Aujourd’hui, nous allons parler des journalistes et de la science, de la formation scientifique, des journalistes. Et pour nous répondre, nous sommes avec Olivier Emond, le chef du service sciences, santé, environnement et technologies de Franceinfo

Emmanuelle Daviet : En cette rentrée des auditeurs demandent que les journalistes soient formés sur les questions climatiques et scientifiques, ils nous disent entendre des approximations à l’antenne ou que des invités peuvent dérouler leur argumentaire sans crainte d’être contredits par des journalistes qui ne sont pas suffisamment formés sur ces questions.

Ce constat, sur un manque de connaissance, vous paraît-il juste ou exagéré ?

Olivier Emond : il est partagé, en tout cas, puisqu’on va parler dans un instant, Radio France lance un grand plan de formation de ses journalistes sur ces questions scientifiques. Ça peut arriver, évidemment, mais j’allais dire au delà même des interviews de scientifiques ou sur des questions scientifiques, dans n’importe quelle interview, ça peut arriver qu’un chiffre on ne l’ait pas en tête pour le vérifier. On peut laisser passer quelque chose. C’est notamment pour ça qu’il existe des cellules de vérification. Par exemple, il y en a une au sein de Franceinfo qui, après une interview ou après une déclaration d’un homme politique, d’un expert, peut aller vérifier avec les bonnes données quelle est la vérité des faits, la véracité de ce qui a été dit.

Emmanuelle Daviet : Les remarques des auditeurs coïncident, en cette rentrée, avec le lancement d’un grand plan de formation, sur les questions climatiques et scientifiques tous les journalistes, quelle que soit leur spécialité, vont être formés ? Comment ça va se passer ?

Olivier Emond : Alors l’objectif, c’est que tous les journalistes puissent être formés au sein de Radio France. Il y a beaucoup de journalistes, plusieurs centaines, donc ça ne peut pas se faire comme ça d’un coup de baguette magique. L’idée, avec la Direction de l’information et des sports avec Vincent Giret, après en avoir discuté toute l’année dernière, c’est de se dire il faut qu’on priorise les choses et qu’on commence par les gens qui sont directement à l’antenne ou ceux qui ont la responsabilité de l’antenne, les rédacteurs en chef, les présentateurs, etc. Donc ça va commencer dès la fin novembre. Je n’ai pas la date exacte, mais c’est à partir de fin novembre avec notre centre de formation interne, on va dire, et on va commencer sur ces questions climatiques et environnementales, parce qu’on voit bien qu’on cette rentrée, c’est ça l’enjeu. Il y a un an, un an et demi, quand on a commencé à réfléchir, on se disait, est-ce qu’il ne faut pas commencer par les questions médicales puisqu’on était encore en pleine crise du Covid ? Et puis là, on se dit bon, commençons par les questions scientifiques et liées au climat, sachant que finalement il y a un lien entre tout ça, c’est comment est-ce qu’aujourd’hui se fait la science ? Qu’est ce qu’une étude scientifique ? La différence entre un communiqué de presse d’une entreprise, quelle qu’elle soit, d’un groupe pharmaceutique ou une étude revue par les pairs, etc etc donc il y a une base commune à partager. Et l’idée c’est vraiment ça, c’est que tous les journalistes puissent avoir une base pour finalement aller plus vite sur les questions qu’ils peuvent aborder quand il y a un sujet sur le climat ou sur sur l’environnement.

Emmanuelle Daviet : Toutes ces réflexions sur la formation scientifique des journalistes ont été très nourries lors de la période Covid, et cela a fait l’objet d’intenses échanges avec les scientifiques. A présent la crise climatique domine largement l’actualité. Pour traiter ces différentes questions, climat, biodiversité, environnement, énergie, avez-vous mis en place un véritable compagnonnage avec les scientifiques, les laboratoires ? Des auditeurs souhaitent savoir comment se traduit très concrètement votre relation avec le monde de la science.

Olivier Emond : On a commencé cette rentrée sur l’idée de mieux former les journalistes par une master class qui a été faite ici à Radio France, à la Maison de la radio cette semaine, avec justement des scientifiques qu’on a sollicités, que Vincent Giret, le directeur de l’information et des sports, a sollicité pour venir justement présenter les grandes bases de ces questions climat, comment fonctionne le cycle du CO2 ? Comment fonctionne le cycle de l’eau ? Que dit véritablement le rapport du GIEC ? Etc etc ? Parce qu’on voit bien que globalement les journalistes n’ont pas de formation scientifique, en tout cas dans les sciences dures. Pour la plupart d’entre nous, on a fait de l’histoire, des sciences humaines, Sciences Po ou des choses comme ça, pour beaucoup des écoles de journalisme. Mais il y a très peu de journalistes qui ont fait des maths, de la physique en formation initiale. Donc on voit bien qu’il y a deux mondes qui étaient assez éloignés, qui se rapprochent au fur et à mesure. La crise Covid a poussé à ça forcément. On a rencontré beaucoup, beaucoup de médecins, d’immunologie, de virologues avec les grands instituts aussi, avec le CNRS, avec l’Inserm. On a beaucoup plus travaillé avec eux parce qu’on avait besoin aussi de leur expertise. Le rythme de la science n’est pas forcément celui de l’information, et notamment sur une chaîne d’info continue. Donc on est beaucoup dans l’échange.