Je travaille pour une coopérative laitière du Grand Ouest, sur le terrain, auprès d’éleveurs de lait de vache.
Il est très vrai que les éleveurs laitiers travaillent beaucoup avec des astreintes bien plus importantes que d’autres secteurs agricoles à cause de la traite. Néanmoins, je n’entends jamais évoquer sur votre antenne un sujet pas du tout politiquement correct qui est la formation des agriculteurs.
Aujourd’hui, un éleveur peut s’installer sans avoir le bac. Il n’aura pas droit aux aides de l’Etat à l’installation mais il pourra s’installer (devenir exploitant). J’ai eu le cas sur mon secteur en 2020. Un jeune s’est installé dans un GAEC en ayant raté son bac agricole.
Ces exploitants brassent des centaines de milliers d’euros d’investissement sans formation exigée.
Les éleveurs qui connaissent leur prix de revient sont très peu nombreux. Si vous leur posez la question, ils vous répondent par la statistique nationale que sortent les grands cabinets comptables à même de faire des stats. Mais leurs propres chiffres : EBE, marge sur coût alimentaire, marge par UTA affecté à l’atelier laitier etc… très peu les connaissent.
Comment conduire son exploitation efficacement avec très peu de chiffres suivis ? Avec des chiffres issus seulement de la compta que les éleveurs ont 4 ou 5 mois après la fin de l’exercice ? Très très peu ont un suivi de leurs chiffres mensuellement.
Je constate que je n’ai jamais vu une exploitation conduite par des ingénieurs agricoles (il y en a) qui ne s’en sorte pas. J’en ai tiré ma propre conclusion que la question de la formation, la sensibilisation aux chiffres pendant le parcours de formation est un maillon faible du système.
Les éleveurs se plaignent mais on constate des écarts jusqu’à 100€/1000 litres payés selon les exploitations selon si les éleveurs n’ont pas ou ont beaucoup de pénalités sur la qualité du lait, et selon qu’ils sont peu ou beaucoup primés sur les taux de matière grasse et matière protéique. 100€/1000L d’écart. Il y a des éleveurs qui travaillent très bien et d’autres moins bien. Mais ça, c’est aussi politiquement incorrect de le dire.
Je suis agriculteur et suis surpris d’entendre certains de mes collègues présenter l’environnement en général et l’agro-écologie en particulier comme une contrainte, comme des normes insupportables.
Qu’il suffirait de les supprimer pour que tout aille mieux ou presque.
Je voudrais témoigner que plus nous appliquons les principes de l’agroécologie sur notre ferme, plus elle est prospère ! Que ce soit dans les champs, ou sur notre troupeau de vaches laitières avec les médecines naturelles qui donnent de formidables résultats, avec très peu de dépenses, en évitant les problèmes liés aux antibiotiques (délai d’attente, coût, antibiorésistance à terme…).
Tout cela nécessite de se former, mais est très enrichissant et rentable !
Merci pour vos supers émissions… bon en vrac, mes observations…
J’ai entendu ce matin à France Inter qu’il y avait 31.000 fonctionnaires au ministère de l’agriculture : donc, pour 390.000 fermes, cela fait 1 fonctionnaire pour 12 exploitations !! Cela laisse du temps pour créer et inventer des normes inutiles … et si on compare avec l’éducation nationale, 855.000 enseignants pour 12 millions d’élèves soit 1 enseignant pour 14 élèves : et on sait le boulot énorme qu’ils ont à faire pour enseigner. Cherchez l’erreur!!
Dans les trop grandes exploitations, tout est fait mécaniquement sur son siège de tracteur ; nourrir, pailler, semer, récolter… Mais oui ! Cela coûte plus cher de distribuer du foin avec un tracteur 100cv (fuel..) plutôt qu’avec une fourche à la main !! Et en plus c’est moins agréable plutôt que de parler à ses bêtes en les nourrissant et … sans bruit de moteur !!…
L’état ne donne pas de subventions au-dessous d’un certain plancher (par ex : nombre de bêtes = 50 brebis minimum) mais il n’y a pas de « plafond » ! Cela incite donc certains, déjà bien chargés en surface, en bêtes en emprunts et en boulot à racheter les fermes des voisins et encore plus d’autres matériels et donc s’endetter encore plus… mais cela ne pousse donc pas quelqu’un qui voudrait faire de la vente directe localement, à s’installer…
Il faudrait un enseignement minimum sur l’agriculture pour TOUS les élèves en secondaire, avant une orientation éventuelle en lycée agricole : car beaucoup de jeunes en ville, ne savent pas que c’est un métier ouvert à tous et pas qu’aux enfants des exploitants !!
