Je m’appelle Régis, j’ai 58 ans et comme des millions de personnes, je suis confiné depuis 12 jours, vivant avec ma femme elle-même sur-confinée car elle est, au dire de mon médecin-traitant, porteuse du Covid-19 non testée et avec ma fille de 18 ans en prépa littéraire histoire. 
 
C’est de mon histoire dont je veux vous parler : 
 
Je suis de ceux qui ont eu un grave accident de la route, en moto, à l’âge de 30 ans 
Je suis de ceux qui comme 6 millions de personnes vivent avec un handicap 
Je suis de ceux qui se déplacent en fauteuil roulant 
Je suis de ceux qui ont connu les urgences médicales (les meilleures comme les pires) 
Je suis de ceux qui ont connu l’hôpital de l’intérieur, l’APHP en particulier 
Je suis de ceux qui ont connu l’avant entretien de Bichat sur la douleur 
Je suis de ceux qui ont connu cette douleur et qui vivent avec aujourd’hui  
Je suis de ceux qui vénèrent les infirmières, les infirmiers, les aides-soignants, les agents hospitaliers 
Je suis de ceux qui ont passé environ quatre années à l’hôpital et dans des centres de rééducation  
Je suis de ceux qui aiment les médecins bienveillants, j’en ai rencontrés beaucoup 
Je suis de ceux qui font confiance à leur médecin-traitant et pour cause, le mien m’a sauvé la vie quatre années après mon accident 
Je suis de ceux qui croient au bonheur, à l’Homme, à l’Humanité… 
 
Par contre 
 
Je ne suis pas de ceux qui critiquent les prises de décisions du Président de la République 
Je ne suis pas de ceux qui commentent les paroles de nos politiques, des experts 
Je ne suis pas de ceux qui portent plainte devant le Conseil d’État  
 
Toutefois 
 
Je serai de ceux qui regarderont avec attention les décisions de toutes nos instances après cet épisode  
Je serai de ceux qui se battront pour un hôpital de qualité avec des lits en nombres  
Je serai de ceux qui agiront pour que la santé ne soit pas un luxe mais un devoir de l’État quel qu’en soit le coût 
 
Parce que, Tout simplement  
 
Je suis de ceux qui croient à la bienveillance, à l’aide, à l’altruisme, au don  
Je suis de ceux qui croient en l’Homme  
Je suis de ceux qui comptent sur vous… 
 
Alors, surtout, ne me décevez pas 

Une quatorzaine a passé
À écouter les infos
Encore quinze autres journées
A décider
Fièvre vérifiée
Pour ne pas psychoter
Comment passer ce temps volé
Sans trop le perdre
Que faire
Lequel de mes deux escaliers
Vais-je descendre ou monter
Dans quelle pièce flâner
Laquelle ranger
En profiter pour trier
Direction le bureau
Premier tiroir oh
C’est fou ce que l’on garde
En ribambelle
Une règle cassée
Des crayons mâchouillés
Des papiers barbouillés
Un vieux portemonnaie
Trois quatre cinq briquets
Du papier à rouler
Déchiré
Des capuchons de stylos
Des invitations de DJ
A des soirées électro
Pour voyager et danser
Sur la plage au bistro
Poubelle
Des tickets de concerts
De l’été dernier en plein air
Des places de ciné
Pour deux usagées
De la monnaie
Des clés
Des lettres parfumées
Par un ruban attachées
Que des larmes ont tachées
Des poèmes enflammés
Inachevés
Un carnet riquiqui
Plein de gribouillis
Des articles de journaux
Et de vraies photos
Pêle-mêle oubliées
La boule au ventre
Je les rassemble
M’assieds les regarde
Émue je m’évade
Loin des images
Des ravages
De cette tragédie
Assaillie par les souvenirs
Des fou-rires
Au soleil ensemble
Je rêve m’y perds
Le temps passe un ange
De joyeux gazouillis
Me font lever la tête
Sourire aux lèvres
J’ouvre la fenêtre
Des moineaux voltigent
Sur la haie de lierre
D’une feuille à l’autre
Je soupire respire
Résiste les yeux embués
Avalant les odeurs
De l’amandier en fleur
Et des feuillages verts
Agités par le vent
Une si belle matinée
C’en est presque indécent
Quel dommage
(Lapepa – 13ème jour de confinement-)

