Il y a quelques jours lors d’un point info, lors de l’annonce des titres, le présentateur du journal a mentionné que « Gabriel Attal aura de nouveau les pieds dans la glaise aujourd’hui » en parlant d’une visite à venir sur le terrain. Mais quelle arrogance du petit monde journalistique parisien qui regarde le monde agricole avec des clichés que je pensais révolus et qui laissent bien évidemment planer le doute sur l’objectivité éditoriale associée ? J’étais un auditeur régulier de France Inter mais j’avoue que ma fidélité a été sérieusement revue à la baisse.

Je suis auditeur quotidien de votre radio et je dois dire que je suis très déçu de votre couverture des évènements avec les agriculteurs.
C’est la première fois que je vous fais un message mais il est incroyable d’entendre des éditorialistes parler des jachères de la sorte, en somme comme si c’était une invention de l’Europe ou une lubie d’écologistes.
Le vivant se respecte et les sols en font partie. Il suffit de reprendre ses cours d’histoire géographie pour comprendre que la jachère existe depuis bien plus longtemps que l’union européenne.
Mais des économistes et des agriculteurs doivent sûrement penser qu’avec un peu de chimie on peut bien se passer de la qualité et du respect des sols.
Eh bien non, nos sols doivent pouvoir aussi être cultivés et cela participe du rendement des cultures, et les engrais et autres pesticides ou encore la culture extensive et l’économie aveugle mondialisée sont à l’origine de l’effondrement de la biodiversité, de la dégradation et de la pollution des sols… et de la mort annoncée de ce même modèle agricole, n’en déplaise à ceux qui en sont les premières victimes, à savoir les agriculteurs eux-mêmes.
Alors s’il vous plaît, invitez des gens un peu plus sérieux, et rétablissez la vérité sur ce que sont les jachères au lieu de répéter un message simpliste indigne du service public d’information.

Vous êtes certainement inondés de message… mais tant pis je vous écris malgré tout sur cette crise agricole…
Tout d’abord j’ai grandi avec France Inter …avec Jacques Chancel, Claude Villers, etc. et je suis fille, sœur, mère d’agriculteur et je suis très inquiète…
Bien sûr nous avons écouté vos chroniques, entretiens, émissions diverses et variées… Mais attention les journalistes, allez passer seulement 2 ou 3 jours dans une ferme, quel que soit le type de ferme où on travaille souvent 10h par jour suivant les saisons et les productions…. Et après il faut remplir papiers et encore papiers…
Attention on a l’impression d’entendre des journalistes parisiens donnant des leçons d’économie et d’écologie, et c’est ce qui fait le lit du Rassemblement National qui joue sur cette vague… Les agriculteurs ne sont pas anti-écologie et veulent vivre de leur travail et ne veulent pas être acculés jusqu’au suicide. Voilà… voilà… mais on écoutera toujours France Inter !

Je suis une fidèle auditrice de France Inter et apprécie la qualité de ses émissions.
C’est la raison pour laquelle je me permets de vous faire part de mon insatisfaction concernant le traitement du mouvement des agriculteurs. Ou plutôt la frilosité des journalistes. Il me semble que le malaise/mal-être/colère des agriculteurs n’est pas récent et les journalistes le savent mieux que quiconque. Pourtant, je les trouve bien peu audacieux en face de politiques qui donnent l’impression de découvrir cette réalité. Le comble pour moi a été d’entendre notre présidente de l’Assemblée nationale déclarer qu’on ne pouvait pas résoudre les problèmes du jour au lendemain ! Je suggère des émissions spéciales sur les traités de libre-échange et celui à venir avec le Mercosur. Sans prendre parti, les professionnels de l’info sont légitimes à interroger les politiques sur leurs contradictions. Je suggère des émissions spéciales sur la politique européenne en matière d’agriculture mais pas seulement.

Je suis surpris qu’aucun de vos journalistes ne fasse savoir que les revendications des agriculteurs, si elles sont satisfaites (prix plancher, protectionnisme en particulier), seront très inflationnistes sur le prix de la nourriture. C’est à la portée d’un économiste de Terminale.
Pourquoi cette question n’est-elle pas posée aux personnalités politiques ou aux agriculteurs ? Il faut mettre les points sur les « i ».
Par ailleurs, les coopératives et autres organismes agricoles comme les chambres d’agriculture ne sont pas pour rien dans le fait que les agriculteurs sont étranglés financièrement, pourquoi n’est-ce pas soulevé ? Notamment, les chambres d’agriculture freinent le bio car elles sont entre les mains des agriculteurs traditionnels.
Bref, je pense que par paresse ou carence, vos journalistes ne traitent pas complètement cette actualité.

