Pour moi qui entends la radio publique depuis ma naissance, mes parents l’écoutant, (France Culture, France Musique), et qui vers l’âge de 15 ans suis devenue une auditrice assidue et autonome, la radio est consubstantielle à ma vie. Le Masque et la Plume, Jean-Louis Foulquier, La Tribune des critiques de disques, l’émission de Jean-Claude Carrière sur le Jazz, et aujourd’hui toutes celles qui rythment mes matins sur France Culture et mes après-midis sur France musique, sont une véritable addiction, mon lien au monde, la source de mes découvertes, mes colères, mes doutes, mes interrogations, mes désaccords…Je ne me lasse pas d’écrire pour soit me plaindre, soit me réjouir !
Mon premier geste, c’est « d’allumer la radio ». Intéressante image, la lumière à la vitesse du son.
Longtemps, très longtemps, je n’ai pas eu de télévision, aussi mon seul lien au monde était la radio.
Ce jour-là, beau de cette douce tiédeur de la fin d’un été généreux qui teintait le ciel de Gironde d’un bleu d’Ile-de-France, il était aux environs de 15h et je montai dans ma voiture pour aller chercher mes enfants à l’école. Une douce sérénité baignait ce petit quartier tranquille et cosy de Bordeaux. Le contact mis, la radio « parle » aussitôt. À cet instant, une sidération m’envahit, je passe sur Franceinfo pour être sûre que ce que j’entends est vrai, pour le rendre réel, pour pouvoir y croire. En boucle, le journaliste raconte ce qui se passe à New-York où il est aux environs de 9h. Et je ne bouge plus, j’entends, j’essaie d’écouter.
La description de ce qui se passe là-bas dépasse l’imagination, bloque toute compréhension logique, me laisse sidérée. J’écoute, je ne bouge pas. J’essaie d’y croire et lentement, cette information devient vraie. Je suis restée un long moment ainsi, écoutant, pleurant, essayant de comprendre ce qui se passait, désespérée. Je ne pouvais plus éteindre, quitter ma voiture, j’écoutais hypnotisée et accrochée aux paroles du journaliste comme à une bouée de sauvetage.
Pour moi, ce jour-là, le monde a basculé dans l'inconnu. Je l’ai appris et compris grâce à la radio.
Les enfants sont entrés dans la voiture. Je leur ai expliqué ce qui se passait et nous avons écouté silencieux, atterrés. Ils savaient écouter la radio car elle nous accompagnait dans toutes nos pérégrinations (Merveilleuse « Oreille en colimaçons », eau, terre et feu et Sacha le Chat dont j’ai acheté les CD).
Le soir, j’ai demandé à mes voisins si je pouvais regarder les informations à la télévision et quelle que pouvait être la violence de ce que nous allions voir, j’ai emmené mes enfants, encore jeunes, voir ce qui s’était passé.
Ma radio m’a offert bien d’autres moments marquants, dont je me souviens très bien, que ce soit les morts de Grace Kelly, de Diana, les attentats du Bataclan, les élections présidentielles...mais ce 11 septembre 2001 et l’attentat sur les Tours du WTC resteront à jamais dans ma mémoire, je peux encore les vivre comme si c’était hier.
Merci de nous offrir ce petit espace et merci aussi de votre travail, de votre faculté d’adaptation en ces temps de pandémie, de toutes ces portes ouvertes sur le monde, les cultures. Merci de bousculer mes idées préconçues et de me permettre de m’accrocher à celles que je crois vraies. Merci à tous les hommes et femmes de bonne volonté qui œuvrent à la connaissance et à la joie de tous.