Matthieu Mondoloni, directeur adjoint de la rédaction de franceinfo répond aux auditeurs au micro de la médiatrice des antennes, Emmanuelle Daviet.
Nous avons reçu un abondant courrier au sujet de l’arrivée de Lionel Messi au PSG, des auditeurs ne comprennent pas que l’on ait autant parlé du joueur sur l’antenne. Voici un premier message :
« Je suis choqué par la façon dont Franceinfo alimente l’hystérie collective autour du transfert de Messi. Vous montez cela en épingle au point d’en parler dans chaque Fil Info et d’en faire le « sujet principal » de vos journaux. C’est incompréhensible. «
Matthieu Mondoloni peut on expliquer ce choix éditorial aux auditeurs qui nous ont écrit ?
Matthieu Mondoloni : C’est un événement en fait l’arrivée de Lionel Messi. Je peux entendre tout à fait l’argument de cet auditeur, et notamment les personnes qui ne sont pas fans de foot. Mais même pour ceux qui le suivent, cette compétition est ce sport de façon plus lointaine, l’arrivée d’un joueur aussi emblématique que Lionel Messi en France dans le championnat français est totalement inédit. En fait, on n’a jamais connu ça dans l’histoire du foot français. Il y a eu l’arrivée de Neymar au PSG il y a quelques années maintenant. Si Maradona était venu jouer en France il y a de très nombreuses années, on se souvient que ça avait été envisagé par Bernard Tapie à l’Olympique de Marseille, on aurait eu la même couverture. C’est vraiment le côté inédit qui fait que nous avons donné cette ampleur à cette information.
On poursuit avec cette réflexion de plusieurs auditeurs :
« Je trouve déplorable tout le temps que vous avez attribué au transfert de Messi quand on le compare au temps attribué au rapport du GIEC.
A croire que le devenir de cet homme est plus important que celui de la planète ».
Matthieu Mondoloni cette remarque vous paraît-elle recevable ?
Matthieu Mondoloni : Alors là aussi, j’entends les remarques de l’auditeur. C’est parce que pour Lionel Messi, c’était un feuilleton. Donc le sentiment qui peut être celui de nos auditeurs, est que ça a duré très longtemps. Il y a eu les négociations, l’arrivée possible, l’arrivée probable, arrivée réelle, la visite médicale, le premier match, donc, c’est quelque chose qu’on suit très longtemps. Le rapport du GIEC, c’était effectivement un jour où il est sorti, où on a fait énormément d’invités à l’antenne sur ce sujet, parce que c’est un sujet majeur et important pour Franceinfo. C’est une évidence et surtout, et je comprends que les auditeurs l’ait peut être moins perçu. Mais en fait, pendant tout l’été, nous avons fait énormément de sujets qui n’étaient pas liés directement au rapport du GIEC, mais qui étaient liés à cette question du dérèglement climatique. Je parle évidemment des incendies monstrueux qu’il a pu avoir en Grèce, que nous avons couvert grâce à nos envoyés spéciaux. Je parle également de ceux qui ont eu lieu dans le sud de la France. Je parle du dérèglement climatique de façon générale, des pluies diluviennes que nous suivons encore en ce moment aux Etats-Unis. Ces sujets sont très importants. Nous les couvrons et nous avons de nombreux invités, de nombreux reportages.
Le week end dernier, il y avait une grosse actualité internationale et sportive et un auditeur nous écrit » Laissez-moi vous faire part de mon étonnement compte tenu de ce qui se passe en Afghanistan en ce moment vous passez la moitié de votre journal à parler du match Reims PSG.
Matthieu Mondoloni, Comment s’opère la hiérarchie de l’information ? »
Matthieu Mondoloni : Alors là encore, c’est toujours en fonction de l’instant T. Plus on s’est rapproché du match et plus l’actualité qui allait être celle de l’instant T était celle du premier match de Leo Messi. L’Afghanistan, on en a fait énormément, évidemment, depuis la prise de Kaboul par les talibans, même avant ça, quand ils se sont rapprochés de la capitale. Là encore, on a fait de très nombreux invités, y compris ce week end là. D’ailleurs, je regardais la grille Franceinfo, c’est à dire le menu, si vous voulez pour nos auditeurs de ce jour là. En fait, on a fait énormément de sujets sur l’Afghanistan, énormément d’invités, énormément de décryptages. Et effectivement, au moment du match, on a parlé du match et de ce premier match de Lionel Messi.
Un autre auditeur s’interroge : « Comment ose-ton accorder autant d’importance à Messi personne évidemment respectable mais totalement dépourvue d’utilité sociale ?
Partagez-vous ce point de vue ?
Matthieu Mondoloni : Non, je ne partage pas. Parce que déjà, le football en France, c’est plus de deux millions de licenciés et seulement de licenciés, donc de personnes qui jouent activement au foot. Donc, ça concerne beaucoup de monde. C’est des millions de téléspectateurs. Je ne parlerai pas que des chiffres pour une finale de la France en Coupe du monde, par exemple, qui rassemble plus de 20 millions de téléspectateurs, je crois. Donc, c’est un sport. En fait, c’est le premier sport aujourd’hui en France qui est suivi par tous les Français. Ça les intéresse. Et après Lionel Messi, c’est aussi certes une star du football, mais un exemple pour plein d’enfants qui jouent au foot aujourd’hui, qui s’identifient à cette star du foot, qui ont envie de jouer au foot à cause de lui. Donc, il a valeur d’exemple et en ce sens, je pense, une certaine utilité sociale.
On termine par cette question de l’un de vos auditeurs: « Est-ce le rôle de notre radio publique de soutenir le football business? »
Que lui répondez-vous ?
Matthieu Mondoloni : Que nous ne soutenons pas le football business. En fait, on fait notre travail d’information ou tout simplement notre travail de journaliste. On n’a pas d’action dans un club. On n’a pas de partenariat direct avec un club précis. Non, on suit cette actualité. Les sommes engagées sont évidemment des sommes très folles, très, très importantes. Quand on parle du salaire de Lionel Messi, on parle de 41 millions d’euros par an. Donc, évidemment. Mais le foot, c’est aussi une entreprise mondiale aujourd’hui, qui nourrit un certain nombre d’emplois, de très nombreux emplois, et pas seulement les stars du foot qui jouent sur la pelouse. Il y a plein de gens, des préparateurs physiques, des entraîneurs et quand je parle d’entraîneurs, je parle pas que des clubs pros. Je parle aussi d’éducateurs dans les cités, dans les quartiers et dans les terrains de foot. Donc, c’est quelque chose qui reste important, même si on peut s’étonner ou en tout cas s’interroger sur les sommes astronomiques effectivement qui y sont dépensées.