Je viens d’écouter la chronique sur le revenu des agriculteurs, et comme d’habitude, on ne parle pas des maraîchers. Vous avez abordé le revenu des éleveurs et des grandes cultures.
Quid du maraîchage ? Nous sommes nombreux en France, et notamment de nombreuses petites fermes en bio. C’est certain que nous ne sommes pas adhérents au syndicat majoritaire pour la plupart. Cependant, on mérite que les rédactions s’intéressent à nous. C’est également le cas des arboriculteurs.

Il eut été intéressant de montrer les écarts entre les revenus des plus pauvres et des plus riches, y compris avec les dividendes versés aux actionnaires des grands groupes qui étranglent l’ensemble du secteur. C’est bien insuffisant de considérer la productivité, l’efficience, etc. tout comme est intéressante votre info sur le patron de la FNSEA, hélas anecdotique si vous n’expliquez pas le mécanisme qui autorise les profits considérables réalisés par les grands groupes, et dire que la production agricole est devenue un produit financier qui fluctue au gré des spéculations.

Il y a une curiosité dans le mouvement des agriculteurs que personne ne relève, et il serait intéressant que les journalistes posent la question aux responsables pour que l’on ait une explication : l’un des reproches les plus importants des agriculteurs est adressé aux grandes surfaces. Et curieusement, aucune grande surface n’est bloquée par les agriculteurs. Ce serait pourtant un moyen puissant pour les obliger à négocier des rémunérations plus justes. Mais on ne touche pas à ces grandes surfaces. Et puis aucun journaliste ne fait remarquer aux agriculteurs qui vitupèrent contre l’Europe que celle-ci verse des milliards aux agriculteurs. Pas un mot. C’est étrange toutes ces auto-censures. On est toujours à la surface des choses, jamais on n’approfondit les questions sur les vrais revenus agricoles, les avantages fiscaux des agriculteurs, etc. Non, surtout ne rien dire. Et on appelle cela de l’information ?

J’habite en campagne et j’exerce le métier d’ouvrière agricole.
Pourquoi assimiler les ruraux à des électeurs du front national ? C’est un propos hors sujet et très partiel de la réalité politique de nos campagnes.
La majorité des journalistes font déjà un bon travail de sabotage de l’image du monde rural et des agriculteurs, inutile d’en rajouter.
Il y a de tout dans nos campagnes comme dans nos villes. Nous ne votons pas tous extrême, vous seriez même surpris de l’ouverture d’esprit des habitants sur des sujets qui sont tabous en milieu citadins.
Si vous vous intéressez réellement aux personnes, arrêtez de vouloir leur coller des étiquettes…

Merci d’avoir donné la parole à un autre syndicat qu’à la FNSEA, c’est tellement rare sur les ondes. D’autant que M. Legras a mis le doigt sur le très gros problème de l’importation massive de produits non conformes aux normes françaises et utilisés par notre industrie agroalimentaire. Quand on achète de la « bonne qualité française », et même du local, on ignore que la matière première vient en partie ou en intégralité, de zones agricoles où OGM et autres néonicotinoïdes sont autorisés. La colère des agriculteurs est légitime sur ce point.
Aujourd’hui il faut être un expert pour manger sain, c’est hors de portée de la plupart des Français.

A M. Erner, immenses remerciements pour votre émission sur les agriculteurs : sur la forme (très accessible, vivante, sans pleurnicherie) comme sur le fond ! Depuis une semaine je rageais contre les journalistes parisiens et leur non-connaissance du sujet (sans nuances sur les syndicats par exemple etc). J’ai été élue de mon village au milieu du bocage les éleveurs cherchent à faire au mieux : agriculture raisonnée, établissement de circuit court etc dans nos cantines tout est du coin et ça ne suffit pas ! Ce qui manque le plus c’est du respect pour ces entrepreneurs…et ne parlez pas de salaires ce sont des revenus ! Encore merci et bravo.

