Du lancement de la proposition de loi « sécurité globale » à l’annonce de la réécriture « complète » de son article 24, le plus controversé, retour sur les étapes clés d’une crise politique majeure.
– « Protéger ceux qui protègent » –
Le 4 novembre 2020, les députés engagent en commission l’examen d’une proposition de loi sur la « sécurité globale » qui prévoit, notamment, de pénaliser l’usage « malveillant » d’images des forces de l’ordre.
Ce texte propose une batterie de mesures pour consolider les polices municipales et le secteur de la sécurité privée.
Il entend aussi dans son article 24 « prohibe(r) l’usage malveillant » de l’image « ou tout autre élément d’identification » des policiers et gendarmes en intervention. Un tel usage serait punissable d’un an de prison et 45.000 euros d’amende.
– « Risques considérables » –
Le 5, le Défenseur des droits alerte sur les « risques considérables » d’atteinte à la liberté d’informer et au droit à la vie privée soulevés par la proposition.
Le 9, les principaux syndicats de journalistes et la Ligue des droits de l’homme (LDH) dénoncent un texte qui va « restreindre le droit des journalistes et la liberté de la presse ».
– Examen et manifestations –
Le 17, les députés entament l’examen de la proposition à l’Assemblée. Des manifestations réunissent plusieurs milliers de personnes dans les grandes villes en France.
Des échauffourées éclatent à Paris à la fin d’un rassemblement. Un journaliste de France Télévisions est placé en garde à vue pendant 12 heures après avoir filmé avec son portable des interpellations.
– Amendement –
Le 20, les députés votent dans un climat tendu en faveur de l’article 24 après amendement par le gouvernement: la mesure ne peut porter « préjudice au droit d’informer », et l’intention malveillante contre les forces de l’ordre doit être « manifeste », est-il précisé.
– « Floutage de gueule » –
Le 21, une vingtaine de manifestations à l’appel notamment d’organisations de journalistes, réunissent 22.000 personnes en France, dont 7.000 à Paris. Parmi les slogans inscrits sur les pancartes: « Floutage de gueule ».
– Évacuation violente –
Dans ce contexte de débats autour des images de forces de l’ordre, la diffusion sur les réseaux sociaux de celles de l’évacuation violente, le 23 novembre à Paris, d’un camp de migrants suscite une vive émotion. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin reconnaît des « images choquantes » et annonce la saisie de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN).
– Feu vert –
Le 24, l’Assemblée nationale donne son feu vert avant passage au Sénat de la proposition de loi. Les jours suivants, plusieurs milliers de personnes se rassemblent à nouveau contre le texte.
L’idée de faire « réécrire » l’article 24 par une « commission » indépendante, avancée par le Premier ministre Jean Castex, provoque une levée de boucliers parlementaire et aggrave un peu plus la crise.
– Producteur noir passé à tabac –
Le 26, la diffusion sur les réseaux sociaux d’une vidéo montrant le tabassage à Paris par des policiers de Michel Zecler, un producteur de musique noir, suscite émoi et colère.
Gérald Darmanin reconnaît « des violences inacceptables ». Les quatre policiers sont mis en examen et deux d’entre eux écroués dans la nuit du 29 au 30 novembre.
Le président Emmanuel Macron dénonce sur Facebook « des images qui nous font honte » et demande au gouvernement des propositions rapides pour rétablir la confiance entre les Français et la police.
– « Marche des libertés » –
Le 28, une « marche des libertés » rassemble 133.000 à 500.000 personnes en France et est émaillée de violences contre les policiers. Lors de la manifestation parisienne, un collaborateur de l’AFP, le photographe syrien Ameer al-Halbi, est grièvement blessé. Une enquête est ouverte et confiée à l’IGPN.
– Réécriture –
Le 30, après une réunion de crise à l’Elysée autour d’Emmanuel Macron, les présidents des groupes parlementaires LREM, MoDem et Agir annoncent « la nouvelle écriture complète » de l’article controversé.
Christophe Castaner, patron des députés LREM, insiste sur le fait qu’il ne s’agit ni d’un retrait ni d’une suspension de l’article 24.
Avec AFP