La couverture de la réforme des retraites par les différentes rédactions de Radio France montre un parti-pris affligeant : le président de la République est un méchant qui méprise le peuple, la police est d’une brutalité aveugle et injustifiée… Il y a là une inacceptable dérive : si le journaliste doit être libre de porter le fer dans la plaie, il doit aussi veiller à équilibrer autant que faire se peut l’exposé de points de vue antagonistes, et il doit surtout veiller à ne pas se croire investi d’une mission salvatrice… Je vous écris pour vous faire part de notre affliction en tant que fidèles auditeurs de France Culture et France Inter, mais aussi de notre désespoir : notre conviction est que le prêt à penser mâtiné de bienpensance antilibérale l’a définitivement emporté sur la faculté de penser par soi-même.
Toujours aucun effort d’équilibre dans les commentaires, les interventions de tiers, très systématiquement biaisés contre la réforme. Quand cette conformité au cahier des charges sera-t-elle prise en compte dans le journal de France Culture ?
Toujours les opposants interviewés n’oublions pas qu’il y a 68.000.000 de Français. France Culture devient de plus en plus extrémiste.
Monsieur Erner, je vous écoute régulièrement depuis des années sur mon trajet en voiture entre 7h30 et 8h, de mon domicile à Begnins jusqu’à mon bureau à Chambésy en Suisse.
C’est la première fois que je ressens le besoin d’écrire à un acteur du monde médiatique. Je suis âgé de 62 ans.
Breton d’origine, je vis en Suisse depuis 38 ans pour des raisons professionnelles. Aussi, je ne suis pas l’actualité française régulièrement. Je dois admettre que lorsque le thème de votre émission du matin est la politique française, je vous abandonne souvent pour la RSR.
Bien que conscient des différences d’approche journalistique d’un pays à l’autre, il me semble cependant que la presse française – dans sa majorité – s’appauvrit qualitativement. A tel point que cela en devient – à mon sens – dommageable pour l’unité du pays.
L’hystérisation du débat sur l’âge légal de départ à la retraite en est un triste exemple. Entre les syndicats qui restent dans une logique de confrontation (gagner vs perdre), la personnalisation jusqu’à l’absurde (le Président Macron voudrait écraser la classe populaire…), les interviewers qui se prennent pour Fouquier-Tinville, etc…, personne n’a semblé vouloir rentrer dans le détail de cette loi, faire preuve de retenue, analyser froidement le texte. A part vous.
Bien que vos invités soient parfois ce que je surnomme des « Mamas » (Marxistes Masqués), vous êtes un rempart contre ce glissement vers cette médiocrité journalistique qui risque ni plus ni moins à terme de creuser la tombe de la démocratie en France. A force de tout critiquer, souvent sans argument concret, les journalistes infusent ce sentiment de défiance vis-à-vis des responsables élus. J’ai parfois l’impression que le journalisme français aujourd’hui consiste, lorsque l’Etat dit « blanc » d’aller glisser un micro sous le nez de quelqu’un – quelque-soit sa qualité – pourvu qu’il dise « noir ». Ce n’est pas bon. Le débat est essentiel, mais l’invective est néfaste.
Je suis sûr qu’il y a beaucoup de bons journalistes en France. Mais j’ai l’impression – comme pour le personnel politique du reste – que ce ne sont pas eux qui sont en première ligne. C’est bien dommage. Il faudrait beaucoup plus de Guillaume Erner.
Merci pour ce que vous faites.
Chers journalistes, je voulais juste depuis un certain temps maintenant, vous exprimer mon désenchantement (que je ne ressens que depuis quelques années) sur votre partialité vis à vis des actualités françaises. Un regard toujours orienté de la même façon idéologiquement sans ressentir le besoin de vous remettre en question vous-mêmes, et vos certitudes, sans aucune sensibilité dialectique, avec des interviews ou des débats qui déçoivent par leurs contenus prétentieusement partiels et partiaux orientés d’une façon univoque. Bref grande lassitude devant cet appauvrissement de la pensée. Heureusement je reste très fidèle à de grandes et belles émissions : celles qui parlent philosophie, littérature, histoire, actualités internationales, histoire, sciences… qui restent nombreuses et fréquentes à réjouir mon écoute ! Merci pour ces dernières.
Je vous remercie de me permettre de réagir aux critiques de certains auditeurs déplorant un quasi-unisson critique envers la réforme des retraites de la part des intervenants sur les antennes de Radio-France.
Classons les possibles expressions en 3 catégories d’auteurs si vous le voulez bien : les acteurs politiques, les simples citoyens et enfin les professionnels des médias et du commentaire social et politique.
Pour schématiquement évaluer la part de tribune offerte aux protagonistes des deux camps dans la catégorie « acteurs politiques », je me suis livré à un inventaire empirique des invités aux émissions idoines que j’écoute parfois sur Radio-France, et ce en remontant jusqu’à début mars.
Les invités de 8h20 de France Inter : 10 invités pro-réforme (Braun-Pivet, Séjourné, Véran, Béchu, Bourlanges, Véran, Retailleau, Oudéa-Castéra, Attal, Dussopt) , 9 anti-réforme (Glucksmann, Cazeneuve, Binet, Berger, De Courson, Ruffin, Le Pen, Berger, Bardella).