La souveraineté alimentaire est une notion et un crédo surtout utilisés par les partisans et responsables de l’agro-industrie, de la FNSEA. Pourtant, le modèle de production intensive ardemment défendu, ne permet pas de réduire les problèmes de famine dans le monde, de malnutrition au sein des populations les plus précarisées. La distribution alimentaire est souvent en crise du fait du nombre croissant des demandeurs. Ce modèle est responsable de la pollution, souvent irréversible, des sols, de l’eau, de l’air, de la destruction de la biodiversité, du développement de maladies graves chez des agriculteurs ou leurs voisins… Alors de quoi parle-t-on au juste avec la « souveraineté alimentaire » ? Est-ce une notion scientifique, une idéologie, un programme politique, un modèle économique ? Quels sont les utilisateurs de cette terminologie, qu’est-ce qu’ils défendent, qui sont leurs contradicteurs ? Il me semble urgent de ne pas laisser ce terme se banaliser, servir de mantra, à un moment où le monde agricole, des éleveurs, va mal, où notre terre nourricière est empoisonnée, où des personnes ne mangent pas à leur faim ici et ailleurs.

Je suis interprète dans des réunions au niveau européen. J’entends donc s’exprimer tous les acteurs et je peux vous dire qu’il est excessivement difficile de faire la synthèse de tous ces intérêts divergents. Les défenseurs de l’environnement veulent des normes plus strictes, les consommateurs des prix moins chers et les grands syndicats d’agriculteurs ne veulent rien changer à leurs pratiques, contrairement à une nouvelle vague d’exploitants qui plaide pour un nouveau modèle. C’est cette nouvelle orientation qui a été décidée avec le pacte vert qui, selon certains, ne va pas assez loin.
J’entends beaucoup d’informations déformées, et même erronées sur l’Europe.
La Commission a toujours eu bon dos. Depuis toujours les gouvernements se défaussent de leurs responsabilités en accusant Bruxelles quand la situation se détériore (mais en s’attribuant à eux-mêmes les succès sans reconnaître la plus-value de l’Europe).
Le régime d’aide à la production a été abandonné ensuite car responsable d’une production intensive : plus vous produisiez -et peu importe la qualité, les intrants, engrais…- plus vos primes étaient élevées. D’où la surproduction. C’est la raison pour laquelle on a évolué vers un régime d’aide au revenu.
On parle beaucoup des contrôles excessifs mais au début de ma carrière, il y a 35 ans, les abus étaient légion : vin frelaté, mortadelle à la sciure de bois, fausses déclarations de vaches dites “de montagne” mais invisibles etc…. Tout cela pour recevoir plus de subventions. Subventions qui proviennent finalement des impôts des contribuables européens.
Cela étant, force est de reconnaître que tous les garde-fous qui se superposent rendent la législation très complexe et qu’une simplification serait bienvenue.
Pour ce qui concerne les accords commerciaux, il faut savoir que la production française ne suffit pas à approvisionner le marché (par exemple en viande ovine) et qu’on a donc besoin de certaines importations. Et dire que tout est permis dans les pays tiers et qu’il n’y a pas de contrôle des importations est faux.
D’ailleurs, les producteurs européens exportent aussi leur production vers l’extérieur.
Je termine en pointant notre responsabilité en tant que consommateurs : les fast food attirent de plus en plus de clients alors que ces chaînes s’approvisionnent en produits importés à bas prix. Le consommateur ne veut plus payer le juste prix du labeur paysan car il place ses priorités ailleurs.

