Nous évoquons aujourd’hui la mécanique d’antenne et plus particulièrement la question des rediffusions. Des auditeurs qui écoutent Franceinfo sur une longue durée, écrivent, je cite : « j’ai l’impression d’entendre plusieurs fois la même information ». Pour répondre à leurs questions, Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction est au micro d’Emmanuelle Daviet
Emmanuelle Daviet : D’un point de vue éditorial, quelles sont les raisons qui conduisent à rediffuser un reportage ou une interview au cours d’une même journée ?
Florent Guyotat: Alors je vais essayer d’être le plus transparent, le plus clair possible aussi avec nos auditeurs. Franceinfo, 3ème radio de France selon les dernières mesures d’audience de Médiamétrie, c’est autour de 4 900 000 auditeurs par jour. Ces personnes, elles ne nous écoutent pas toute la journée. La durée d’écoute moyenne de Franceinfo, c’est 1h par jour. Ça veut dire que nos auditeurs nous écoutent sur une durée relativement courte. On est une radio d’information en continu. On vient chez nous avant tout pour avoir l’essentiel de l’actualité à tout moment de la journée. Ça veut dire que les auditeurs qui nous écoutent le matin entre 7h et 8h ne sont bien souvent pas les mêmes que ceux qui nous écoutent, par exemple entre 8h et 9h. Donc forcément, on est obligé de tenir compte de ça. On assume de rediffuser nos reportages et nos interviews pour qu’ils soient entendus tout simplement par le maximum de monde possible.
Emmanuelle Daviet: Florent Guyotat, quelle est, selon vous, la fréquence acceptable d’une rediffusion ? Qu’est-ce qui vous permet de dire à un moment donné dans la journée : stop, on a assez diffusé. Existe-t-il des règles internes pour éviter la saturation ?
Florent Guyotat: Il y a des règles strictes, oui. Un meêm reportage peut passer 3 à 4 fois sur l’antenne de Franceinfo. Donc rediffusion oui, mais sous condition. Autant que possible, il faut respecter un délai d’1h30 entre deux diffusions d’un même reportage. Tout ça pour ne pas créer un sentiment de saturation et ne pas lasser nos auditeurs. Et puis évidemment, l’actualité, elle évolue tout au long de la journée. Il faut se renouveler. Et un reportage diffusé le matin ne peut pas repasser en fin de journée. Il y a des cycles de rediffusion pour nos sujets le matin jusqu’à 12h, à la mi-journée, jusqu’en fin d’après-midi et puis le soir à partir de 17h jusqu’à minuit. Enfin, vous avez aussi des circonstances exceptionnelles. Il y a des événements très importants, des déclarations très fortes qui méritent d’être rediffusées très régulièrement, à intervalles très brefs. Je vais vous donner pour ça un exemple concret. À la fin du mois de février dernier, lorsque Donald Trump reçoit Volodymyr Zelensky à la Maison Blanche, les deux présidents ont une discussion extrêmement tendue devant les caméras et les micros du monde entier. Et là, nous avons diffusé des extraits de cette conversation tous les quarts d’heure. C’était un choix assumé. Nous avons considéré que tous les auditeurs qui nous rejoignaient au fil de la soirée devaient pouvoir entendre très rapidement un passage de cette discussion.
Emmanuelle Daviet: Des auditeurs pensent que les rediffusions sont dues à un manque de journalistes ou à un manque, je cite, « de reportages en stock ». Que leur répondez-vous ?
Florent Guyotat: Ce n’est pas un manque de journalistes. Nous sommes 160 au sein de la rédaction. C’est pas rien tout de même. Mais contrairement aux radios généralistes qui proposent des journaux uniquement aux heures rondes et aux demi-heures avec des programmes de divertissement entre les journaux et bien sur Franceinfo, c’est différent. On est une radio uniquement consacrée à l’information et à l’actualité. « C’est toujours l’heure des infos », comme disait un slogan qui est resté dans l’histoire de notre station, et nos reportages, même si nos journalistes sont des professionnels aguerris, il faut un temps minimal pour les produire, pour vérifier les informations, pour rencontrer aussi les personnes interrogées et donc rediffuser nos contenus et bien ça permet aussi à nos journalistes de prendre le temps nécessaire quelques heures, voire une journée pour réaliser de nouveaux reportages et vous fournir autant que possible une information de qualité.
Emmanuelle Daviet: On le sait, Franceinfo, c’est une radio d’information en continu. Et pourtant, il y a des moments où la rediffusion est impossible.
Florent Guyotat: Déjà, comme l’actualité évolue sans cesse, il y a une règle simple : tous les journaux que vous entendez chaque demi-heure sur Franceinfo ainsi que les titres de l’actualité, L’info en 1 minute à 20 et 45 de chaque heure. Et bien tout ça est présenté en direct là c’est vraiment enregistrements interdits. Et ça permet évidemment à nos présentateurs d’être réactifs et d’ajouter si besoin, au dernier moment, une information importante qui tombe. Et puis c’est valable également pour tous nos reporters sur le terrain. Dès qu’il y a un événement important survient, une catastrophe naturelle, une rencontre sportive, une manifestation culturelle de masse, une séance importante à l’Assemblée. Nos journalistes prennent l’antenne en direct. Ils sont formés pour cela. Ils racontent ce qu’ils voient, ce qu’ils entendent, ce qu’ils constatent. Ils interrogent des témoins ou des acteurs de l’événement en direct. Et dans ces moments là, évidemment, pas de rediffusion, mais un récit dans l’instant, sur le vif. Parce qu’il ne faut pas l’oublier, c’est la mission première de Franceinfo. A tout moment, dès que l’actualité l’exige.