France Inter est partenaire du documentaire « Noirs en France », signé Alain Mabanckou et Aurélia Perreau, diffusé ce 18 janvier sur France 2. Un téléphone sonne lui a été consacré. Les auditeurs ont réagi :
Le cadre : j’ai grandi en France avec un grand bonheur, j’ai deux masters dont un très spécifique. J’ai très jeune décidé de quitter la France quand j’ai compris que je devais me battre au-delà de mes compétences pour un élément de ma personne que je n’ai pas choisi, la couleur de ma peau. J’ai décidé de quitter la France quand j’ai très vite réalisé qu’il y avait des opportunités qui m’étaient proposées professionnellement à l’étranger qui étaient quasi inexistantes en France. À l’étranger je suis française, en France je suis française d’origine.
Je n’avais pas envie d’être militante. Et puis des racistes, il y en a certes de partout, mais quant à l’étranger, on me rétorque de façon parfois virulente que je suis étrangère je réponds avec un sourire (pas toujours) que « oui, je suis étrangère, vous avez raison, je suis française. » J’ai décidé de refuser d’être étrangère dans mon pays en partant vivre à l’étranger. Dommage, pour la France, j’y ai étudié, je suis diplômée, je parle quatre langues et c’est un pays étranger qui en profite. Il n’y a pas de racisme « ordinaire », mais il peut y avoir un racisme quotidien, le racisme ne peut à mon sens être qualifié d’ordinaire.
Nous vivons en Martinique, mes enfants sont au lycée, je suis « blanche », mon mari « noir », nos enfants métissés. Ils vivent ici depuis l’âge de 4 et 7 ans. Quand on les envoie en France, notamment en colonie ou camp d’ado, ils appréhendent toujours d’être les seuls noirs. Mon fils, qui est en terminale, stresse pour ses études supérieures en France également. Ils ont le sentiment d’être regardés bizarrement et interprètent tout comme du racisme. Je ne m’attendais pas à ce genre de difficulté pour cette génération.
Je suis maman de 4 garçons, eux sont nés à Paris, où nous habitons. Je suis blanche, mais cela, je ne l’ai pas choisi, hein, c’est la faute de mes parents. Je suis née en France, mais mes parents sont immigrés, ils viennent de l’Europe de l’Est. Mon père est arrivé en France et a vécu dans un foyer de travailleurs tous venus de quelques parts (Europe, Afrique ou plus loin…). Dans le bâtiment, il a baigné dans cette mixité avant notre naissance. Pour nous, c’est normal d’avoir des personnes de couleurs autour de nous. Et je suis heureuse qu’aujourd’hui des enfants aient des ami.e.s quelle que soit la couleur de leur peau ! L’amitié, c’est le principal ! Et au-delà, quelle que soit la couleur de notre peau, nous restons TOUS citoyen du monde. Merci pour votre émission et j’ai hâte de voir le reportage.
Merci pour ces échanges. Juste vous dire que pour savoir ce que cela fait d’être noir et d’entrer dans un endroit où il n’y a que des blancs… Eh bien, allez en Afrique noire et voir un match de foot dans un stade rempli de garçons noirs.
Être la seule femme blanche… Ça fait de l’expérience ! On relativise beaucoup par la suite ! Je suis heureuse d’avoir pu vivre cette expérience quand j’avais 23 ans ! Je suis enseignante et travaille uniquement avec des collègues des élèves issus de l’immigration…. Ce sont des familles tellement riches !
Je viens de voir le documentaire « Noir en France » que j’ai trouvée extrêmement touchant. Je tenais à témoigner : je suis une personne handicapée, blanche… Je trouve que l’on parle peu des discriminations sociales à l’encontre des personnes handicapées, pas assez… Notamment l’exclusion sociale, souvent très insidieuse… Rejetée souvent à cause de mon problème dans les loisirs, les soirées, dans une relation avec un homme, je suis souvent écartée… Pas parce que je ne peux pas, plutôt parce que j’ai l’impression ce que je subis dérange, on préfère ne pas m’inviter plutôt que de penser que je peux faire comme les autres, je ne sais plus comment faire contre ça. J’ai toujours eu cette impression de subir du racisme, d’être non noire mais bleue comme un macaron handicapé et je comprends ô combien ce qu’on put vivre ces personnes… Quand j’étais ado, je rêvais d’être noire, je les trouvais tellement belles, cette peau parfaite pour moi… Je rêverai d’un documentaire similaire sur « Handicapé en France »… Il y a beaucoup à dire ! Sinon, j’adore vos émissions, je vous écoute énormément.