1) tous les paysans ne manifestent pas
2) aucun média ne se penche sur l’Agriculture Biologique pour connaître ses pratiques sans chimie. Il y a une vraie expérience à tirer de cette agriculture-là : rotation des cultures, diversifier les productions (ex : pour éviter d’utiliser les néonicotinoïdes, il faut arrêter la monoculture et la désintensifier pour que les ravageurs soient moins virulents, implantation de luzerne pour 6 ou 7 ans, plante résiliente au manque d’eau qui évite la gabegie d’énergie liée à l’implantation annuelle de maïs (rappel : à la base, une vache, ça mange de l’herbe !)
3) les « papiers » à remplir c’est pour toucher la PAC en général, les jours où on fait ce travail, sont les jours les plus rémunérateurs de l’année (malheureusement !)
4) la FNSEA est en co-gestion du ministère de l’agriculture depuis 60 ans, elle décide de tout et mène même quelquefois les réunions, elle fait un lobbying terrible et maintenant elle dénonce les choix faits ! Quelle hypocrisie ! En réalité, elle fait comme elle a toujours fait : elle s’accroche aux derniers wagons et avec sa force de frappe elle arrive jusqu’à la locomotive et en prend la conduite (ex d’interview de Dominique Bussereau tout frais ministre de l’agriculture sous Chirac qui dit qu’il est allé prendre sa feuille de route à la FNSEA)
Je ne peux pas intervenir ce soir car je fais une vente à la ferme, certains consommateurs locaux nous soutiennent en nous achetant en direct nos yaourts bio, c’est cette démarche que les consommateurs doivent faire s’ils disent qu’ils nous soutiennent : acheter bio et local, déserter les supermarchés pour la nourriture, aller au marché, dans les magasins de producteurs, chez les paysans, arrêter d’acheter des tomates en hiver et en général des fruits et légumes qui viennent de l’étranger. Vous êtes 87% à nous soutenir, et bien passez à l’acte ! En plus, vous serez gagnants en termes de rapport qualité-prix.

Une précision quand vous parlez d’agroécologie ne dites pas que c’est une agriculture avec une utilisation raisonnée des pesticides, c’est un contresens. Voilà la définition : l’agroécologie est une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. (source Ministère de l’Agriculture). Elle est plébiscitée par des paysans en agriculture biologique qui ne cherchent pas une utilisation raisonnée des pesticides mais qui prouvent qu’on peut s’en passer… merci à vous.

Est-ce que vos intervenants observateurs des aspects sociaux, économiques, politiques, environnementaux, philosophique, spirituel, pourraient mettre en lumière cette quadrature du cercle : d’une part : les agriculteurs qui se battent pour obtenir de justes prix pour leurs productions, d’autre part l’augmentation de la pauvreté et de la précarité pour 9 millions de personnes à minima, qui ne peuvent pas se nourrir correctement ?
Qu’est-ce que cela révèle des ressorts qui sous-tendent l’évolution de nos sociétés vers plus de précarité, « d’abrutissement », de conflits…? Hasard ? Fatalité ? Intentions délibérées ? De Qui ? Pourquoi ? Merci pour la qualité de vos émissions.

Qu’attendez-vous pour interroger les anciens présidents et premiers ministres sur la crise des agriculteurs dont ils sont eux aussi les responsables ?

Je remercie le 13-14 sur France Inter qui enfin ose faire entendre quelques voix lucides face au mouvement des agriculteurs : des normes, il en faut pour garantir la qualité des produits. Et comment réclamer encore plus de pesticides tout en dénonçant la crise de l’apiculture (abeilles malades voire décimées) ? Bref des revendications souvent contradictoires que peu de journalistes osent souligner.

Vous avez annoncé et confirmé plusieurs fois sur votre antenne que le salaire moyen des agriculteurs était de 4000 euros… Ce qui a surpris énormément de monde. Même si vous avez ajouté que 2,5% des agriculteurs touchaient des salaires avoisinants le smic, il me semble que cette moyenne nationale induit une image fausse… par contre, il serait bien plus pertinent de donner le salaire médian des agriculteurs en analysant chaque quartile… de chaque côté de la médiane…
On aurait une bien plus juste image de ce que gagnent les agriculteurs…

Je suis éleveur, je n’ai pas pu me rendre à la manifestation, je peux difficilement quitter mon exploitation en période de vêlage. Je ne connais pas toutes les revendications, certaines ne me concernent d’ailleurs pas, cependant je voudrais témoigner de mon exaspération. Je suis fidèle auditeur de france inter, sur votre antenne j’entends régulièrement des critiques sur notre profession, car bien sûr tout le monde a un avis sur l’agriculture, d’ailleurs tout le monde semble expert en agriculture… C’est très blessant de se faire montrer du doigt par des gens complétement hors sol, mais si, parfois ils ont eu un grand père paysan alors ils savent de quoi ils parlent !!!! Mon grand-père a fait la guerre, je ne me vois pas pour autant expliquer à nos soldats comment aller se battre ! Alors s’il vous plaît, faites preuve de bon sens et assurez-vous de parler de ce que vous connaissez.