Nous sommes à la retraite avec mon mari : éleveurs pendant 35 ans, installés sur 15 Ha, nous avions 60 chèvres, avec une salariée à 2/3 TP … Tout le lait (entre 35000 et 40000l de lait par an) transformé en fromages, vendus sur 4 marchés à moins de 30kms, et à la maison… et à la fin du remboursement de nos emprunts, (20 ans), nous touchions chacun le SMIC !
J’ai l’impression que plus l’exploitation est grosse, moins on gagne sa vie, trop dépendant de contraintes externes … Sans parler du plaisir à échanger avec les consommateurs !! et cela n’a pas de prix !
J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt votre 6/9 du week-end, et avec beaucoup d’émotion l’auditrice de la région de
Saint-Nectaire, productrice de lait pour la fabrication du fromage de Saint-Nectaire classé AOP qui témoignait de l’attitude de Lactalis -que j’estime aussi scandaleuse qu’inhumaine- qui avait annoncé du jour au lendemain que ses camions ne viendraient plus ramasser le lait parce que cela n’était plus rentable pour l’entreprise.
LA TRIBUNE AVRIL 2023 : Avec plus de 28 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022, le géant mondial du lait Lactalis a annoncé jeudi 20 avril avoir détrôné Danone du fauteuil de leader français de l’agroalimentaire.
Il se trouve que le Saint-Nectaire fermier est devenu mon fromage préféré depuis qu’un ami, enfant du pays devenu enseignant à Saint-Nazaire me rapporte régulièrement du Saint Nectaire fermier fabriqué par des artisans du cru)
Il se trouve aussi que dans les années 70, habitant la ville de Nantes, j’étais moniteur bénévole d’escalade et d’alpinisme, président de la section nantaise du Club Alpin Français (800 adhérents), vice-président national du Club Alpin Français (95 000 adhérents). Pendant 20 ans, j’ai gravi de nombreuses parois et sommets dans le massif des Alpes et des Pyrénées, en été comme en hiver avec le ski de randonnée, pour l’escalade et la randonnée pédestre. Comme je suis issu d’une famille bretonne originaire de la région d’Héric en Loire-Atlantique depuis 1652, enfant j’allais très souvent visiter les nombreux cousins pendant les week-ends. Riche de cette culture rurale et paysanne, en tant que moniteur, lorsque nous allions ascensionner les sommets, je sensibilisais les jeunes grimpeuses et grimpeurs ou randonneurs à la vie des habitants, montagnards paysans et bergers, notamment en leur faisant observer que les sentiers que nous empruntions pour nos loisirs avaient été construits par le travail des bergers et leurs troupeaux pour assurer leur subsistance.
En Vallée d’Aspe dans les Pyrénées, en chemin, je faisais une halte aux cabanes des bergers, pour un salut amical et pour assister à la fabrication magique des fromages dans les grands chaudrons. Ce faisant, les bergers nous disaient l’amour de leur dur métier mais aussi leurs difficultés. Ils nous ont raconté que dans les années 70, les entreprises laitières de la plaine près de Pau avaient, comme à Saint-Nectaire, cessé brutalement de ne plus ramasser leur lait parce que la circulation sur les routes étroites et sinueuses de leur montagne n’était pas rentable. En 1979, des paysans ont décidé de se rassembler pour créer un saloir collectif afin de réaliser l’affinage de leurs excellents fromages au lait cru (vache, brebis et mixte), fabriqués par 17 paysans à l’époque. Il m’arrivait de revenir à Nantes avec 100 kilos de fromage très odorant qui embaumait ma voiture pour les distribuer ou vendre aux amis aux fins d’en faire la promotion. Et aujourd’hui la coopérative des fromages basco-béarnais, regroupés sous l’appellation AOP OSSAU-IRATY regroupe 3 saloirs.