Erik Orsenna, membre de l’Académie française, Julien Denormandie, ancien ministre de l’Agriculture, Marc Dufumier, agronome et professeur honoraire à AgroParisTech et Christiane Lambert, présidente de la COPA, ex-FNSE, ont débattu de la crise agricole lors de l’ouverture du Salon de l’agriculture ce samedi 24 février dans le Grand face à face :

Je vous remercie de votre émission d’aujourd’hui depuis le Salon de l’Agriculture, c’était formidable de vous écouter : intéressant, instructif, de bonne tenue, avec de l’écoute entre les intervenants, intervenants bien documentés sur le sujet de l’agriculture française et européenne. Grand merci !

Merci pour ce Grand face à face XXL. Un débat respectueux, de qualité avec des invités divers qui permet de cerner beaucoup de problèmes. Merci à Thomas Snégaroff qui a mené, comme toujours, les échanges avec humour, courtoisie et écoute.

Pourquoi toujours la FNSEA sur tous les plateaux (voire la coordination rurale) et si peu la Confédération Paysanne seule à faire preuve de bon sens en n’opposant pas Agriculture et Ecologie ? Cela fait des décennies que la FNSEA accompagne le système productiviste et le détricotage du maillage rural. Ce système permet de nourrir les plus nantis et affame les autres. A mon avis, le problème n’est pas de produire plus mais de produire mieux et d’assurer une meilleure répartition de la nourriture. Tant que ce sera la logique de l’économie financière qui guidera l’agriculture, elle n’évoluera pas… S’il vous plait donnez de l’écho à la Confédération Paysanne et à leurs amis.

Si je suis d’accord avec le constat d’une paperasserie « de dingue » pour les agriculteurs il faut quand même se rappeler qu’entre les céréaliers et ceux de montagne, il y a une énorme différence et que l’argent va toujours aux mêmes. D’autre part, quand on voit qui sont les représentants syndicaux de la FNSEA, tous hommes d’affaires avant d’être agriculteurs, on se demande vraiment pourquoi les agriculteurs leur confient la moindre responsabilité puisque ce sont eux et les chambres d’agriculture qui les étranglent depuis des années aussi activement que les normes !
D’autre part, je vis en Vendée, dans le bocage ou ce qu’il en reste, dans une région où le massacre, le carnage sur les arbres et les haies se constate tous les jours. J’ai perdu 75% des oiseaux du jardin en 10 ans, il faut cesser ce massacre que ces mêmes agriculteurs paieront aussi mais il sera trop tard quand ils comprendront !!!
Quant à l’eau, elle n’appartient à personne et il serait temps que là aussi la « privatisation » cesse !

Pour réagir à ce qu’affirme Christiane Lambert sur la nécessité d’utiliser des pesticides, il faut simplement se remémorer comment travaillaient les agriculteurs/éleveurs, non pas au 19ème siècle, mais après la 2ème guerre mondiale. Certes, les rendements étaient bien inférieurs à ceux d’aujourd’hui, mais les agri/éleveurs étaient autonome en semences. Si les rendements étaient moindres, les plantes n’avaient pas toutes la fragilité d’aujourd’hui par rapport aux cryptogames, aux insectes, etc…
Je pense qu’aujourd’hui, oui les agri/éleveurs sont dépendants des phytosanitaires et médicaments pour les animaux ! Au fil des décennies on a gagné en productivité (grâce à l’interventionnisme de la PAC) au détriment de la résistance aux maladies. Dans le même temps on a une production agricole qui a augmenté considérablement son impact carbone (d’où la nécessité de s’interroger sur la vocation d’exportation de notre agriculture…).
Il faudrait aussi que Mme Lambert écoute Mr Gaspard Koenig (qui pourtant est de formation philosophique !) qui a bien compris qu’une agriculture sur le modèle de la permaculture est plus productive que l’agriculture « industrielle ».
Je suis fils d’agriculteur/éleveur, j’ai suivi des formations supérieures agricoles et « j’exploite » encore 6 Ha de près/verger.

Très intéressant débat, cependant je suis très étonnée que la PAC ne soit pas mentionnée alors qu’elle est très inégalitaire en bénéficiant fortement aux grandes exploitations intensives au lien de favoriser l’agriculture respectueuse de l’environnement qui n’est quasiment pas subventionnée. Elle est un facteur de la crise actuelle ! Pourquoi ne pas en parler ?

