La manifestation « La marche contre la vie chère » conduite par Jean-Luc Mélenchon dimanche dernier à Paris, a réuni 140 000 participants selon les organisateurs, 30 000 selon une source policière et 29 500 selon le comptage du cabinet Occurrence qui travaille pour un collectif de médias, dont Franceinfo. Des auditeurs se disent perplexes lorsqu’ils entendent de tels écarts. On passe de 140 000 à 29 500 manifestants. Et des auditeurs s’interrogent sur le cabinet Occurrence. Ils émettent des réserves sur son indépendance. Estelle Cognacq, Directrice adjointe de Franceinfo et Directrice de l’Agence Radio France est au micro d’Emmanuelle Daviet.
Emmanuelle Daviet : Pouvez-vous nous rappeler l’origine du recours à Occurrence pour compter le nombre de personnes dans une manifestation ?
Estelle Cognacq : Alors à chaque manifestation, il y a un décalage souvent fort entre les chiffres donnés par les manifestants, les organisateurs et ceux donnés par les autorités, notamment les préfectures. On sait que des deux côtés, il y a un intérêt à grossir ou à minimiser les chiffres. Et c’est de là qu’est parti l’idée d’un groupe de médias, il y a quatre ans, de mettre en place un comptage indépendant et donc de faire appel au cabinet Occurrence qui, lui, dispose de techniques de comptage testées, approuvées notamment pour compter les manifestants lors de manifestations. Nous étions en plus dans une période avant Covid où il y avait eu un grand nombre de manifestations. Donc cette question du comptage des manifestants était récurrente.
Emmanuelle Daviet : Quels sont les autres médias ayant recours à Occurrence ?
Estelle Cognacq : Alors il y a de très nombreux médias qui sont associés dans ce comptage indépendant. Il y a des radios comme nous Franceinfo, comme les médias de Radio France, RTL, mais aussi des chaînes de télévision TF1, BFM, l’AFP ; des journaux : Le Figaro, Le Parisien, Libération et aussi des titres de presse quotidienne régionale. Alors c’est vrai qu’aujourd’hui les comptages se font quand il y a une manifestation plutôt unique à Paris plutôt que des manifestations en régions. D’où aussi le fait qu’on compte pas quand il y a un mouvement d’appel national avec une centaine de manifestations un peu partout, mais plutôt une manifestation unique.
Emmanuelle Daviet : Donc il y a à la fois des médias du service public et des médias privés. Le cabinet Occurrence offre davantage de fiabilité que les chiffres donnés par la préfecture par exemple ?
Estelle Cognacq : Alors Occurence c’est un cabinet d’études et de conseil en communication au départ, qui a mis en place un comptage qui repose sur une technologie faite de capteurs, en l’occurrence des caméras qui sont placées sur le parcours de la manifestation et d’un algorithme qui est développé par une PME française qui est, elle, spécialisée dans le comptage des flux de personnes, que ce soit dans les aéroports, dans les centres commerciaux ou dans des musées par exemple. Quand on veut connaître le nombre de personnes qui se trouvent à un instant donné à un endroit. Donc il y a une certaine expérience de ce comptage là. Donc pour faire simple, le dispositif d’Occurrence, c’est un système informatique qui filme le défilé en hauteur qui se met sur un point de passage en fait du cortège, donc qui est au dessus qui compte et à chaque personne qui traverse une ligne virtuelle sur l’écran est comptabilisée. Par exemple, on ne compte pas les gens qui remontent la manif. Il faut que ce soit dans le sens de la manifestation, pas à rebours. Et à chaque fois, au cas où un capteur tomberait en panne, on en a en secours. C’est une technologie, parce que je sais qu’il y a eu pas mal de remarques et ça peut être décrié, qui est fiable même si elle comporte bien sûr des marges d’erreur. Et là, on essaye d’apporter justement une touche un peu humaine avec un comptage à la main, on va dire, un micro comptage humain on va dire, de 30 secondes en temps réel sur des moments très denses, denses et peu denses. Ça permet un redressage un peu du résultat. C’est un peu technique. Mais voilà, comment se passe le comptage avec Occurrence.