Musée-mémorial du terrorisme: « S’inscrire dans la mémoire longue, resituer les évènements dans l’Histoire »
Henry Rousso, historien, président de la mission préfigurative du Musée-mémorial du Terrorisme et François Molins, Procureur général près la Cour de Cassation, président de l’Observatoire d’Orientation du Groupement d’intérêt public Musée-mémorial du terrorisme étaient les invités de la matinale de France Inter ce jeudi 25 février 2021.
La première assemblée générale, réunion fondatrice, du Musée-mémorial du terrorisme se tient ce jeudi. Alors que son ouverture est envisagée en 2027, son lieu n’est pas encore tranché, ont assuré sur France Inter, Henry Rousso, historien et président de la mission pré-figurative du futur musée et, François Molins, procureur général près de la Cour de cassation, ancien procureur de Paris et président de l’observatoire du musée.
« Il y a une discussion sur le lieu, autour de Nice notamment, mais c’est un lieu qui se veut national, qui couvre un phénomène national, donc on a estimé que sa place était préférable dans la capitale, à Paris ou dans le Grand-Paris », a précisé Henry Rousso. « Ce que je peux dire c’est que la ville de Paris a manifesté son intérêt et on espère régler cette question prochainement », a-t-il ajouté. « Le plus rapidement possible », a surenchéri François Molins.
Selon l’ancien procureur de Paris, le Musée-mémorial du terrorisme a trois vocations : « d’abord répondre à un devoir de mémoire, ensuite répondre à un devoir d’empathie puisque les victimes sont victimes parce qu’à travers elles c’est l’État qui est visé, il faut donc restituer tout cela dans le parcours des gens mais aussi de façon générale dans des pans d’histoire. » Enfin, la troisième dimension, poursuit François Molins, c’est de faire de ce lieu « une raison d’être par rapport à ce qui pourrait advenir, ça doit être un lieu de pédagogie où on échange, on réfléchit, on réaffirme les valeurs de la société dans laquelle on vit et on essaie d’en faire un instrument de prévention pour, peut-être, éviter ou diminuer les effets de ce qui peut arriver demain. »
Pour Henry Rousso, « il faut trouver un moyen de parler de l’actualité autant que possible avec le même principe que pour le reste, offrir de la distance ». « Il y a un équilibre à trouver entre une émotion légitime, qui permet de mieux comprendre, et la limite qui serait le voyeurisme », prévient l’historien. « L’intérêt, c’est de tirer les choses vers le haut », a ajouté François Molins. « Ce n’est pas la dimension commémorative d’un évènement commis à telle heure, tel jour, à l’instant T, mais c’est quelque chose de beaucoup plus général qui doit transcender l’acte terrorisme en lui-même et renvoyer à un phénomène beaucoup plus général qui porte sur plusieurs dizaines d’années. »
Réactions des auditeurs :
Mieux vaut prévenir que guérir. Si on peut dépenser de l’argent, on ferait mieux de faire de la prévention, plutôt qu’un musée ! Des cours de tolérance et de « vivre ensemble », des services de « police de proximité » dans les quartiers sensibles, des clubs de sports orientés vers le jeunes défavorisés et encourageant l’esprit de groupe sont beaucoup plus nécessaires. Franchement, un musée ne va pas nous protéger du terrorisme… c’est une idée stupide : mettez cet argent dans l’enseignement !
Comment éviter le risque de brouillage entre l’action des terroristes islamistes et les musulmans de France qui dans leur grande majorité ne soutiennent pas ces actes. Ils en sont même victimes.
Ne serait-il pas beaucoup plus logique d’intituler ce projet « mémorial » ou observatoire ? La notion de musée paraît très contestable. L’institutionnalisation du phénomène n’est-elle pas abusive ?
J’ai rarement entendu des arguments aussi fumeux pour justifier ce musée. Vos intervenants n’ont fait que mettre en avant toutes les raisons pour ne pas créer un tel lieu. Sa création a-t-elle été confirmée ? Nous espérons vivement que non. Et permettez-moi de m’interroger sur cette tendance de décerner des médailles à des victimes comme s’il s’agissait de héros (je ne parle pas bien entendu de ces citoyens qui se sont distingués par leur action). Les fonds qui seraient destinés à ce « musée » seraient plus utiles s’ils étaient dédiés à des actions pédagogiques, préventives, ex. former les jeunes à l’esprit critique…
Une telle thématique représente une logique : mettre sur le même plan Terreur révolutionnaire qui a sauvé la nation et terreur blanche de la restauration. Vichy dénonçait les résistants comme des terroristes. Sans contenu, un tel thème fondé sur l’émotion peut être récupéré par n’importe quel apprenti dictateur. Un point de vue sur l’actualité sans recul de la science historique peut devenir un instrument de conditionnement idéologique.
Beaucoup d’articles de presse avaient parlé de la non-starification des terroristes pour éviter la mode de l’acte de terrorisme. Comment parler de terrorisme sans parler de terroristes ?
C’est une idée totalement morbide. Surtout ne pas donner le nom des terroristes pour ne pas leur faire d’écho et qu’ils soient vus comme victimes
Le terrorisme c’est affreux mais pourquoi pas un musée des violences faites aux femmes ? Un phénomène de société qui dure, bien ancrée dans nos sociétés, avec des mortes tous les ans et que l’on pourrait combattre. Et les morts sur la route (3 000/an) et les victimes des médicaments (13 000 morts par an) et les et les… Ça sent vraiment la récupération politicienne.
Qui détermine qui est terroriste ? Pour certains ce sont des terroristes mais pour d’autres ce sont des héros ou des martyres (Indochine, Algérie, Vietnam). Pendant la 2nde GM les résistants étaient des terroristes pour les allemands.
(avec l’Agence interne)