Nous nous intéressons aujourd’hui aux nouvelles façons de consommer la radio puisqu’il y a toute une révolution en cours, de nouveaux usages qui s’installent. Et donc, il nous semblait intéressant aujourd’hui, avec Florent Latrive, directeur du numérique de France Culture d’aborder cette question.

Emmanuelle Daviet : Comment les auditeurs écoutent les programmes de France Culture ?

Florent Latrive : Ils écoutent de plus en plus en numérique, évidemment. Mais en fait, on le chiffre puisqu’une étude publiée par Médiamétrie la semaine dernière, qui s’appelle le Global Radio qui est faite deux fois par an et qu’on regarde très précisément, nous donne exactement le pourcentage de minutes de France Culture qui sont écoutées en numérique. Donc, il est aujourd’hui de 31,8%. Ça veut dire qu’aujourd’hui, quasiment une minute sur trois de France Culture est écoutée en numérique par les auditeurs, que ce soit en direct ou en podcast, évidemment à la demande.

Emmanuelle Daviet : Et comment expliquez vous ce phénomène, alors ?

Florent Latrive : C’est un phénomène qui est important, qui est un phénomène qui est continu. France Culture est assez atypique dans le paysage radio pour ça, puisque ces une minute sur trois sont moindres pour la moyenne du marché, on est autour de 17% pour la moyenne du marché. Pour France Culture, ce qui est très clair, c’est qu’on a eu une évolution continue, notamment portée par l’écoute à la demande, on est la deuxième radio de France la plus la plus podcastée. Il y a quasiment 400 000 auditeurs par jour qui écoutent France Culture à la demande avec les podcasts. Et cela a été évidemment accentué par la pandémie et des usages qui se sont numérisés avec des gens qui ont rompu avec des habitudes habituelles de trajet en voiture, de choses comme ça et donc retrouvé d’autres habitudes. Beaucoup sur le téléphone mobile, évidemment, qui reste le principal support d’écoute pour ces usages numériques.

Emmanuelle Daviet : Quelles sont les conséquences de ces nouveaux usages dans la manière de fabriquer la radio ?

Florent Latrive : Très concrètement, à partir du moment où on sait que autant de gens nous écoutent en numérique, notamment à la demande, ça veut dire que de plus en plus, on produit une partie de nos programmes en anticipant qu’ils seront écoutés avec des gens qui vont décider de les écouter au début, qui vont les écouter seuls, qui vont les écouter au casque, qui vont les écouter en enchaînant des épisodes avec le mode de feuilletonage, par exemple. Pour prendre un exemple récent, il y a un documentaire que nous avons diffusé à l’antenne dans la série LSD, qui s’appelle « Les bandes de jeunes sont éternelles », qui est une histoire des bandes de jeunes à travers à travers le temps. Nous avons produit en amont et diffusé en amont cette série en 8 épisodes d’une demie heure, alors qu’à l’antenne, c’est quatre fois une heure et nous l’avons diffusée avec un mode beaucoup plus sérielle, reprenant des « cliffhanger », pour reprendre l’expression consacrée dans les feuilletons, etc. Ça, c’est un exemple assez typique et on le fait de plus en plus, c’est à dire d’anticiper des productions qui sont d’abord faites pour une écoute numérique et évidemment, qui font une très bonne écoute à l’antenne.

Emmanuelle Daviet : Alors, on le sait, les vacances sont toujours un moment privilégié pour l’écoute à la demande. A Noël, proposez-vous une offre jeunesse particulière ?

Florent Latrive : Il y a effectivement une offre jeunesse particulière qui va être proposée pendant les congés. Dès aujourd’hui, on publie en numérique « Le petit Nicolas ou Les aventures du petit Nicolas« , adapté de Sempé et Goscinny, onze tableaux qui ont été joués sur scène par des enfants il y a quelques semaines à la Maison de la radio, donc, c’est un podcast diffusé aujourd’hui, ce sera diffusé à l’antenne ce week end. Plus toute une programmation différente avec « les Enfantines« , qui sont des contes qui sont diffusés tous les jours et qu’on va retrouver en podcast. Et encore d’autres programmations comme « Moby Dick » de Melville, adapté avec le Philharmonique.

Emmanuelle Daviet : Et pour les adultes ?

Florent Latrive : Pour les adultes, il y a tout ça aussi parce que les adultes aiment beaucoup les enfants, évidemment. Et pour ne citer que quelques exemples récents de podcasts que nous avons publiés, il y a une série qui s’appelle « Probation » de Mahi Bena et réalisée par Cédric Aussir, qui est une fiction « thriller » sur la libération de prison d’un dealer qui est absolument à écouter pour les vacances. Mais aussi, nous allons être sur les traces de Mélody Nelson avec Looking for Mélody, qui est une enquête menée par Anne Lamotte sur les traces de la version écrite, le livre qui avait été fait pour Melody Nelson. Et encore, on peut réécouter le podcast qui a été fait à partir de la journée du festival « Et maintenant ? », le podcast des idées, nous en avons fait un podcast. Une journée de débats sur les idées de demain avec Arte, qui donne un podcast à écouter à retrouver sur franceculture.fr et l’application Radio France.

Emmanuelle Daviet : Alors, à propos des podcasts, un auditeur nous écrit : « Je regrette et je ne comprends pas que la publicité se soit immiscée dans les podcasts proposés par Radio France et en particulier dans ceux produit par France Culture. » Que lui répondez-vous ?

Florent Latrive : Alors, je lui réponds que d’abord, elle ne s’est pas immiscée, évidemment, il y a des gens qui ont pris cette décision. Il faut bien voir que le développement fort, comme on vient de le souligner, de l’écoute en numérique induit pour nous des coûts. De toute façon, Radio France a une partie de son budget qui est financée par la publicité, c’est une publicité du coup qu’on retrouve sur certaines antennes, alors certes pas à France Culture mais sur d’autres et que tous les podcasts et toute l’écoute à la demande ont quelques publicités, je dis bien quelques parce qu’en revanche, les règles qui sont données sont des règles assez strictes en termes et de types d’annonceurs, avec des chartes spéciales et de ce qu’on appelle pression publicitaire, c’est-à-dire on ne remet pas la même publicité plusieurs fois aux mêmes auditeurs et il y a des programmes qui en sont totalement exempts, notamment les programmes d’informations et les programmes pédagogiques ou de lutte contre la désinformation qui, eux, n’ont pas de publicité du tout.