Je suis une urbaine mais je sais quelle est la situation des agriculteurs en France et j’essaie de les soutenir du mieux possible.
Mais demander aux consommateurs de faire tous les efforts c’est oublier qu’eux aussi sont touchés de plein fouet par crise inflation qui touche tous les prix mais pas du tout leur salaire qui est bloqué (en tout cas pour beaucoup du privé et les fonctionnaires).
A un moment ils sont aussi devant un arbitrage entre leur panier et niveau de vie et leur pouvoir pour aider et soutenir tous les agriculteurs. Ce qui explique leurs choix parfois en contradiction de leurs convictions.

Vive le renard libre dans le poulailler libre ! Telle pourrait être la devise du gouvernement (attribuée à Henri Lacordaire) au vu de sa façon de conduire les opérations face à la crise agricole. Car en quoi se résume la réponse gouvernementale à la revendication principale des agriculteurs qui porte sur le revenu ? « Allez les agriculteurs, on vous laisse négocier des prix de vos denrées dans le cadre de la loi Egalim, face aux centrales d’achat des grandes et moyennes surfaces et aux industriels de l’agroalimentaire, et que le meilleur gagne ! Et puis, si c’est trop flagrant que certains ne jouent pas le jeu on pourrait sévir pour l’exemple ! » Or il est évident que le rapport de force de ces négociations étant très déséquilibré entre des producteurs même regroupés et les géants de la distribution, les dés sont pipés. Comme le montre la réalité des accords les prix obtenus par les producteurs sont faibles voire inférieurs au regard de leur coûts de production. C’est en particulier le cas pour les bovins et ovins viande et lait, les fruits et légumes, et la viticulture. Dès le départ Christiane Lambert de la FNSEA, et le rapport du Sénat d’octobre 2019 le constataient amèrement. Les loi Egalim 2 et 3 n’ont fait que rajouter des règles de plus en plus complexes sans rien résoudre comme le reconnaissait dernièrement le député Renaissance Frédéric Descrozaille, porteur de Egalim3 ! Il est évident que seul, la fixation de prix plancher correspondants aux coûts de production est de nature à rémunérer correctement le travail des paysans*. C’est ainsi qu’a fonctionné la PAC au départ avec des prix d’intervention sur certains produits importants (lait, céréales…). Il faut le rappeler à certains qui ont la mémoire courte ! Une autre façon de noyer le poisson pour le gouvernement (avec la complicité de certains syndicats majoritaires), c’est de déplacer le débat sur le terrain des normes tout en accusant les écologistes d’en être à la source. On « oublie » que les groupes majoritaires au parlement européen (extrême droite, droite, centre et socialistes) ont voté le Pacte Vert, le programme « de La Fourche à la fourchette », la PAC actuelle… Comme d’habitude le double langage est de rigueur et les larmes de crocodile d’une certaine classe politique, sont plus que jamais d’actualité. Car qu’est-ce qui est sous-entendu dans la volonté de ne pas accepter la soi-disante surtransposition des normes ? Un décryptage de ce vocabulaire obscur est nécessaire ! En fait il s’agit d’obtenir, au nom de la concurrence non faussée, que l’on revienne sur l’interdiction en France de certaines matières actives tel les insecticides néonicotinoïdes, interdits à juste titre par l’ANSES car ils posent de graves problèmes de toxicité pour les applicateurs et les insectes pollinisateurs et qui sont autorisés dans les autres pays, voire même au sein de l’UE. Ainsi plutôt que de demander aux autres pays de retirer ces usages de produits phytosanitaires ou d’interdire l’importation des denrées ainsi cultivées, on demande donc de pouvoir les épandre chez nous, quitte à continuer à dégrader la biodiversité, ce qui posera des problèmes pour la pollinisation des cultures ! On marche sur la tête ! Et ce d’autant plus que les mêmes réclament la disparition de la règle prudentielle en termes de préservation de la biodiversité de l’eco-conditionnalite de l’aide PAC qui consiste à préserver 4% des surfaces réservées à des haies, des jachères ou des bosquets d’arbres. Or ce sont des réserves de biodiversité refuge pour les oiseaux et les insectes auxiliaires des cultures. Quand on voit ces grandes plaines céréalières sans arbres sur des kilomètres, il faut bien faire quelque chose ! Ça n’empêche pas, ceci dit, de reconnaître que certains écologistes ne tiennent pas compte des pressions parasitaires et mèneraient les agriculteurs dans des impasses techniques en voulant interdire à court terme tout recours à des produits de protection des plantes. De même on ne comprend pas leur opposition de principe à toute réserve d’eau si ça ne réduit pas les réserves des nappes en été ! Le dogmatisme des uns nourrit le sectarisme des autres ! On est bien barrés ! Espérons cependant que le bon sens l’emporte et que l’on puisse maintenir le maximum d’agriculteurs et qu’ils puissent en vivre dans des conditions décentes. Tout le monde y gagnera pour la préservation de nos terroirs, de notre nourriture de qualité, de nos paysages et de la biodiversité…et de nos paysans ! *Autre devise de Lacordaire « c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » qui est à méditer par les temps qui courent face à ceux (technocrates ultralibéraux et représentants européens ou de Bercy, de la sainte concurrence libre et non faussée) qui ne veulent aucune règle face aux déséquilibres des marchés, et pour qui l’idée même de prix plancher relève de l’hérésie.

