À la veille des 60 ans des accords d’Evian qui ont scellé la fin de la guerre d’Algérie et marqué le début de son indépendance, le Téléphone sonne sur France Inter revient ce jeudi 17 mars sur cette partie de l’histoire franco-algérienne et sur la mémoire que nous en préservons, 60 ans plus tard. Des auditeurs témoignent ici :
Mon père a fait la guerre d’Algérie. Il en parle toujours. C’est une hantise pour lui, il avait 20 ans et a perdu tous ses copains du même âge. Il était très traumatisé lors qu’il est revenu de la guerre. Je suis née en juillet 1960 ma sœur 1958. Ma mère, comme il y avait des pubs pour partir au Canada a décidé de partir pour que mon père oublie la guerre. Il n’a pas oublié mais cela a fait de nous des exilées car lorsqu’on est revenues en France, ma sœur et moi étions des étrangères. En 1968, nous étions dans des bidonvilles en attente de logement et acceptées dans les écoles françaises comme des étrangères.
Je porte pour tout cela le poids de la guerre d’Algérie.
Je ne sais pas si mon témoignage rejoint votre sujet.
Je suis fille de pieds noirs. Mes parents sont nés, se sont mariés, ma sœur est née au Maroc. Mon père est mort à présent. Ils nous ont toujours parlé de l’arrachement vécu lorsqu’en 1962 ils ont pris le bateau avec sous le bras une valise et c’est tout. » une main devant, une main derrière » comme disait mon père… Ils ont gardé le chagrin de l’expatriation. Ils étaient français, mais ne connaissaient pas la France. Ils ont gardé aussi une incompréhension, et qui dit incompréhension, dit dérive raciste qui m’a toujours mise en colère. Mais comment ne pas comprendre leur sentiment d’injustice ? Moi, la fille, j’ai été bercée par leurs souvenirs d’école, de « chergui », d’odeurs de jasmin. Et ils ont voulu y retourner, avec nous, lorsque nous étions adolescentes. Ils n’ont rien retrouvé, ou si peu… que de larmes… aujourd’hui ma mère écrit ses mémoires, et le Maroc transpire de partout, comme une histoire d’amour. Je prends la mesure, depuis toujours de l’immense souffrance de ces petites gens, qui n’étaient pas des colons, juste des ouvriers à qui on n’a jamais rappelé que leur présence n’était que provisoire.
Je suis très troublée par cette émission.
Mon père est mort il y trois semaines. Il ne nous a laissé que des bribes de récit. C’est trop peu.
Il est parti à 20 ans en Algérie. Il était radio. Il a fait des missions certainement affreuses qu’il a toujours passées sous silence mais c’était un homme brisé de l’intérieur, devenu méfiant, un homme humilié. Personne n’a jamais pris en compte cette souffrance. Il n’a jamais guéri de cet effondrement psychologique. Je lui dois pourtant et mes frères et sœurs aussi une grande tolérance et la passion du respect pour l’Autre et la différence.
Sujet très tabou dans ma belle-famille. Mon mari a appris lundi soir par sa maman, les dates de leur présence en Algérie. Mon beau-père refuse de regarder les épisodes qui sont passés cette semaine et depuis toujours refuse de parler de sa vie en Algérie, il était dans l’infrastructure militaire. A l’opposé, mes parents plus âgés m’ont toujours partagé les anecdotes de leur vie durant la seconde guerre mondiale.
Mon grand-père n’a jamais voulu parler de la guerre d’Algérie… c’était une grande souffrance pour lui. Il était français. Quid de ce qu’il s’est vraiment passé pendant cette guerre ?
Mon père est médecin il a été envoyé en Algérie en 58 et refuse d’en parler même à nous ses enfants de 60 ans et nous pourrions comprendre sans juger
Je me permets de vous adresser mon témoignage ou plutôt celui de mes enfants qui ne comprennent pas leur programme d’histoire. Un temps infini sur les différentes dynasties, la monarchie, les guerres mondiales sont longuement abordées 3 fois durant les années de collège et de lycée.
Ma fille est en terminale ; à date, rien sur la guerre d’Algérie, sur la guerre d’Indochine, les guerres sur le continent africain … Tous ces sujets sont pourtant tellement importants pour comprendre le monde et se forger leurs propres opinions.
Merci pour vos émissions.
J’étais militaire appelé en Algérie de 1961 à 1962.
Je suis frappé de constater une similitude de réaction (ou d’absence de réaction !) des Français, entre cette guerre et celle d’Ukraine aujourd’hui.
Les préoccupations immédiates et locales priment sur les évènements plus lointains