A la suite de la chronique de Guillaume Meurice « De quoi ont peur les enfants ? » de nombreux auditeurs mécontents ont écrit à la médiatrice.
Voici la réponse de la direction de France Inter :
Chers auditeurs,
Vous avez été très nombreux à réagir aux propos de Guillaume Meurice tenus le dimanche 29 octobre dans l’émission le Grand Dimanche Soir. Ses propos sont les suivants : au début d’une chronique qui donne la parole aux enfants pour savoir ce qui fait peur à la veille d’Halloween, l’humoriste avance que le déguisement « « qui marche pas mal en ce moment » est celui de Benjamin Netanyahu. « Vous voyez qui c’est ? C’est une sorte de nazi mais sans prépuce. »
Je rejoins le malaise que vous avez été nombreux à exprimer.
Comme tous les humoristes de la chaine, Guillaume Meurice jouit d’une liberté d’expression dont je me suis portée garante dès le premier jour. L’existence d’un espace de satire politique dans lequel le pouvoir et ses représentants peuvent être moqués est le signe d’une démocratie qui fonctionne, et notre responsabilité en tant que radio de service public consiste à protéger cet espace au nom de la liberté d’expression. Celle-ci a une limite : celle du droit. L’humour, même lorsqu’il use d’irrévérence et de provocation, s’inscrit dans le cadre prescrit par la loi.
Qualifier n’importe quel représentant politique de « nazi » est une outrance dont le caractère comique peut être, en temps normal, questionné. Quand ce représentant, dont on peut par ailleurs désapprouver et critiquer la politique, est lui-même juif, à la tête d’un Etat juif, dont les habitants viennent de subir une attaque terroriste ayant assassiné plus d’un millier d’entre eux, cet humour est encore plus discutable. Quand s’ajoute à ce contexte une recrudescence des actes antisémites au sein de notre pays, ce choix des mots semble particulièrement malvenu.
Cette phrase n’est en aucune façon représentative du travail quotidien de la rédaction de France Inter, qui s’efforce de couvrir le conflit israélo-palestinien de manière responsable, documentée, équilibrée, ni de la ligne éditoriale de la chaine qui lutte contre l’antisémitisme, le racisme et toutes les formes de discrimination qui nuisent à la cohésion sociale, en ne contournant pas le mal mais en essayant de le nommer.
Pour beaucoup, une limite a été franchie : non pas celle du droit, qu’il reste à établir, mais celle du respect et de la dignité.
Si je suis garante de la liberté d’expression sur France Inter, je le suis aussi des propos qui s’y tiennent. C’est ce que j’ai rappelé aujourd’hui à Guillaume Meurice. J’ajoute qu’il reçoit depuis lundi des menaces de mort qui sont inacceptables et pénalement répréhensibles.
Sincèrement,
Adèle Van Reeth
Directrice de France Inter
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Les membres du Comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes de Radio France l’information et des programmes de Radio France
Réponse aux saisines relatives à la chronique de Guillaume Meurice dans l’émission le Grand Dimanche Soir :
Par différents courriers électroniques, plusieurs auditeurs ont saisi le Comité relatif à l’honnêteté, à l’indépendance et au pluralisme de l’information et des programmes de Radio France pour faire part de leur indignation à la suite des propos tenus par Guillaume Meurice dans sa chronique diffusée dans l’émission le Grand Dimanche Soir le 29 octobre 2023 sur France Inter, comparant Benyamin Netanyahou à un « nazi sans prépuce ».
Le Comité s’est réuni pour procéder à l’examen de cette saisine le 6 novembre 2023.
Il a estimé que les saisines en question entraient dans le champ de sa compétence, telle que celle-ci est définie par les articles 3-1 et 30-8 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction issue de l’article 11 de la loi n°2016-1524 du 14 novembre 2016, et s’est, en conséquence, déclaré compétent pour en connaître.
Le Comité d’éthique est sensible à cette question qui pose celle, tout à fait primordiale, de la responsabilité des personnalités qui tiennent l’antenne, y compris dans les émissions à vocation humoristiques, et de savoir si tout propos peut être prononcé sans qu’il soit tenu compte tenu du contexte et de l’actualité.
