L’ambiance conflictuelle qui agite le pays se retrouve dans les messages – nombreux – des auditeurs. Et comme à chaque fois que le sujet divise, les commentaires adressés au médiateur sont souvent exagérés et injustes.

« Je n’entends pas les commentaires qui s’indignent du mouvement CGT qui bloque le pays. Vous nous faites écouter les syndicalistes, mais pas les gens, comme moi, qui sont contre le mouvement ! », écrit Laurence. Et, comme en réponse, Jean-Marc : « Vous avez une ligne journalistique détestable, la censure, les critiques, dénigrements à sens unique, jamais contre le patronat, mais uniquement contre la CGT, le PCF et les mouvements sociaux ». Alors, sommes-nous pour ou contre la CGT ?

Evidemment, ni pour ni contre. Les journalistes informent et, dans un journal, vous entendrez une réaction syndicale et dans l’autre, une réaction patronale, puis un jeune chômeur ou un automobiliste mécontent. Les reporteurs font vivre l’actualité et relaient les différentes opinions. Tout comme les spécialistes ou les éditorialistes expliqueront la stratégie de la CGT ou l’immobilisme français… Sur nos antennes, la diversité des opinions est présente. Et non, « nous ne léchons pas les gouvernants qui nous nourrissent » (Christian), pas plus que nous n’avons de « complaisance avec la CGT » (Claude-Jean).

Comme je l’ai déjà dit, la force de Radio France est d’être indépendante de tout pouvoir, politique ou économique. La publicité représentant une part infime de notre budget, aucun annonceur ne pourra jamais avoir une quelconque influence sur la ligne éditoriale. Quant à des pressions de l’Etat, imagine-t-on que les journalistes – attachés viscéralement à leur indépendance – acceptent des ordres du gouvernement ; ils le feraient très vite savoir…

D’ailleurs, ce qui est révélateur, c’est que le médiateur est autant interpellé par – pour simplifier – des anti-CGT que par des pro. Car, comme pour tout sujet passionnel, nombre d’auditeurs écoutent ce qu’ils ont envie d’entendre et finissent par manquer de discernement. C’est souvent ce que je qualifie d’écoute militante, qui finit par se manifester par une forme d’intolérance : on ne supporte pas d’entendre un syndicaliste, on a alors l’impression que France Info ne diffuse que des syndicalistes et que cette radio a décidé d’être la porte-parole de la CGT, ou, au contraire, on ne supporte pas un reportage sur des artisans qui ne peuvent plus travailler par manque d’essence et on en conclut que France Inter est une radio patronale…

Alors, il est vrai qu’un jour de mobilisation syndicale – actualité oblige -, on entendra certainement plus de syndicalistes dans les journaux. Mais on entendra aussi des usagers qui en ont assez de subir des blocages… Un auditeur n’est pas à l’écoute 24h/24 et peut-être n’entendra-t-il que l’interview ou le reportage qui ne confortait pas son opinion. Mais encore une fois, un peu de tolérance. France Inter, France Info, France Culture, France Bleu n’appartiennent à personne, ou plutôt appartiennent à tous les citoyens, et toutes les opinions peuvent s’y exprimer. Pas seulement celles que l’on a envie d’entendre. C’est cela la démocratie.

Bruno DENAES.