Le Médiateur de Radio France reçoit les remarques des auditeurs de « Secrets d’Info »: une fois par mois, les journalistes de la cellule Investigations de Radio France répondent aux interrogations et aux critiques.

 

Projet Daphne : après les révélations, quelles réactions ?

► par  Benoît Collombat

The Daphne Project : "Ils ont tué la journaliste. Pas ses enquêtes" © Radio France / Forbidden stories

The Daphne Project : « Ils ont tué la journaliste. Pas ses enquêtes » © Radio France / Forbidden stories

18 médias internationaux, dont Radio France et son équipe Investigations, ont repris l’enquête de cette journaliste maltaise assassinée, vraisemblablement, parce qu’elle s’intéressait de trop près aux pratiques douteuses, voire mafieuses, du gouvernement de Malte. Des auditeurs vous félicitent d’avoir poursuivi cette enquête. Axelle nous écrit : « Bravo pour le remarquable travail que vous faites dans cette affaire. Votre cause est noble. Vous œuvrez pour le bien public ». A l’inverse, il y a tous ces auditeurs, fâchés, par, une fois encore, l’absence de réactions concrètes de l’Union européenne. « Une journaliste assassinée, des ministres et leurs proches corrompus, pourquoi l’Union européenne ne réagit-elle pas ? », vous demande Romain.

Il y a toujours eu une difficulté pour cette institution à montrer du doigt l’un de ses membres, car cela nourrirait le sentiment anti-européen. Malte a toujours des alliés en Europe (le groupe des socio-démocrates au Parlement Européen). Dans l’état actuel des choses, le Parlement considère qu’il n’y a pas de problème d’état de droit à Malte.

Plusieurs auditeurs vous interpellent sur tous ces scandales révélés, mais pour lesquels ils ont l’impression qu’après, plus rien. Pour Marie : « Où en sommes-nous finalement des Panama Papers et autres Paradise Papers ? ».

Il y a eu quelques réactions concrètes après ces deux affaires, grâce à la mise en place du système automatique d’échanges d’informations. Exemple: si vous êtes Français et que vous ouvrez un compte aux Bermudes, les Bermudes en informera la France. Des contribuables ont d’ailleurs déjà été poursuivis. Les Etats Unis n’ont pas signé cet accord d’échanges. Malte traîne encore à le signer.

 

Carlos Ghosn, la face cachée du patron le mieux payé de France

► par Philippe Reltien

un grand nombre de réactions…

… et plutôt positives à l’égard du personnage dont vous dressiez un portrait – on va dire – très nuancé. Le titre de votre enquête était même clair: « Les zones d’ombre de Carlos Ghosn, le très redouté patron de Renault-Nissan ». Vous évoquiez notamment ses salaires assez délirants, mais beaucoup d’auditeurs ne s’en offusquent pas : « Un patron compétent qui redresse des entreprises n’est jamais trop payé », estime Norman. Et Muriel vous demande : « Pourquoi, en France, s’en prend-on tout le temps à ceux qui réussissent, qui gagnent peut-être beaucoup d’argent, mais sauvent des entreprises, innovent, ont une vision d’avenir et dirigent des dizaines de milliers de salariés ? ».

Comment cet homme de 64 ans aux méthodes implacables et à la rémunération record est-il parvenu à obtenir et conserver la confiance du groupe et de l’État durant toutes ces années ? © Getty / Chesnot

Comment cet homme de 64 ans aux méthodes implacables et à la rémunération record est-il parvenu à obtenir et conserver la confiance du groupe et de l’État durant toutes ces années ? © Getty / Chesnot

Nous ne sommes pas là pour chanter les louanges de dirigeants d’entreprises (ce n’est pas le rôle du journaliste mais des communicants). Un patron compétent qui redresse des entreprises n’est jamais trop payé, sauf quand ses rémunérations sont cachées. Quant à Carlos Ghosn, qu’en est-il des ses salaires chez Nissan et Mitsubishi ? Pour répondre à Muriel, c’est bien qu’un patron réussisse et innove, mais c’est bien également d’assumer les erreurs de ses équipes et de remettre son titre en jeu.

 

Lait, viandes : la hantise de la contamination à la salmonelle

► par  Laetitia Cherel

 

Enquête sur la salmonelle : j’ai été étonné, voire choqué, par un certain nombre de réactions d’auditeurs qui nous disent : « 10 morts  il y a deux ans, en quelques mois après avoir mangé du fromage au lait cru. Ben oui, c’est triste, mais le cancer ou la grippe en font bien plus ». Et ils ajoutent : « Vous vous attaquez à des produits traditionnels de qualité que vous devriez plutôt défendre ». « Vous attaquer à des produits traditionnels », était-ce vraiment votre but ?

 

Il ne s’agissait évidemment pas de « s’attaquer » à des produits traditionnels, en l’occurrence le fromage au lait cru. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que lorsqu’on se lance dans une enquête journalistique, « on tire des fils ». Et c’est ce qu’on a fait en enquêtant sur l’affaire Lactalis, des bébés contaminés malades à cause d’une  bactérie dans le lait en poudre et c’est donc « en tirant les fils » de cette affaire que nous sommes tombés sur une autre contamination qui n’avait jusqu’ici jamais été rendue public.

C’est Laetitia Cherel qui a révélé cette contamination :

Il s’agit de la contamination à la salmonelle la plus grave des 10 dernières années, selon les autorités sanitaires. Je sors alors de l’enquête sur l’affaire « Lactalis » : 38 bébés contaminés, la production de lait arrêtée en Mayenne, des rappels de produits… J’apprends alors qu’il y a eu une dizaine de morts deux ans plus tôt, et que cette information est passée totalement inaperçue. L’enquête commence. La Direction générale de l’alimentation précise alors qu’il n’a pas été possible de faire un rappel de fromage. Ce n’est pas une attaque, c’est juste une information qu’on traite. On a donné la parole également aux producteurs. Exemple : reportage dans une fromagerie exemplaire qui a pris des mesures dès le début de l’affaire (ils ont multiplié par 5 les contrôles sur les fromages, par 10 les contrôles sur le lait cru)