Depuis la rentrée, les auditeurs sont nombreux à nous faire part de leurs avis sur les programmes de France Culture. Pour répondre à leurs questions, Emmanuelle Daviet reçoit Florian Delorme, délégué aux programmes de France Culture
Emmanuelle Daviet: En cette semaine où le prix Nobel d’économie a notamment été décerné au Français Philippe Aghion, commençons ce rendez-vous en évoquant l’émission « Entendez vous l’éco ? ». Je vous lis le message d’une auditrice qui résume bien la teneur de ce que nous recevons depuis la rentrée. Cette auditrice écrit : « L’émission animée et produite par l’excellent Aliette Hovine n’est plus programmée qu’une fois par semaine, le lundi à 14 h, alors que l’on dénonce avec justesse la pauvreté des connaissances en économie de la très grande majorité des Français, on élimine quasiment la seule émission très didactique et de bon niveau qui existe dans le paysage audiovisuel français. » Florian Delorme, les magazines de société rythment désormais chaque début d’après-midi avec des thématiques différentes et ce choix génère quelques frustrations chez des auditeurs.
Florian Delorme: Alors d’abord, Emmanuelle, je me réjouis que cette émission plaise tant à cette auditrice et je partage d’ailleurs son jugement et je la rejoins pleinement pour dire que c’est une très bonne émission, nécessaire et très bien menée par Aliette Hovine. C’est une émission qui permet à la fois de traiter l’actualité chaude, l’actualité du moment, la dette publique, les accords commerciaux. C’est une émission qui permet aussi d’aborder, j’allais dire les lames de fond, les sujets un peu plus en profondeur, les conséquences de l’intelligence artificielle sur l’économie, les outils de la finance pour accompagner la transition. Et puis, c’est aussi une émission dans laquelle on a essayé de conserver cette logique de séries qu’on avait introduit il y a quelques saisons maintenant, qui nous permet de creuser un sillon en particulier. Je pense là, par exemple, à cette thématique sur les économistes face à la guerre qui nous permet de naviguer de Keynes à Rosa Luxembourg. Je crois qu’avec cette formule-là, on a trouvé quelque chose de très pertinent pour avoir les réflexions de très haut niveau avec des experts extrêmement solides dans leur domaine. On avait envie, avec Emilie De Jong, d’avoir effectivement, à 14h cette tranche avec des enjeux de société de premier plan. Et je crois que là, on a un spectre qui répond à ces enjeux. Depuis l’économie le lundi, l’environnement, les questions d’éducation, les sciences humaines et évidemment, cette émission excellente, ô combien excellente, dans laquelle on est aujourd’hui sur « La Fabrique de l’information » qui d’abord manquait à France Culture et je crois, manquait au paysage radiophonique. Et en plus, je ne le dis pas car il est là, mais extrêmement bien menée et déjà une référence dans le paysage radiophonique, donc je m’en réjouis.
Emmanuelle Daviet : On poursuit avec les rediffusions et ce message : « Nous sommes de fidèles auditeurs de France Culture. Nous avions déjà noté que les rediffusions au cours d’une même journée étaient de plus en plus nombreuses. Mais avec la grille de cette rentrée, le phénomène s’est amplifié dès 21 h. On commence à réentendre l’émission de 9 h, excellente au demeurant, « Le cours de l’histoire », à 22 h on a le « Book Club » déjà diffusée à 15 h et à 23 h « LSD, la série documentaire » pourtant programmée une première fois à 17 h. Il n’y a plus aucune nouveauté de toute la soirée. C’est désolant. » nous écrit cette auditrice. Que vous inspire ces remarques Florian Delorme ?
Florian Delorme: J’entends la remarque. Je comprends que ça puisse la gêner dans son écoute de l’antenne. Mais il faut regarder aussi la réalité des usages et leurs évolutions. D’abord, il faut bien noter quelque chose Emmanuelle, les auditeurs qui écoutent l’ensemble de la grille, j’allais dire de bout en bout, sont extrêmement rares. Donc, si cette personne peut ne pas apprécier, et je le comprends, entendre deux fois un programme dans la même journée. En fait, pour la grande majorité des auditeurs, la deuxième proposition est en fait une première écoute pour la plupart. Je comprends que ça puisse la gêner, mais c’est ça la réalité. Et je pense qu’il ne faut pas se priver de proposer, de reproposer un excellent contenu. Par ailleurs, rappelons quand même les choses Emmanuelle, France Culture c’est probablement la radio qui propose le plus de contenus inédits sur une journée, le jour et la nuit. Je vous rappelle, vous connaissez bien notre grille, mais 4 h de nuit avec des inédits qu’on va chercher dans les trésors enfouis, grâce à l’équipe des Nuits de France Culture. Tous ces trésors qui remontent à la surface. Donc on a vraiment un volume très important. Mais c’est vrai, disons le, il faut trouver des leviers, il faut pouvoir innover, proposer par exemple des podcasts avec des grammaires audio un petit peu différent. Pour aller aussi faire de la conquête de public, il faut trouver des leviers. Et c’est notamment à travers cette question des multidiffusions qu’on va pouvoir les trouver. Mais je la rassure, si jamais elle écoute un programme une deuxième fois dans la journée, je l’invite à prendre l’application Radio France et aller trouver des pépites dedans. Je suis sûr qu’elle en trouveras.
Emmanuelle Daviet: On termine avec une nouveauté de la rentrée « Sans préjuger » de Nathan Devers à 12 h 45 chaque samedi. Je vous lis les qualificatifs des auditeurs : « émission pertinente, objective, pédagogique, passionnante questions posées et analyses très pointues. » Les auditeurs se disent séduits par la richesse et la profondeur des échanges au cours desquels philosophes, mathématiciens, économistes, sociologues, écrivains ou cinéastes analysent un sujet. Florian Delorme, dans cette émission, vous avez fait le choix de l’hybridation des regards. Est-ce aussi une manière de lutter contre le cloisonnement des savoirs ?
Florian Delorme: Alors d’abord, permettez moi d’être très heureux du succès rencontré par ce nouveau rendez-vous. J’ai moi aussi un certain nombre de mails qui vont dans ce sens, des satisfecit que vous m’envoyez régulièrement d’ailleurs, que vous recevez dans votre boîte, donc ça me fait très plaisir. On a longuement réfléchi avec Nathan Devers sur cette émission. On la voulait à la fois extrêmement ouverte dans les sujets, dans les profils qui allaient pouvoir intervenir et en même temps extrêmement exigeante. Il fallait qu’on aborde les sujets du moment. Et en même temps, en trouvant la manière de les inscrire dans la grande et longue histoire des idées et des débats d’idées. On n’a pas peur du débat d’idées à France Culture et on a eu là, pour le moment des sujets extrêmement intéressants, la méritocratie, excellente émission, la démocratie, l’intelligence artificielle. Je crois qu’on va dans le bon sens et je me réjouis de lire que les auditeurs le pensent aussi. Pour être honnête, Emmanuelle, c’est vrai que quand on a annoncé l’arrivée de Nathan Devers, d’aucuns se sont interrogés sur ce choix. On avait avec Emilie de Jong, la directrice de France Culture, cette conviction, cette intime conviction qu’il finirait par les convaincre par la qualité de sa proposition. Et c’est précisément ce qu’il est en train de faire. Et honnêtement, je m’en réjouis.