L’absence d’un modèle économique à la hauteur des exigences sociales et environnementales qui s’imposent à l’agriculture est LE problème de fond de la crise actuelle. Cela amène notamment à s’interroger sur les limites de la définition des normes environnementales souvent issues d’arbitrages politiques avec les organisations professionnelles agricoles pour pouvoir afficher une action sans pénaliser les filières… et leur effet contreproductif du point de vue de la transition.
Prenons l’exemple des ZNT (Zone Non Traitées) en bordure des habitations, il y a un réel enjeu de réduction des pollutions atmosphériques a côté des habitations mais les distances imposées par la réglementation (3 à 20 m en fonction des situations) ont été réduites aux maximum sous pression des principales organisations professionnelles et ces distances n’ont aucune base scientifique (certains produits peuvent dériver sur des centaines de mètres voir plus d’un km…cf nombreux déclassement cultures bio suite à ces contaminations par des épandages sur des champs parfois distant d’1 km)….. Bilan : le problème de la pollution persiste, la société s’impatiente, l’agriculteur ne comprends pas car il respecte la réglementation en supportant les contraintes (perte de surface non productive, acquisition de matériel censé être plus performant…). Une réelle conditionnalité des aides PAC en phase avec des mesures efficaces demandées aux agriculteurs serait un moyen important pour réconcilier agriculture et société mais NOS filières agroalimentaires refusent cette option.

J’apprécie le traitement que vous faites de la crise agricole, sans faire la part trop belle à la FNSEA, sauf que quand pour illustrer un propos vous demander à un « petit » paysan combien il gagne, vous ne le demandez jamais à un « gros » paysan. Et une suggestion, demandez aussi au patron de la FNSEA combien il gagne. Cela illustrerait encore un peu plus les différences d’intérêt dans le monde agricole.
Et si vous pouviez faire référence au travail de Nicolas Legendre, de votre confrère « le monde » et de son travail « silence dans les champs ». Il ferait un bel invité.

Le traitement de l’actualité sur le mouvement des agriculteurs par la rédaction de France Inter me semble particulièrement biaisé. Très peu d’information approfondie sur les revenus des agriculteurs et leur dépendance aux aides publiques et européennes, aucune analyse de la situation par rapport aux autres pays européens, une très grande « compréhension » sur les mouvements d’entrave à la circulation et les dégradations de bâtiments publics etc. Beaucoup de reportages n’ont été que des micro-trottoirs au service des animateurs du mouvements et de la FNSEA.