A travers mes modestes mots Je voudrais rendre hommage aux héros
Tous ces héros du coronavirus
Qui se dévouent pour toi
Au péril de leur vie
Alors oui, je dis merci à :
Tous les soignants qui font leur maximum et se démènent sans compter au chevet des malades, dans des conditions éprouvantes, essayant de sauver des vies, et puis aussi tous ceux qui nettoient, entretiennent, désinfectent pour rendre les lieux de soin accueillants, propres et sécurisés
Tous ceux qui prennent soin de nos anciens et les entourent de leur présence attentive, chaleureuse et précieuse
Tous ceux qui prennent soin des plus faibles et vulnérables d’entre nous : handicapés, enfants, malades, personnes dépendantes, personnes à la rue, réfugiés, démunis…, et répondent présents malgré les difficultés
Tous les personnels des magasins, pharmacies, grandes surfaces, qui se donnent du mal afin que nous ne manquions de rien, et qui bravent leur peur pour venir travailler chaque jour, alors que nous restons à l’abri et bien confinés dans nos intérieurs
Tous les artisans boulangers qui continuent leur travail afin de nous offrir chaque matin du bon pain tout frais et autres pâtisseries si réconfortantes
Les policiers qui font de leur mieux pour que les règles qui nous protègent soient respectées
Et puis les routiers, les transporteurs qui effectuent de longues distances en camion dans des conditions difficiles (pas de toilettes, de douches, de restaurants…) afin que les magasins restés ouverts soient approvisionnés
Les éboueurs qui font un travail formidable et qui nous débarrassent régulièrement de toutes nos poubelles
Tous ces gens admirables qui font que la vie continue malgré tout en dépit de cette situation dramatique
Et puis bien sûr, les chercheurs, les médecins qui travaillent d’arrache-pied afin de tenter de trouver des médicaments et vaccins qui permettront de soigner et sauver des vies
Oui, devant tous ceux-là
Je m’incline bien bas
Je rends un hommage
Et tire mon chapeau
A vous, tous les corona time héros.

Doux confinement 
Qui relie les gens 
Profitons de ce moment 
Pour prendre le temps 
De vivre tout son content 
 
Skypons nous les amis 
Cela n’a pas de prix 
 
Détruisons l’ennemi 
Un seul coup permis 
Ne sortons pas 
On s’en sortira 
Il ne nous trouvera pas 
Le covid au tapis ! 