À quand la prochaine émission “je suis jaune en France” ? Je suis laotienne adoptée en France à l’âge de 3 ans et pupille de la nation. Je ne sais pas faire cuire le riz, ce qui étonne beaucoup les gens vu mes origines… Je ne bois que du café et n’aime pas le thé, ce qui étonne les gens vu mes origines… À l’école on m’appelait “la chinetoque” d’un air méprisant. Un chinetoque, ce n’est pas franc, il faut s’en méfier. Adolescente, on m’appelait la « Thaïlandaise » d’un air lubrique, on me demandait si je faisais des massages privés. Aujourd’hui, on ne me dit que ce devait être drôle quand je récitais mes leçons petites : mes ancêtres les Gaulois. Etc. Etc.
Je suis blanche et j’ai grandi avec des noirs, des métisses, des arabes. Je ne connais pas, encore maintenant (j’ai une quarantaine d’années.), dans mon entourage de personnes ayant des a priori sur les noirs. Ça me choquerait énormément. Je me demande à quel point ces a priori concernent essentiellement les gens qui n’ont pas connu de mixité de population étant jeune…
Lorsque Joséphine Baker est entrée au Panthéon j’étais en larmes de fierté, personne ne m’a appris la qualité et le courage de cette personne… ni à l’école ni la radio rien aucune info… Que faire pour se battre contre les préjugés… ?
Je vous écoute et l’émotion m’envahit complètement, ça me renvoie que non je ne suis pas passée au-dessus de tout ce que ça me renvoie. Je suis une femme noire de 42 ans, j’ai la chance d’avoir la peau claire et je fais exprès de mettre ce mot chance car ça m’a aidé dans certaines situations où j’ai pu avoir du répit. Cependant, j’ai toujours vécu des moments de racisme direct et ordinaire, enfant ça me blessait profondément, adulte ça me révolte toujours autant. Lorsque l’on me dit que je suis la bienvenue car dans le public il y a des personnes noires, ça me renvoie à ma couleur de peau et pas à mes compétences. Lorsque l’on se permet de toucher mes cheveux, de me demander d’où je viens, je n’en peux plus ! Je suis très conforme comme parcours, j’essaye de tout faire bien mais lorsqu’un noir commet une infraction, je sais que l’on va me regarder au boulot comme si j’étais forcément concernée. Je précise que j’évolue professionnellement où principalement il n’y a que des blancs. C’est décousu comme récit mais mon émotion est vive. Je constate que les choses avancent dans la publicité, les films, les magazines. Ça me fait du bien mais les regards de certains me renvoient quand même à « on parle un peu de vous c’est bon lâchez-nous ». Vivement demain que ça avance encore ! ET NON je n’aime pas le SOLEIL !
Bonsoir France Inter, je voulais évoquer un ouvrage écrit par Gaston Kelman dont le titre est : « je suis noir et je n’aime pas le manioc. » Une phrase prise au hasard, mais qui en dit long : « il faut former les gens à savoir que « noir » ne veut pas dire éboueur ou vigile.
Poser la question : « d’où venez-vous ou bien quelles sont vos origines ? », n’est, en ce qui ne me concerne, pas motivé par une quelconque méfiance, mais une simple curiosité. En effet, peut-être que la personne que je rencontre vient d’un pays que je connais moi aussi ! Dans ce cas, j’ajoute : attention à la paranoïa ! Je précise : je suis blanc et ma femme est une très jolie Mozambicaine.
Je vous écoute, les débats sont très intéressants et en même temps certains propos m’énervent. Je suis femme (blanche) et en tant que femme, je vis de la discrimination professionnelle. Je n’ai nullement à m’investir pour favoriser la diversité, parce que je préfère batailler pour l’égalité hommes/femmes et la question de la diversité passe pour moi au second plan.
J’ai 33 ans. Je suis africain. Je suis congolais. Je suis né en Belgique. J’ai subi le racisme dès l’âge de 15 ans lorsqu’un professeur m’a dit que je n’avais pas le niveau pour finir à l’école secondaire. J’ai dû prouver 10 fois plus. Je suis un ingénieur avec un MBA. J’ai subi le racisme dans les écoles à travers des professeurs qui ne voulaient pas qu’un Africain fasse de grandes études. J’ai subi le racisme à la recherche d’emploi. Quand je me présente à l’entretien, je sens qu’ils ne veulent pas me donner le job même avec mes qualifications. Je me sens toujours mal à l’aise à l’entretien parce que je sens beaucoup de non-dits quand je le fais. Je suis critiqué si je laisse pousser mes cheveux. Je suis critiqué si je laisse pousser ma barbe. Je sens le racisme partout où je vais et je me sens toujours attaqué et je dois toujours me défendre contre tout. Le système est fait pour nous attaquer et on doit toujours se battre. La France parle beaucoup d’inclusions, mais n’applique pas l’inclusion. Il y a beaucoup de racisme. J’ai dû prouver 10 fois plus que les autres. Mais même avec ça, je suis encore attaqué. La France aime les Africains seulement lorsqu’ils frappent ou jouent au football. Il faut aussi aimer les Africains qui sont ingénieurs, docteurs, avocats et infirmières. C’est très important !