Les invités de 7h50 (Inter) : 5 invités pro-réforme (Roux de Bézieux, Lescure, Nunez, Marleix, Beaune) et 3 anti-réforme (Verzeletti, Mélenchon, Tondelier)
L’invité du 13h (Inter) : 1 invité pro-réforme (Doineau) et 2 anti-réforme (de Courson+Léon, Boyard)
L’invité des matins sur France Culture : aucun invité pro-réforme et 2 anti-réforme (Friot, Martinez).
Le téléphone sonne (Inter) : compte tenu du principe de l’émission, difficile de comptabiliser le temps de parole.
Je ne classe pas les émissions aux invités hors sujet ou multiples-bigarrés.
Je ne classe pas non plus l’intervention du chef de l’état qui présente un statut particulier et qui peut être classée dans chacun des deux camps suivant que l’on considère la nature ou le résultat de ses propos.
Tout imprécis que soit mon examen, on n’est pas loin d’un équilibre. Loin en tout cas d’un biais manifeste.
Sur l’opinion publique et les citoyens.
Tous les sondages de l’année indiquent qu’une large majorité est hostile à CETTE réforme et soutient la réaction des citoyens : 11/01, 16/01, 28/01, 02/02, …/…, 13/04 sur le RIP, 15/04.
Il est compréhensible qu’entendre de manière récurrente ces chiffres donne à penser aux auditeurs favorables à ce recul social que les individus annonçant ces sondages sont hostiles au gouvernement alors qu’ils donnent seulement une information. Faudrait-il interdire les sondages en période de réformes ? Ou rendre obligatoire la publication de sondages inverses ? Le flux d’information est souvent défavorable à cette réforme et peut paraître dès lors déséquilibré.
Les médias de la maison ronde ont bien plus recueilli et commenté les propos des opposants que celle des partisans ? Je crois bien que oui , même si je ne dispose d’aucune statistique. J’ai déjà entendu à l’antenne des auditeurs pro-réforme, mais bien moins nombreux il est vrai. Avouons qu’ils sont peu montés sur le ring. Très peu visibles. Il aurait fallu que les journalistes aillent les dénicher, alors que pour trouver un opposant, en outre bien plus disposé à s’épancher, il suffisait d’alpaguer le premier venu.
Dommage que les partisans n’aient pas organisé de contre-manifs comme lors de précédents débats de société. Cela leur aurait permis d’une part d’apporter un soutien clair et d’autre part d’avoir voix au chapitre. L’humain est ainsi fait qu’il est plus prompt à occuper l’espace pour critiquer que pour exprimer sa satisfaction.
Personnellement, je côtoie pas mal de monde dont une petite majorité est classable à gauche. Parmi tout mon entourage, pas un seul ne s’est exprimé en faveur de la réforme. Je suppose l’un d’entre eux favorable au texte mais il ne l’a jamais exprimé. Je sais de nombreux autres ouverts à une évolution « inéluctable » des conditions de retraite mais surtout pas à cette réforme-là. Un soutien au gouvernement que l’on peut qualifier de globalement transparent.
Abordons maintenant la catégorie au cœur de Radio-France : les journalistes, experts et commentateurs.
Là encore, impossible à mon niveau d’auditer les propos et de les ranger dans un camp mais force est de constater que la contestation, le trouble institutionnel et les désordres des récentes manifestations ont souvent nourri le débat. 12 épisodes du « téléphone sonne » sur ce sujet depuis début mars.
J’ai déjà indiqué que les manifs étaient le fait seul des opposants et que les rétifs étaient donc plus nombreux, plus visibles et bien plus loquaces. Et ceci chaque jour. Comment reprocher à une rédaction de rapporter ce qui fait actualité et sens ? Comment un commentateur peut-il discourir longuement d’une absence d’événement et d’expression de l’une des parties (je parle là des citoyens, pas des politiques) ?
Ceux qui appréhendent bien le hiatus qui a menacé ces dernières années de s’installer entre le peuple et les médias savent qu’il est stupide et dangereux pour ces derniers et moralement condamnable pour la démocratie de s’éloigner de la réalité sociale ou de filtrer l’info. À trop fragiliser les corps intermédiaires, on risque de se retrouver sans intermédiaire pour faire corps.
Les experts, professionnels patentés et autres commentateurs invités font leurs choux gras des analyses, prospectives, commentaires autour des événements sociaux. Mais finalement pas beaucoup plus que d’habitude. Par rapport à la centralité de l’événement dans la vie de millions de personnes pendant plusieurs mois, l’excès de commentaires et débats ne m’a pas sauté aux yeux.
J’entends ces experts depuis plus de quarante ans. Je n’ai pas relevé aujourd’hui de pic de subjectivité. La pluralité est visible. Parfois exaspérante mais toujours rassurante.
Concernant les conséquences politiques de la séquence, beaucoup s’accordent en effet à en prêter le bénéfice aux extrêmes (en particulier à l’extrême-droite). Pour ce qui est d’en attribuer les responsabilités, chacun les répartira selon ses analyses et sensibilité entre les initiateurs du projet, les opposants à celui-ci et les commentateurs. Il est certes confortable de cibler des porteurs de message ou des Galilée. Pandore innocente ?
Pour conclure cette trop longue missive, je me réjouis de ce que les partisans du texte (et de la méthode ?) ont enfin trouvé par la voix de cette trop exceptionnelle mais très utile médiation la caisse de résonance qui leur faisait défaut.