Ce matin je suis juste entrée dans la cuisine lorsqu’un auditeur a témoigné (celui qui avait un bac agricole et environnemental) et ça m’a fait bondir ! Je suis très consciente des problèmes actuels de l’agriculture pour avoir côtoyé et observé ce milieu depuis des années en Auvergne. Je suis devenue une consommatrice bio depuis 1996. Mes principales questions à propose du témoignage : depuis quand le glyphosate que l’on met dans le sol pour désherber les cultures n’impacte-t-il pas les plantes qu’on veut protéger ? Comment se fait-il qu’on trouve des pesticides et autres produits chimiques dans la majorité des fruits et légumes de l’agriculture conventionnelle (voir dossiers Que choisir) et infiniment moins dans les produits Bio ? Pourquoi les abeilles disparaitraient elles si la plante et le pollen n’était pas modifiés par les traitements ? Et pour finir une remarque : le soja transgénique cette « saloperie » (comme il a dit) importée, au fait c’est pour qui ? N’est-ce pas pour nourrir le bétail des élevages intensifs dont les propriétaires sont en train de manifester… n’est-ce pas là un vraie ambiguïté ?

Je pense qu’il convient de ne pas mettre tous les producteurs de lait sur le même pied. J’habite dans la zone de production du comté. Je peux vous assurer que les producteurs de lait de mon village qui produisent uniquement du lait pour le comté sont beaucoup mieux rémunérés pour leur litre de lait que les petits producteurs hors zone AOP (comté, roquefort, Saint nectaire……). Il conviendrait peut-être de ne pas verser d’aides européennes à ces producteurs et privilégier les petits producteurs qui eux, ont réellement besoin de ces aides. Il me semble que ce sont les régions qui ont en charge le versement des aides de la PAC. Peut-être est-il nécessaire de mieux cibler le versement de celles-ci en direction des producteurs de lait qui sont réellement en difficulté.

L’agriculture nourrit la France : inexact !!!!
Pouvez-vous nous dire le pourcentage de la production de l’agriculture qui sert à la nourriture des Français ? Merci bravo pour vos émissions.

Je lis et écoute – forcément – beaucoup de reportages, sur France Culture et ailleurs, concernant la mobilisation des agriculteurs. La problématique (qui devient souvent un argument) de la nécessaire production de nourritures en grandes quantités revient assez souvent dans les débats. Or je trouve dommage que la question de la production de viande ne soit pas davantage remise en question. Ainsi que le rappellent plusieurs recherches de l’INRA, produire 1 tonnes de protéines animales en France nécessite, en gros, 7,5 tonnes de protéines végétales. Au-delà, il serait utile pour le débat public d’écouter des discussions sur cette question de la production alimentaire. De quelles quantités parlons-nous ? Quelles sont les gaspillages induits par l’agriculture industrielle ? (Bastamag a récemment publié un article sur les dizaines de milliers de tonnes de céréales jetés car contaminé au radium présent dans les engrais de synthèse). Est-ce que d’autres modèles ne seraient pas à la fois possibles et plus vertueux ? Par ailleurs, ne serait-il pas pertinent d’interroger un peu plus le rôle de la FNSEA dans cette « crise », dans la mesure où nous avons là un syndicat voulant représenter l’ensemble des agriculteurs et défendre les plus précaires, alors que son président se trouve à la tête d’Avril-Sofiproteol, mastodonte de l’agrobusiness. La FNSEA et M. Rousseau ont déjà montré qu’ils cherchaient à maintenir un certain statu quo, voire à renforcer un politique agricole qui, au nom de la productivité, permettrait de s’affranchir de la protection de l’environnement. Il me semblerait utile que ce genre de questionnements ne soit pas réservé aux auditeurices de La Terre au Carré. Un sujet pour d’autres émissions ?

Les revenus des agriculteurs révélés sur France Inter me paraissent surréalistes, je ne connais aucun agri qui gagne des sommes pareilles. A supposer que ce soit la réalité, un revenu de 100 ou 120 000€ annuel n’incite pas à manifester, mais plutôt à la grande vie non?
Je suis maraîcher en bio et vente directe depuis plus de 20 ans je raisonne mes heures de travail et mon revenu se situe autour de 20 000€/an (ma femme a un autre revenu) et je considère que je fais partie des privilégiés.

Vous désignez souvent la Nouvelle-Zélande comme se livrant à une concurrence déloyale contre nos produits, ce qui paraît difficile à comprendre, car ce pays est développé économiquement et socialement comme les pays européens. En quoi les normes écologiques et sociales y seraient moindres que chez nous, d’autant qu’étant aux antipodes, ces produits doivent être pénalisés par les coûts du transport, pour parvenir jusqu’à chez nous ? Sa situation paraît très différente de celle des pays américains. Merci de vos clarifications.