Les auditeurs nous écrivent à propos du traitement éditorial de la situation à Mayotte après le passage du cyclone Chido. Agnès Vahramian, directrice de Franceinfo, leur répond au micro d’Emmanuelle Daviet
Emmanuelle Daviet: On revient dans ce rendez-vous sur les deux actualités fortes du week-end dernier : le cyclone à Mayotte et la venue du pape en Corse. Des auditeurs nous ont écrit et je vous lis ce message : »fidèle auditeur de Franceinfo, je suis surpris du traitement de l’actualité ce dimanche 15 décembre, alors que Mayotte vit un drame sans précédent dont le bilan humain et matériel risque d’être d’une ampleur abyssale. Vous n’abordez ce sujet qu’à la marge, préférant des éditions spéciales consacrées à un sujet marginal : la visite du pape en Corse. Je suis très déçu » nous écrit cet auditeur. Agnès Vahramian, dimanche dernier. Comment a été déterminé l’ordre de priorité dans le traitement de ces deux actualités fortes, donc à savoir le cyclone à Mayotte et la visite historique du pape en Corse ?
Agnès Vahramian: Ecoutez, j’ai essayé d’objectiver et en ressortant ce que nous avons diffusé, et bien je peux tout de même confirmer aux auditeurs que nous avons ouvert tous nos journaux et tous nos flashs de demi heure avec la situation à Mayotte et toutes les dix minutes aussi dans les demi heures. Nous avons consacré plusieurs minutes de témoignages sur ce qu’on savait à ce moment-là. Bien sûr, l’autre actualité forte était celle du pape et nous avons en direct diffusé les moments forts. Alors évidemment, cela prend du temps sur l’antenne, le moment où le pape arrive, où il déambule. Nous n’avons pas voulu rater les moments de liesse populaire. Et puis le moment politique aussi de son discours, ce qui a évidemment tenu de la place sur l’antenne. Mais je peux vous confirmer tout de même que Mayotte, notamment dans l’après-midi et surtout en soirée, moment où les autorités parlent d’un bilan éventuel de plusieurs centaines de morts. Nous sommes à ce moment là largement sur la situation à Mayotte.
Emmanuelle Daviet: Alors, précisément, concernant Mayotte, des auditeurs souhaitent savoir quels moyens sont déployés pour couvrir les conséquences du cyclone ?
Agnès Vahramian: Alors tout de suite, nous avons décidé d’envoyer l’une de nos équipes à la Réunion. Vous savez, toutes les communications ont été coupées, les liaisons étaient coupées et il a fallu que l’équipe de Boris Loumagne et d’Hélène Langlois, la technicienne de Franceinfo, eh bien, attendent une possibilité de monter dans un avion civil d’ailleurs où ils étaient une vingtaine de journalistes avec des militaires pour arriver finalement sur l’île. Nous avons aussi très vite envoyé un deuxième reporter, Laurent Kramer. Donc nos équipes sont déployées. Mais vous savez, les problèmes d’accès étaient très importants et la priorité, évidemment, était aux secours et pas aux journalistes.
Emmanuelle Daviet: Les auditeurs s’interrogent justement sur la manière dont les journalistes travaillent sur place, à quels défis sont-ils confrontés et peuvent-ils se déplacer facilement ?
Agnès Vahramian: Eh bien, écoutez, une fois sur l’île, là, j’ai parlé justement à Boris et à Hélène sur leurs conditions de travail. Ils m’ont expliqué qu’en arrivant à Mayotte, avec des packs d’eau, avec de la nourriture avec eux, parce qu’évidemment ils ne pouvaient pas, ils ne peuvent pas prélever, si vous voulez, sur le peu qu’il y a déjà sur l’île. Et bien leur défi a été de trouver un habitant de Mayotte qui veuille bien les transporter et peut être les loger. Et effectivement, ils ont fait la connaissance de quelqu’un qui s’appelle Abou et qui a accepté, eh bien de les emmener à travers l’île, notamment vers les bidonvilles, vers les zones qui ont été les plus ravagées. Cette personne les héberge aussi et ils ont de l’électricité, mais ils n’ont pas d’eau. C’est une maison en dur, donc ils ont plutôt de la chance. Et surtout, eh bien, ils ont une valise satellite avec laquelle ils peuvent diffuser, ce qui est évidemment l’essentiel quand on est journaliste, c’est de pouvoir à la fois témoigner et de pouvoir envoyer son reportage jusqu’ici dans nos studios et nos salles techniques. Et Boris me disait que d’ailleurs, eh bien, le satellite qui est au dessus d’eux est dirigé quasiment exprès à cause de la catastrophe vers l’île de Mayotte, afin de permettre, si vous voulez, aux télécommunications de revenir le plus vite. Et cela profite évidemment à nos auditeurs et à Franceinfo.
Emmanuelle Daviet: Dernière question des auditeurs : les journalistes resteront sur place aussi longtemps que nécessaire ?
Agnès Vahramian: Oui, aussi longtemps que nécessaire. Nous avons déjà prévu la relève pour la période de Noël. Nous souhaitons bien sûr témoigner la reconstruction et évidemment l’établissement du bilan et aussi l’arrivée encore à la fois des renforts, l’arrivée de nourriture et d’eau est un défi majeur. Et les journalistes de Radio France seront auprès des habitants de Mayotte dans ce moment.