                            Lettre au souffle 
 
 
       Jamais vous n’avez été aussi présent. Sous les poitrines des individus et le silence nouveau des villes. Derrière chaque masque mobile des ombres des villes et des champs. Votre nom est partout. A chaque coin de rue et sur tout le globe. Vous êtes même présent derrière les rideaux baissés des bistrots et magasins. Impossible de ne pas vous croiser.  Comme toujours en réalité. Mais première fois que vous ne passez pas inaperçu. Plus important que tout reste. La ressource essentielle de sept milliards d’êtres. 
    Soudain la peur de vous perdre s’est propagée. Des cités populaires aux quartiers populaires, tous logés à la même enseigne, sous la peau. Les autres peurs battues en brèche. Toutes les bourses en chute libre. Pendant que vous grimpiez à vitesse grand V sur la courbe vitale. Plus coté que la plus coté des actions. La valeur or brusquement le nez dans la boue. Tout le pays et la planète tournés vers vous. Devenu en quelques semaine la monnaie la plus puissante de la planète. Seule valeur refuge mondiale. La monnaie la plus indispensable. 
     Étrange que votre présence soit passée aussi longtemps inaperçue. Alors que vous êtes au centre de tout. D’un seul coup, même les plus cyniques ont eu peur de manquer de vous. Alors qu’auparavant ils ne s’intéressaient qu’à leur profit et croissance. Désormais, chacune et chacun ne jure plus que par vous. Le même intérêt du bas en haut de l’échelle. Comment est survenu ce brusque éclairage sur votre importance ? Tout serait parti d’un animal puis d’un virus. Le Covid 21 qui a traversé la planète. Une cavale meurtrière de poumon en poumon. Asphyxiant les hommes et les femmes. Mais aussi révélant la cupidité de l’argent-roi. Un monarque démasqué et mis à nu. Comme ces poitrines en suspens dans des hôpitaux asphyxiés par ce roi sans scrupules. 
    Tout a été dit sur vous ces derniers jours. Le meilleur et le pire. Pas un jour sans son lot de commentaires. Même si votre nom est peu employé. Contrairement au Covid 19 ou Coronavirus. Au fond, tout le monde ne parle que de vous. S’inquiétant de votre future absence dans son corps ou celui de proches. Une inquiétude légitime. La mort en avalanche se produisait d’habitude très loin. Derrière son écran et à des milliers de kilomètres dans le sable d’un désert. Parfois une irruption de barbares sur notre théâtre urbain sans guerre. Première fois que la mort pouvait toucher n’importe qui et emporter des foules. Fort rares les moments d’une telle mixité sociale. Sans la promiscuité des festivités des coupes du monde de football. Toutes les mains suspendues à un salut de la science. Ou une fin de la pandémie. En attente du retour des jours normaux. 
     Cette épidémie passée, serez-vous reléguée à nouveau en arrière plan ? Redevenue juste un banal aller-retour sous nos poitrines. Sans doute nécessaire. Car penser sans cesse à vous serait invivable. Oublier votre présence est indispensable. Mais peut-être se servir de ces milliers de morts et de blessés pour changer la hiérarchie de nos priorités. Collectives et individuelles. Ne pas positionner un billet de banque au-dessus d’un individu de chair et d’os. Autrement dit : retrouver le sens de l’humanité égarée. Mais pas perdue. Et toujours prête à ouvrir grand ses poumons. 
   Pour un nouveau souffle.  
                         Mouloud 

 
À Madame Annie Ernaux 
 
Votre lettre au Président  
Est si bien tournée  
Qu’on pourrait oublier 
Nos actuels tourments 
 
En entendant votre chronique  
J’entendais un passé  
Que je pensais dépassé  
Qu’elle est facile la critique  
 
Alors que tout est difficile  
Ici et partout ailleurs  
Vous parlez de rancœurs 
Alors qu’il pourrait être utile  
 
D’aider et de proposer 
D’améliorer notre futur 
Plutôt que prendre une posture 
Qui donne envie de crier, de pleurer 
 
Vous ne devez pas savoir 
Comment est l’étranger  
Pour pouvoir penser  
Que nos hôpitaux font peur à voir 
 
Que notre éducation nationale 
Est performante 
Alors qu’elle est mourante 
Sous le poids des unités syndicales 
 
Vous vous attaquez à un homme 
Et vous semblez oublier 
De parler de ceux qui tentent de profiter 
De la mort pour arrondir leurs sommes 
 
À coups de droit de retrait  
De menaces de grèves 
Alors que certains crèvent  
Alors que d’autres essaient de les sauver 
 
Il y a un temps pour tout  
Vous le savez bien 
Alors attendez les mois prochains 
Si vous souhaitez crier au loup 
 
Votre intéressante intervention 
En profitant de notre liberté 
Contribue à saper notre solidarité  
Alors faisons très attention 
 
Car l’épreuve que nous traversons  
Est propice à mettre en danger 
Une démocratie fragilisée 
Alors faisons vraiment attention  
 
Je ne suis pas un sans-dents  
Et je ne suis pas un nanti  
Je fais juste partie 
De ceux qui trouvent fatigant  
 
D’entendre et de lire 
Que tout va mal chez nous 
Que nos dirigeants sont nuls ou mous 
Alors qu’eux, au moins, essaient d’agir 
 
Il est sain de s’indigner. 
Il est digne d’évoluer.