Je lis dans votre (par ailleurs remarquable) "Lettre de la médiatrice" la plainte suivante émanant d'une personne qui se revendique comme enseignante : "Ce matin à 9h04, nous apprenions que cette malheureuse Corse subissait un incendie qui se répandait sur 120 (CENT VINGTS) hectares. La journaliste qui nous communiquait cette info n’a pas fait la liaison. Chère Madame, lorsque vingt est précédé d’un multiplicateur et non suivi d’un autre numéral, s’il vous plaît, donnez-lui un « S », pour le consoler de sa solitude ! C’est ce que j’enseigne à mes élèves..." Hélas ! Trois fois hélas pour les élèves et pour les lecteurs de la Lettre, dont certains n'ont peut-être pas eux-mêmes une connaissance assurée de l'orthographe d'usage ! En effet, on met bien sûr un "s" à cent quand il est précédé des multiplicateurs "deux" (deux cents), trois ou quatre, voire six (chez Molière, dans l'Avare), ou même quinze, à l'hôpital des Quinze-Vingts (= trois cents)... mais certainement pas quand "vingt" est précédé de "cent", qui n'est absolument pas multiplicateur dans "cent vingt" (= 100 + 20 et non pas 100 x 20 !), "cent vingt" qu'on écrit donc sans "s" à vingt (et avec ou sans tiret). Et donc on n'a pas à prononcer non plus ce "s" qui n'a pas lieu d'être !

Cette petite tirade - que vous ne publierez sans doute pas - complète les précédentes que j'ai eu plaisir à vous adresser, précisément pour le plaisir, et dans lesquelles je fustige, évidemment avec gentillesse, les pourfendeurs de fautes qui n'en sont pas, comme aussi par exemple cette dame qui ne veut pas qu'on emploie l'expression "il y a des chances que..." à propos d'un évènement potentiel qui n'en constituerait pas une (de chance) : en effet, le mot "chance" signifie, dans cette expression, "probabilité, hasard heureux ou malheureux". Il est donc neutre quant à la nature heureuse de l'événement qui se produira peut-être. Bonne poursuite de votre action et merci infiniment à votre équipe et vous-même pour la qualité de la rédaction de votre lettre et le soin apporté à répondre aux nombreuses réactions de vos chers auditeurs.