus important en termes de participation