Le rendez-vous de la médiatrice sur France Culture est consacré aux questions d’actualité : la parole donnée à Éric Zemmour à propos d’Ocean Viking, la guerre en Ukraine et la Coupe de monde au Qatar. Anne-Laure Jumet, rédactrice en chef de France Culture, est au micro d’Emmanuelle Daviet.

Emmanuelle Daviet : Des auditeurs ont écrit après avoir entendu le propos d’Eric Zemmour dans l’un de vos journaux. Voici le message d’un auditeur :  « Je ne comprends pas pourquoi vous avez diffusé la réaction d’Eric Zemmour suite à la décision de la France de laisser entrer le bateau de migrants ces derniers jours. Son parti « Reconquête »n’a aucun élu. Il ne représente personne. Quelle est la valeur de sa parole ? »

Anne-Laure Jumet, pourquoi ce choix éditorial ?

Anne-Laure Jumet : Cet auditeur nous parle en fait d’un sujet plus large sur la réaction de la droite et de l’extrême droite à l’arrivée des 230 migrants de l’Ocean Viking sur le sol français. On y entend effectivement Eric Zemmour s’exprimer. Il avait fait le déplacement à Toulon, vous vous en souvenez peut être pour dénoncer cet accueil en France. Je précise aussi que juste avant, on avait entendu la réaction de l’ONG SOS Méditerranée qui critiquait l’attitude des Européens qui avaient laissé le bateau errer en mer pendant trois semaines. Voilà pour le contexte. En ce qui concerne Eric Zemmour, je pense qu’on ne peut pas dire qu’il ne représente personne dans la mesure où il a réuni sur son nom 7 % des suffrages, 2 485 000 voix. Il est arrivé quatrième à la présidentielle. Il n’a certes pas transformé l’essai aux législatives, aucun député sous la bannière de son parti Reconquête. Mais Eric Zemmour fait désormais partie du paysage politique. Il a d’ailleurs des ambitions pour les européennes, pour les municipales. Et c’est ainsi que vous pouvez l’entendre sur notre antenne, même si c’est en proportion une expression bien moindre que celle de partis représentés au Parlement. Des réactions politiques vous en entendez d’ailleurs sur notre antenne, ça s’accompagne aussi très souvent d’analyses. Et à ce sujet, je vous renvoie d’ailleurs au reportage de la rédaction d’Antoine Marette du 11 octobre dernier, qui explique bien comment Reconquête tente aujourd’hui d’exister face à une concurrence forte, celle des 89 députés du Rassemblement national.

Emmanuelle Daviet : On poursuit avec la guerre en Ukraine. Des auditeurs souhaitent savoir comment la rédaction de France Culture couvre ce conflit et quels sont les moyens que vous déployez ?

Anne-Laure Jumet : On continue à être très présent sur cette actualité avec un double regard. C’est important de le souligner, côté ukrainien et côté russe. En Ukraine, nous avons installé depuis le 1ᵉʳ novembre un bureau à Kiev. Des journalistes de Radio France s’y succèdent tous les deux mois et en ce moment, c’est Agathe Mahuet qui occupe le poste. Elle est en reportage à Kherson en ce moment. Vous entendrez d’ailleurs son sujet dans la matinale de demain. En Russie, c’est notre correspondant à Moscou, Sylvain Tronchet, qui nous éclaire aussi très régulièrement sur nos ondes sur cette guerre. Depuis le déclenchement du conflit le 24 février dernier, nous avons eu entre une et trois équipes sur le terrain, avec des binômes constitués d’un journaliste et d’un technicien à chaque fois. Ce qui fait que beaucoup de journalistes de la rédaction internationale sont allés en Ukraine et ont désormais une expertise sur ce conflit qui permet d’évaluer rapidement de Paris l’importance d’une information. Et nous sommes aussi épaulés ici, à la Maison de la radio, par deux collaborateurs qui ont l’un fuit la Russie et l’autre l’Ukraine. Un journaliste russe, Denis Kataev, et une traductrice ukrainienne, Anna Ognyanyk, dont l’aide est très précieuse pour notre travail au quotidien sur cette guerre. Et puis, en dehors des journaux, des invités, des émissions très nombreuses sur le sujet, nous avons lancé un podcast intitulé tout simplement « Guerre en Ukraine« , un podcast Radio France dont c’était lundi le 100ᵉ numéro coordonné présenté par Isabelle Labeyrie et lancé initialement par Grégory Philipps. Deux épisodes sont mis en ligne chaque semaine, les lundis et les jeudis soirs.

Emmanuelle Daviet : Et je précise d’ailleurs que ce podcast est plébiscité par les auditeurs qui nous écrivent à son sujet.
On termine avec la Coupe du monde de football au Qatar. Cet évènement sportif suscite de très nombreuses critiques et des auditeurs auraient tout simplement souhaité que vous boycottiez cet événement. Quelle couverture éditoriale est prévue sur votre antenne pour relater cette Coupe du monde et que vous inspirent ces remarques d’auditeurs ?

Anne-Laure Jumet : Alors nous, on a décidé ici à Radio France, de ne pas boycotter le Mondial. C’est, comme vous le disiez, un événement sportif, une actualité tous les quatre ans que nous traitons donc comme une actualité sur nos antennes. Ça ne nous empêche pas d’ailleurs de nous poser des questions sur le sujet. Vous avez peut être entendu au début du journal de 18h ce soir, on a questionné la déclaration d’Emmanuel Macron qui estime qu’il ne faut pas politiser le sport. Comme vous le savez aussi à France Culture, nous ne relatons pas les résultats sportifs. Nous nous intéressons au sport sous un angle sociétal, sociologique, géopolitique. Et c’est ainsi que nous abordons ce Mondial qui se tient au Qatar. Vous avez peut être entendu aussi aujourd’hui dans le journal de 12 h 30, des témoignages de migrants travaillant dans les stades au Qatar qui témoignent de la dureté des conditions de travail pour un salaire extrêmement faible. Plusieurs sujets seront diffusés également ce week-end et en début de semaine dans nos journaux pour aborder les différents aspects de ce Mondial : l’influence du Qatar, les produits dérivés fabriqués en Chine ou encore la sécurité de ce Mondial sous-traitée à d’autres pays dont la Turquie. Sur notre site Internet, vous pourrez lire samedi (19 novembre) un épisode de la série Stadium, consacré aux stades du Qatar et aux critiques qui les accompagnent. Et puis du côté des programmes, Cultures Monde consacre toute cette semaine ses émissions à ce « Mondial de toutes les dérives ». Ce soir à 21h Géographie à la carte, consacré au Qatar. Et puis pour revenir à notre interrogation du début, je vous renvoie aux pieds sur terre de ce mercredi 16 novembre avec des témoignages de férus de football qui ont décidé de boycotter cette Coupe du Monde.