Traitement éditorial des obsèques d’Yvan Colonna, sondages et temps parole : Matthieu Mondoloni, le directeur adjoint de la rédaction de Franceinfo est au micro de le médiatrice des antennes Emmanuelle Daviet pour répondre aux auditeurs.

Emmanuelle Daviet : Des auditeurs n’ont pas compris la couverture éditoriale des obsèques d’Yvan Colonna et des tensions qui ont suivi. Je vous lis deux messages. « Je trouve insupportable la place donnée aux obsèques d’Yvan Colonna, terroriste condamné pour assassinat. Il est mis à l’honneur comme un héros et aujourd’hui, on nous donne comme choquant le fait que des CRS chantent une Marseillaise, notre hymne national, faut-il le rappeler, et fasse un barbecue le jour des obsèques. Pourquoi ? » Et puis un autre message « Chaque jour, je suis déconcerté par les informations concernant la Corse. Vous parlez d’une partie de la population qui sème le trouble et à qui vous donnez beaucoup d’importance. Je ne comprends pas la publicité que vous leur offrez. »
Matthieu Mondoloni, comment expliquez-vous la place accordée à cette actualité ?

Matthieu Mondoloni : Il y a plusieurs choses dans ce que je viens d’entendre. La première, c’est que je le répète à chaque fois : ce n’est pas nous qui donnons de l’importance et pas nous qui faisons d’Yvan Colonna un héros, etc. Nous, on se contente de suivre cette actualité et d’en rendre compte. Ce que j’entends dans la remarque des auditeurs, c’est l’ampleur que eux jugent démesurée de cette actualité. Il faut là aussi revenir sur les faits, c’est à dire qu’avant même ses funérailles, avant même ses obsèques, c’est devenu un fait politique puisque le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est rendu sur place, puisque le gouvernement s’est dit prêt à l’autonomie. Ce sont des avancées pour les nationalistes corses, très importantes, sur une île où, je crois que 58 ou 68 % de la population avait voté en faveur d’une autonomie il y a encore quelques années. Donc c’est un fait politique important et sur lequel il nous semblait essentiel d’être présent et de suivre. Même si, effectivement, ce ne sont que quelques centaines de jeunes ou moins jeunes qui ont été dans la rue, qui ont manifesté et qui ont pu affronter les forces de l’ordre. Ça reste quelque chose d’important dont il faut rendre compte.

Emmanuelle Daviet : On poursuit avec l’élection présidentielle. Cette semaine, nous sommes entrés dans la dernière période de la campagne qui oblige à une égalité parfaite des temps de parole entre tous les candidats. Des auditeurs s’interrogent sur ces contraintes et se demandent si vous parvenez à donner une exposition comparable à chacun des candidats et à quelles difficultés vous êtes confrontés en tant que chaîne d’information en continu.

Matthieu Mondoloni : C’est très compliqué. Je ne vais pas vous mentir. Effectivement, c’est la démocratie. C’est à dire que tous les candidats à l’élection présidentielle doivent bénéficier dans cette dernière quinzaine d’un temps égal sur notre antenne, et ce, par tranche. D’ailleurs, c’est à dire qu’il y a de 6 heures à 9 heures, il faut qu’ils aient tous la même exposition, de 9 heures à 18 heures, la même exposition de 18 heures à minuit également et de minuit à 6 heures. On boucle la boucle avec la directrice de la rédaction Estelle Cognacq, mais on s’y emploie quotidiennement. On a des petits tableaux. Il y a une entreprise qui est rémunérée d’ailleurs par Radio France, qui compte tout ça avec l’aide de Jean-Christophe Ogier. Et on a des rapports quotidiens pour savoir combien de minutes précisément on a fait en temps de parole. Ça, c’est quand un candidat ou son soutien s’exprime, mais aussi en temps d’antenne. Ça, c’est quand nous nous faisons notre travail de journaliste. D’ailleurs, c’est peut être un peu la chose nouvelle et très compliqué pour nous, c’est quand on fait un reportage, par exemple, sur un candidat, c’est compté en temps d’antenne. Tous doivent avoir la même durée d’exposition et ça, c’est un vrai casse tête, je vous le cache pas.

Emmanuelle Daviet : Donc, c’est la politique du chronomètre

Emmanuelle Daviet : On termine avec une question sur les sondages. Voici le message. « Je suis une auditrice assidue de Franceinfo et je trouve que les interviews sur les questions économiques, politiques et sociétales sont très intéressantes. Mais je viens d’entendre un reportage sur les sondages d’opinion sur la présidentielle et là, je suis décontenancée. Comment imaginer que 300 personnes reflètent l’opinion de tous les Français ? Pourquoi nous abreuver quotidiennement des résultats de ces sondages ? »
Matthieu Mondoloni, Quelle est la finalité de ce choix éditorial ?

Matthieu Mondoloni : Je ne sais pas à quoi fait allusion précisément cette auditrice. J’imagine qu’on a dû faire allusion à un sondage. Déjà, je rappelle que Franceinfo ne parle que du sondage qui est celui fait par Franceinfo. On ne parle pas des sondages des autres et c’est très important parce que c’est le même instrument de mesure depuis le début de cette campagne présidentielle. Ça remonte au mois de septembre, avec la nouvelle saison jusqu’à la fin et au second tour. Ensuite, pour ce qui est du sondage quotidien, ça, c’est autre chose. Effectivement, c’est quelque chose que nous avons commencé avec Ipsos, notre partenaire et Le Parisien Aujourd’hui en France depuis maintenant une quinzaine de jours. Donc, c’est ce qu’on appelle un « rolling », un sondage quotidien excusez moi pour l’anglicisme, et qui permet de mesurer plutôt une dynamique de campagne. Il n’est pas fait sur 300 personnes, il est fait sur 1 500 personnes. Je pense que c’est important de le préciser là aussi parce que c’est un échantillon beaucoup plus représentatif que 300 personnes. Et on ne prétend pas, et les sondeurs ne le prétendent pas non plus, que nous avons régulièrement à l’antenne, quand ils viennent expliquer un sondage, on ne le fait pas tous les jours, d’ailleurs, c’est que c’est un instant figé. C’est une photographie, un sondage. Ça ne veut pas dire que c’est ce qui va se passer au soir du premier tour. C’est une indication, un indicateur. Et ce sondage quotidien nous permet justement de voir cette dynamique de campagne. C’est à dire quel candidat est en train de progresser sur quinze jours, lequel est en train de perdre du terrain, lequel se stabilise, etc. Etc