Florian Delorme, délégué aux programmes de France Culture est au micro d’Emmanuelle Daviet pour répondre aux questions des auditeurs.

Emmanuelle Daviet : France Culture a réalisé une saison historique avec près de deux millions d’auditeurs l’an passé. Comment avez-vous conçu la grille de cette nouvelle saison pour à la fois fidéliser un nouveau public, innover, tout en restant fidèle à l’identité de France Culture qui est la chaîne des savoirs ?

Florian Delorme : Alors, vous avez raison de le rappeler Emmanuelle, France Culture a réalisé une saison historique avec des records d’audience sur quasiment tous les programmes, ce qui est évidemment une excellente nouvelle, en particulier dans un moment où, on le sait, malheureusement, les gens écoutent de moins en moins la radio. En tout cas, cette très bonne forme qui nous a permis avec Emelie de Jong, de travailler sereinement sur cette nouvelle saison qui s’ouvre. On avait plusieurs objectifs pour cette rentrée. D’abord mettre en place les rendez-vous qui nous semblaient manquer sur l’antenne et en particulier dans le domaine des sujets de société qui sont évidemment très importants. On avait identifié par exemple qu’il nous fallait un rendez-vous sur les enjeux de santé, ce qu’on a fait avec Marina Carrère d’Encausse qui maintenant prend les commandes de « Carnets de santé » c’est à 12 h, le samedi. On souhaitait aussi introduire un rendez-vous autour des territoires dont nous pensions qu’ils méritaient qu’on s’y attarde un peu plus, de façon peut-être plus affirmée. Et c’est ce qu’on fait maintenant avec Nora Hamadi dans Douce France. C’est le vendredi à 20h. Je fais un peu de réclame, mais c’est important de bien situer les choses. Et puis un autre rendez-vous qu’on voulait renforcer, c’est celui du soir, là où on se trouve en ce moment avec Quentin Lafay qui a la gentillesse de nous accueillir. On a souhaité mettre en place une longue tranche entre 18h et 20h qui permettait à la fois de faire le plein d’informations chaudes, brûlantes avec le journal de 18h, avec un nouveau rendez vous sur l’info essentielle du jour qu’on a mis à 19h. Mais c’était aussi évidemment se saisir du débat saillant du moment à travers la première partie de l’émission, le débat des Questions du soir. Et puis dans un second temps, prendre un peu plus de distance et nous intéresser au monde des idées, celles qui agitent notre temps, qui naissent, qui vivent, qui meurent, qui parfois renaissent. Et d’ailleurs, ce travail sur la transformation, sur la généalogie des idées, c’est quelque chose qu’on retrouve chaque jour chez Quentin. Et puis on a voulu à la fin en queue de comète si je puis dire, placer « A voix nue » , un programme que vous connaissez parce qu’historique, iconique, par lequel on élargit encore un peu la focale avec un invité ou une invitée dont le parcours aussi nous éclaire sur notre société, sur son évolution, sur la manière aussi de s’y inscrire. Vous voyez, on a voulu construire cette logique de prise de hauteur progressive les infos, le débat, les idées et un parcours de vie.

Emmanuelle Daviet : Un mot également Florian Delorme sur Patrick Boucheron à l’antenne cette saison ?

Florian Delorme : Oui, c’est un retour. Emmanuelle, vous avez raison. On avait envie de remettre un peu plus d’histoire de l’art encore sur l’antenne. Et c’est ce qu’on fait avec Patrick Boucheron, qui nous a proposé un magazine très intéressant par lequel on rentre à travers des images artistiques et on essaye de comprendre comment celles-ci occupent nos imaginaires. C’est Allons y voir, c’est tous les dimanches à 14h. Et puis sur les nouveautés, peut être un dernier mot, même s’il y a encore beaucoup de choses. Mais on a travaillé aussi beaucoup sur la poésie et sur la forme qu’elle prenait. Vous savez que la poésie connaît un succès grandissant et on a proposé ce nouveau rendez-vous qui s’appelle L’instant poésie, qui est à 21h30 tous les soirs, dans lequel on propose à nos auditeurs une véritable expérience d’écoute qui est une expérience émotionnelle, sensorielle autour de la lecture et de la relecture de textes de poésie qui ont été choisis par un passeur ou une passeuse de poésie. C’était Clara Ysé, qui a ouvert la série d’une magnifique manière vous allez voir. On aura encore beaucoup de surprises.

Emmanuelle Daviet : En cette rentrée, dans leurs messages les auditeurs sont nombreux à nous écrire et dans leurs messages, ils expriment un mélange d’interrogations sur certaines émotions disparues ou déplacées et d’enthousiasme pour la programmation actuelle que vous avez évoqué. On commence avec l’archéologie. De nombreux auditeurs s’interrogent sur la disparition de l’émission Carbone 14.

Florian Delorme : Alors, l’émission n’a pas vraiment disparu. On fait beaucoup de magie du côté de la radio parce que, en fait, on parle toujours d’archéologie. Chaque semaine, dans l’émission Science Chrono qui est présentée par Antoine Beauchamp, Antoine a élargi un peu son champ d’action puisque, après l’histoire des sciences qui était le cœur de ce magazine, il remonte encore plus profondément dans l’épaisseur du temps et traite aussi d’archéologie. D’ailleurs, vous avez remarqué que Vincent Charpentier non plus n’a pas complètement disparu puisqu’il l’accompagne très régulièrement dans cette partie. D’ailleurs, je me permets, Emmanuelle, si vous aussi vous me laissez un instant de préciser quand même au passage que c’est Vincent Charpentier qui souhaitait prendre un tout petit peu de distance avec la radio qu’il a connu il y a plus de 35 ans, qui le fait avec beaucoup de passion et d’amour. Et on a essayé d’imaginer ce passage de relais parce que c’est aussi ça, c’est la transmission France Culture, ce passage de relais qu’on a coconstruit avec Émelie De Jong bien sûr, et Vincent Charpentier, Antoine Beauchamp.

Emmanuelle Daviet : Plus globalement, la grille des programmes est bien accueillie par les auditeurs qui nous écrivent. Ils apprécient, je les cite , « l’intelligence », « la profondeur » et « la diversité des nouvelles émissions », notamment pour leur capacité à offrir une réflexion posée face à l’accélération médiatique contemporaine.
Ils évoquent « Les Matins » de Guillaume Erner et sa nouvelle séquence « Les échos d’ailleurs », « Questions d’un soir » de Quentin Lafay revient également dans le courrier des auditeurs et incontestablement en cette rentrée deux nouvelles voix font l’unanimité : celles de Marina Carrère d’Encausse pour Carnets de santé et Marie Labory qui anime Les midis de Culture.

Florian Delorme : Emmanuelle, vous avez dit la chose qui me fait plaisir la réflexion posée face à l’accélération médiatique. Au fond, c’est ça l’ADN de France Culture. C’est prendre le temps. Prendre le temps qu’il faut. C’est rassembler aussi les conditions d’un échange franc mais cordial. C’est exactement ce que fait Quentin Lafay dans l’émission Questions du soir, qui scrute à la fois les débats de société, le monde des idées, avec beaucoup d’intelligence, de sérénité, de rondeur. Et puis, quant à ces nouvelles voix que vous mentionniez, c’est à dire Marina Carrère d’Encausse dans Les Carnets de santé et Marie Labory dans les Midis de culture, c’est vrai qu’elles ont trouvé leurs marques extrêmement vite. C’est étonnant et on s’en réjouit. Et je suis très confiant concernant le fait qu’elles vont séduire les auditeurs à la fois les historiques de la chaîne et aussi bien au delà.