Pendant la semaine qui a suivi l’élection de Donald Trump à la Présidence des États Unis, toutes les rédactions bruissaient du même mot, « populisme ». Or, par un léger glissement sémantique, la condamnation sans équivoque du « populisme » empêche opportunément, toute critique des élites. En effet, par delà les promesses contradictoires faites par un personnage extravagant, plus soucieux de gagner le pouvoir, et tant qu’à faire, de le conserver par tous les moyens, au mépris si nécessaire, de règles et institutions démocratiques, ce « nouveau populisme » serait désormais principalement caractérisé par le « rejet des élites ».
A bien comprendre ce nouveau terme de novlangue, l’idée même de capturer les aspirations du peuple sans la médiation des élites serait elle même intrinsèquement populiste. Les élites et les média seraient ainsi devenus les seules institutions autorisées à saisir les aspirations populaires et (encore mieux) à les inspirer. Il est vrai que depuis le 20h en « prime time » jusqu’aux « décodeurs » du journal le Monde, le petit peuple est sommé de penser suivant la ligne qui lui est dictée. Si jamais son vote ou celui de ses représentants déroge à la Ligne établie, l’hypothèse sera alors émise, soit de ne pas en tenir compte, avec la remise en question vote en faveur du Brexit dans les jours qui l’ont suivi par exemple, soit de négocier des concessions avant une nouvelle consultation, à l’instar du vote par le parlement Wallon contre le traité de libre échange avec le Canada, ou du vote des Irlandais en faveur du traité d’Amsterdam, après avoir pourtant refusé la « constitution » européenne. Si dénoncer cette confiscation du pouvoir démocratique par les élites doit être frappé du sceau de l’infamie populiste, alors les vrais populistes n’auront une nouvelle fois qu’à se baisser pour récolter les fruits de ce nouveau renoncement.
A moins que Radio France montre qu'elle refuse de tomber dans ce piège. Qu'elle fasse le pari de renoncer à un entre-soi de la pensée politique sans tomber dans le piège du populisme. Que les radios du groupe osent aller au devant des auditeurs pour qu’ils formulent les termes des débats qui selon eux feraient du sens lors de la prochaine campagne électorale. Et que avec l’aide d’universitaires et d’acteurs de terrain, il soit possible de dialoguer sur la faisabilité des mesures imaginées. Merci d’avance de réfléchir à cette idée.

La Médiatrice Radio France vous répond
16/11/2016 - 14:51

Le Médiateur reçoit très souvent des messages sur le mot « populisme ». L’élection de Trump a relancé le débat. Bernard Cerquiglini, éminent linguiste, spécialiste reconnu de la langue française explique le sens du mot.

Le populisme – Le sens des mots