Depuis deux semaines, les auditeurs sont nombreux à nous écrire pour réagir au traitement éditorial des élections législatives à venir.



Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction de Franceinfo répond à plusieurs questions soulevées par les auditeurs. Ils se demandent quel est l’impact des sondages sur le processus démocratique, surtout en cette période complexe, sont-ils indispensables ou non ? Quelle est leur place sur l’antenne ?  

Dans le rendez-vous de la médiatrice également : la plus-value des reportages qui donnent la parole aux citoyens lambda sur la séquence politique actuelle ou leurs intentions de vote. Certains auditeurs s’interrogent sur la multiplication des micros-trottoirs, estimant que ces témoignages ponctuels ne constituent pas de l’information. Quel est l’intérêt d’écouter ces vox populi ? 

Enfin, nous verrons les temps de parole accordés aux différentes formations politiques. Le principe qui s’applique est celui de l’équité, et non de l’égalité stricte. Comment est évaluée cette équité ? 

Emmanuelle Daviet : Les auditeurs, très nombreux à nous écrire, expriment une réelle inquiétude face au climat politique actuel, et ils s’interrogent également sur différents aspects de cette campagne. Des auditeurs estiment par exemple que les sondages perturbent profondément le processus démocratique dans cette période difficile, et souhaiteraient qu’on n’en parle pas.

Que pensez-vous de cette option et quelle est votre ligne éditoriale concernant les sondages ? Sont-ils indispensables ou pas ?

Florent Guyotat : Alors d’abord, en période électorale, c’est vrai qu’il est fréquent que des médias, dont franceinfo, commandent des enquêtes d’opinion à des instituts de sondage. Ça a été le cas avant les Européennes. Nous avons publié des sondages d’intentions de vote avec notre partenaire Ipsos. Des sondages qui, cette fois-ci, se sont révélés plutôt exacts, puisque les résultats des Européennes, en France, étaient globalement conformes aux dernières enquêtes que nous avons publiées.
On rappelle aussi que ça n’a pas toujours été le cas. Lors d’autres élections, il est arrivé, comme on dit, que les sondages se trompent et qu’un sondage, au fond, n’est jamais qu’une photographie à l’instant T de l’opinion, sur un échantillon réduit de la population, avec une marge d’erreur, et donc une possibilité que le résultat du vote ne soit pas conforme aux prévisions.
Alors je vous ai parlé des élections européennes et des élections précédentes. Et pour cette campagne qui nous intéresse, c’est-à-dire la campagne des législatives qui dure depuis le 9 juin au soir, depuis quasiment deux semaines, vous l’avez peut-être remarqué, franceinfo n’a, pour l’instant, publié aucun sondage.
Alors je vous rassure, il y en aura un ce soir à 18 h, toujours avec notre partenaire Ipsos, et un autre aussi la semaine prochaine. Mais je vais vous expliquer et c’est important, les précautions que nous prenons. Il y aura des pourcentages d’intentions de vote, c’est-à-dire « tant de % », des personnes interrogées, qui veulent voter pour telle formation. Des questions sur les souhaits de victoire aussi,  « tant de % », des personnes interrogées, qui souhaitent que tel groupe politique l’emporte à l’issue des élections. Cela va nous donner, c’est important, une indication sur l’état de l’opinion.
En revanche, avant le premier tour, il n’y aura pas de projections pour nous en nombre de sièges à l’Assemblée. Donc pas d’indication, par exemple, sur un groupe qui pourrait avoir la majorité relative ou la majorité absolue. Tout simplement parce que notre partenaire Ipsos a l’honnêteté de nous dire que ce serait trop risqué : trop d’incertitudes, trop de risques d’erreurs. Donc, dans ces conditions, nous préférons ne pas donner de projections en nombre de sièges, pour éviter de nous tromper, ou de donner une tendance qui ne serait pas suffisamment étayée.

Emmanuelle Daviet : On poursuit avec ce que l’on appelle, dans notre jargon, « les micros-trottoirs ». Quelles sont les plus-values des reportages où l’on entend des citoyens lambda évoquer la séquence politique actuelle, ou nous dire pour qui ils vont voter, s’interrogent des auditeurs. Alors je vous lis l’un des messages reçus. « Je m’étonne de la multiplication des micros-trottoirs pour nous informer de la chose publique en ces temps complexes. Je m’interroge sur l’intérêt d’écouter cela. Ce n’est pas de l’information ».

Quel est l’intérêt d’écouter ces vox populi ?

Florent Guyotat : Alors globalement, je suis en désaccord avec la remarque de cet auditeur, parce que souvent aussi, on nous reproche d’être trop institutionnels. On nous dit : « Vous donnez trop la parole aux personnalités politiques ou aux spécialistes ». C’est important de les entendre et ça fait partie du débat démocratique. On en entend tous les jours des personnalités politiques sur franceinfo. Mais justement, pour ces élections, c’est une volonté éditoriale et un choix assumé. On ne veut pas se limiter à la parole des politiques et des spécialistes.
On veut aussi à franceinfo, donner la parole à des électeurs de tout bord, les entendre pour qu’ils nous disent leurs craintes, leurs espoirs aussi. Et c’est pour ça donc que chaque matin, en semaine, jusqu’au vendredi 28 juin qui précède ce premier tour des élections, nous donnons la parole à des électeurs de l’Yonne et de la Gironde, via nos reporters, Valentin Dunate et Boris Loumagne. Et encore une fois, c’est un choix assumé, parce qu’on ne veut pas se limiter à une parole officielle.

Emmanuelle Daviet : On termine avec les temps de parole. Le principe qui s’applique est celui de l’équité et non de l’égalité stricte. Alors, comment évaluez-vous cette équité ?

Florent Guyotat : Alors je rappelle d’abord qu’on a des obligations légales. On a des temps de parole à respecter auprès de l’ARCOM, le régulateur de l’audiovisuel, des temps de parole qui sont fixés pour chaque partie, pour chaque groupe, en fonction notamment des résultats des dernières élections. Tout ça est strictement contrôlé. Et si nous ne respectons pas ces objectifs, ces pourcentages, nous nous exposons à des sanctions. Donc, évidemment, nous faisons très attention.