Dans un contexte d’actualité très dense où les faits s’enchainent avec une grande rapidité, où une info chasse l’autre, comment travaille la rédaction de Franceinfo. Pour répondre aux auditeurs, Emmanuelle Daviet reçoit Florent Guyotat, directeur adjoint de la rédaction de franceinfo.
Emmanuelle Daviet : On commence avec cette question d’une auditrice : « comment choisissez-vous les informations que vous diffusez en temps réel sur l’antenne et comment pouvez-vous confirmer leur fiabilité ? »
Florent Guyotat : D’abord, nous sommes une radio d’information en continu. Cela veut dire que nous avons un cahier des charges qui est le suivant : dès qu’il se passe quelque chose d’important, il faut que nous soyons à même d’en rendre compte à nos auditeurs puisqu’ils viennent nous écouter pour cela. Donc après, évidemment, c’est comment déterminer ce qui est important. Je vais vous donner un exemple récent : lorsque la première ministre Elisabeth Borne décide d’avoir recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer sa réforme des retraites, c’est évidemment une information importante qui va toucher beaucoup de gens. Donc ça ne peut pas attendre et nous prenons la décision de retransmettre immédiatement en direct sa prise de parole où elle annonce cela à l’Assemblée nationale. Et évidemment, tout de suite après, nous diffusons les réactions en direct, là aussi, de ses principaux opposants. Ensuite, il y a des informations qui nous paraîssent importantes mais qui méritent aussi d’être vérifiées. C’est le cas lors d’un attentat, lors d’un meurtre. Nous avons de nombreuses informations qui nous parviennent et nous devons faire la part des choses. Donc nous ne pouvons pas donner immédiatement et telles quelles ces informations à l’antenne. Nous devons les vérifier, quitte à attendre un petit peu avant de donner ces informations pour savoir ce qui est vrai ou pas. Nous ne prenons pas de risque en la matière.
Emmanuelle Daviet : Un autre auditeur demande si la rédaction de Franceinfo s’inspire de ce qui circule sur les réseaux sociaux pour faire des reportages ?
Florent Guyotat : Alors évidemment, les réseaux sociaux sont une mine d’informations. C’est quelque chose de tout à fait récent dans l’histoire. Il y a 20 ans, les réseaux sociaux n’existaient pas ou très peu, et ça a donné aux journalistes une source d’information supplémentaire. Avant, il y avait les dépêches d’agence, il y avait les informations que l’on avait par nos propres contacts, notre carnet d’adresses, les communiqués officiels. Mais les réseaux sociaux, c’est quelque chose de très nouveau parce que ça donne accès à une parole publique, à des gens qui n’avaient pas accès à cette parole jusqu’à présent. Donc nous, notre rôle, évidemment, c’est de scruter ces réseaux sociaux, voir ce qu’il s’y passe. Mais là encore, il faut vérifier toutes ces informations. Nous avons ici une agence interne à Franceinfo qui est chargée de scruter notamment ces réseaux, qui a une fonction de veille, qui regarde tout ce qui s’y dit, tout ce qui s’y passe. Mais une fois qu’on a une information qu’on juge importante, on va missionner, nous, journalistes, dans les services, pour vérifier les informations que l’on voit sur les réseaux sociaux, on ne va pas les retransmettre telles quelles à l’antenne et on va attendre d’avoir, avec nos contacts, plusieurs sources concordantes qui vont confirmer ou pas l’information que l’on aura repérée sur les réseaux sociaux.
Emmanuelle Daviet : « Avec les manifestations récentes, émaillées de violences, comment les journalistes sur le terrain parviennent-ils à fournir des informations rapidement tout en garantissant leur exactitude ? » s’interroge un auditeur.
Florent Guyotat : Déjà, nous avons des reporters sur le terrain qui sont là, dans les manifestations. Donc ces reporters, leur mission principale, c’est de raconter ce qu’ils voient, ce dont ils sont témoins. Donc ils s’en font l’écho à l’antenne, très souvent en direct. Après, évidemment, nous ne pouvons pas être partout. Il y a des événements qui nous sont rapportés. Et là encore, avant de donner une information, nous allons faire appel à nos contacts pour vérifier toutes ces données qui nous arrivent, et sur la base de sources concordantes, donner ou pas, confirmer ou pas une information. Ça peut prendre un peu de temps, c’est vrai que nous essayons d’aller le plus vite possible. Nous avons un impératif de rapidité puisque là encore, nous sommes une radio d’information continue. Mais il y a quelque chose sur quoi on ne transige pas, c’est cette nécessité de vérifier. Parfois, la vérification prend un peu de temps. Ça peut prendre quelques minutes, ça peut prendre quelques heures aussi et on ne sacrifiera jamais cela. On préférera toujours attendre un peu pour donner une information fiable plutôt que de donner une information dont on ne serait pas sûr et où on irait trop vite.