Je suis exaspéré : que les journalistes cessent d'utiliser et de dénaturer l'usage de la langue par le recours à la novlangue et aux automatismes verbaux au prétexte d'être "audible", être de son temps, ou plus vulgairement de faire "peuple". Encore ce matin, au sujet du recours à l'IA dans l'habillement, pour énoncer une pratique qui se généraliserait, la journaliste utilise le substantif "démocratisé". Outre que c'est stupide d'appliquer un qualificatif de cette classe pour désigner une initiative individuelle comme si chacun pouvait se "démocratiser" (je me démocratise, tu te démocratises, ....), il n'y a aucune raison de dénaturer le sens d'un terme alors que la langue française dispose d'un registre sémantique large : généraliser, massifier, diffuser, déployer, populariser, industrialiser, etc. Certes, quand il ne s'agit pas d'institution, la deuxième acceptation de ce terme désigne bien un usage courant accessible à toutes les classes de la société ce qui n'est ici pas le cas d'une pratique hypothétiquement émergeante qui n'a rien de démocratique puisqu'il s'agit de satisfaire le “merchandisage” d'un commerce qui n'est pas à la portée de toutes les bourses, des engouements, des mœurs, ou plus simplement de la morale qui guide nos conduites. Utiliser la forme active de "se démocratise" escamote la réflexion pourtant nécessaire que nous portons à nos comportements sur le mode "puisque tout le monde le fait pourquoi pas moi". La mercatique a donc bien compris le bénéfice à dévoyer le sens commun des termes. Il en est de démocratiser comme du reste : une maladie du siècle. De grâce, que les journalistes fassent preuve de plus de pertinence dans l'usage des mots. Nous avons tous à y gagner, eux comme les auditeurs de France Culture.