Le Comité d’éthique relève à cet égard les propos de la Présidente de Radio France, qui a notamment rappelé lundi 6 novembre dans un courrier adressé à l’ensemble des salariés de Radio France l’exigence de responsabilité, de rigueur et de modération qui s’impose aux antennes de Radio France, encore plus particulièrement lorsque le pays est marqué par une telle tension.
Au regard de l’importance de cette question, le Comité d’éthique a transmis les saisines relatives à ce sujet à la Présidente de Radio France, et en informera l’ARCOM dans les meilleurs délais au titre des compétences qui lui sont accordées en vertu de l’article de l’article 30-8 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
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Le billet de Charline Vanhoenacker dans le Grand dimanche soir le 12 novembre
« Pour des raisons de sécurité, nous sommes au Studio 621 à huis clos. Ça veut dire qu’aujourd’hui, la sécurité est devenue un moyen essentiel d’assurer la liberté d’expression, même celle des saltimbanques. Donc là, on est que tous les deux, François, la troupe attend en régie parce que j’aimerais d’abord m’adresser aux auditrices et aux auditeurs au premier degré pour être bien comprise par tout le monde. Et croyez moi, ce n’est pas facile parce que même à l’enterrement de ma grand mère, j’ai fait des blagues. Alors allons y! Bonsoir la France Inter! Dans l’émission du 29 octobre une blague a provoqué une polémique. Si cette blague vous a choqués, blessés ou les deux, si cette blague vous a fait rire ou si vous avez regretté d’avoir ri, si elle vous a gêné, diviser, fait réfléchir ou si vous êtes passé par plusieurs états à la fois. Et bien sachez qu’il en est de même au sein de notre équipe. Nous sommes une vingtaine et parmi nous, il y a ceux que cette blague a choqués, blessés ou les deux. Il y a ceux que cette blague a fait rire, ceux qui ont regretté d’avoir ri. Chez nous aussi, elle a pu gêner, diviser, fait réfléchir. Et puis il y a ceux qui sont passés par plusieurs états à la fois, ce qui signifie que chacune et chacun d’entre vous qui nous écoutez, vous pouvez vous sentir représentés au sein même de cette émission. Et à ceux qui pensent que nous manquons de nuances. Vous voilà informés, malgré les différentes sensibilités et les débats interminables qui ont agité notre équipe. Si nous sommes là ce soir, c’est que nous avons surmonté nos divergences et que nous avons confiance en Guillaume. Il s’exprimera tout à l’heure, à l’heure habituelle de sa chronique, parce que c’est l’espace qu’il a choisi pour répondre. Nous, les humoristes, on manie un langage qui est le deuxième degré et qui laisse libre cours à toutes les interprétations. Réduire une blague à la lecture qu’en fait l’extrême droite, c’est un dangereux procès d’intention. Dangereux parce que certains, dont une chaîne de télévision en particulier, dessine une cible sur le front des clowns. Et on est faciles à repérer parce qu’on porte un nez rouge. Non aux attaques haineuses, nous ne répliqueront uniquement qu’avec des blagues. Le temps venu, il faudra répondre à cette question comment la moitié d’un pays a passé dix jours à s’écharper sur une accroche satirique qu’on peut estimer ratée si on veut, bien sûr, alors que la guerre fait rage au Proche-Orient. Pendant ce temps là, Jordan Bardella a déclaré « Je ne crois pas que Jean-Marie Le Pen était antisémite ». Jean-Marie Le Pen a créé le FN avec un ancien SS, mais peut être que lui n’était pas antisémite. Il a parlé du détail de l’histoire, mais peut être qu’il a inversé le mot détail et abomination. Bardella semblait sincère. Mais peut être qu’il se fout de notre gueule. Qui sommes nous pour juger ? Certainement pas nous, nous ne sommes que des humoristes. Alors voilà, je réussi à mettre Bardella et humour dans la même phrase. C’était ambitieux. C’est un peu comme mettre décence et Mélenchon dans la même phrase, il fallait oser. Et l’humour, c’est toujours une prise de risque, celui de la liberté. Nous, on est encore prêts à prendre ce risque. Mais pour combien de temps encore? Est ce qu’on va y arriver? Allez on a presque réussi à faire de l’ironie, donc j’estime qu’on est prêt à rire à nouveau et à démarrer cette émission. »