Depuis de nombreuses semaines j’écoute les émissions et débats sur la crise agricole.
Je suis issu du monde agricole, petits éleveurs d’Aveyron, dans ma famille il y a des éleveurs en bio (une minorité), qui ne peuvent pas vendre leur viande sur le marché bio car il n’y a pas assez de demande, ils le vendent sur le marché non bio…
Pourquoi ne parle-t-on pas des agriculteurs bio qui ne sont pas du tout soutenus ?
Dans mon entourage la majorité ne sont pas en bio, mais parce qu’ils ne le peuvent pas, à cause de leur investissement de départ, la majorité ne se reconnaissent pas dans la FNSEA, ils ne sont pas pour la baisse des normes écologiques, ils veulent être accompagnés pour pouvoir changer de stratégie et penser l’avenir, et l’agriculture autrement. Mais ça personne n’en parle, je ne pense pas que ceux qui font le plus de bruits soient dans des revendications vertueuses pour eux et le monde agricole.
C’est une culture et agriculture globale qu’il faut revoir, autant au niveau des consommateurs que des acteurs agricoles.
J’écoute Mme Lambert, on ne peut pas continuer à avoir ce genre de discours dangereux pour notre futur, et surtout elle n’est tellement pas représentative du monde agricole.
Pourquoi ne pas inviter des agriculteurs qui produisent autrement, qui ont juste besoin d’être plus soutenus ? Pourquoi toujours inviter ces représentants agricoles qui mènent leur profession à leur perte ?

J’écoute votre émission en ce moment et ce qui m’interpelle c’est qu’il y a un paramètre essentiel que vous oubliez : les Français ne demanderaient pas mieux d’acheter des produits bio français malheureusement ils n’en ont pas tous les moyens !!! Le consommateur est responsable, certes, mais pas seulement lui !!! On est en train d’acculer les gens à la misère les paysans comme les autres !!!

Débat palpitant et très bien mené, merci.
Mais pourquoi à aucun moment n’évoquez-vous (1) le fait qu’une agriculture durable, respectueuse de l’environnement, faible émettrice de gaz à effet de serre, nécessite forcément moins de mécanisation et de produits chimiques, donc une productivité très faible, donc beaucoup plus de bras ? (Et forcément une production locale car le transport est énergivore, donc une autonomie de chaque pays voire de chaque région dans le monde).
Donc que l’agriculture du futur exige nécessairement un retour d’au moins 30 % de la population française dans les champs ? (Pour remplacer les tracteurs et les intrants par des bras.)
Car un des problèmes est là : personne n’a envie de refaire l’exode rural à l’envers, et aucune personne politique ne peut être élue si elle dit aux français : retournez massivement aux champs.
Et pourquoi n’envisagez-vous pas une seule seconde que (2) dans 70 ans la France soit un pays PAUVRE ? C’est-à-dire où toutes les sources d’énergie sont hors de prix ?
Un décideur politique qui voit loin dans l’avenir doit prévoir un système économique et agricole, ainsi qu’un aménagement du territoire qui peut FAIRE SANS, fonctionner aussi SANS, c’est-à-dire se passer d’industrie, de mécanisation, d’énergie (pétrole, gaz, électricité…). Car toutes ces dépendances vis-à-vis de la puissance technologique ne peuvent fonctionner que lorsque le pays reste riche, et d’autre part ont une empreinte écologique trop lourde. Or rien ne nous garantit, au contraire, que nous restions un pays « industrialisé » et puissant dans le siècle qui arrive. La sagesse serait de trouver des solutions de survie très modestes, qui permettront de vivre sans être dépendant de la puissance technologique et industrielle. Mais qui voterait pour un candidat qui annonce le retour aux champs et la fin du confort moderne ?

Toutes mes félicitations pour avoir invité Marc Dufumier, grande voix trop absente des ondes.

Où sont les petits agriculteurs ? Eternellement absents de vos plateaux… Vous devriez dire que le monde agri français est divisé à minima en deux parties… L’une qui protège nos environnements et l’autre qui le détruit et l’empoisonne… Il faudrait donc entendre aussi les petits.
Vous devriez dire aussi que les importations de soja du Brésil doivent stopper immédiatement, même si cela dérange la personne présente sur ce plateau.