Conspiration, journalisme, trump, conspiracy watch

Les théories du complot reviennent en force en politique

Les théories du complot reviennent à nouveau dans le discours politique. Pour en parler, Rudy Reichstadt, directeur de l’observatoire Conspiracy Watch

 

 

 Cette manie d’accuser ses adversaires de complot est-elle récente ?

C’est quelque chose de très ancien. Depuis qu’il y a de la politique, il y a des complots et des mythes complotistes infondés et instrumentalisés politiquement. Cela permet de stigmatiser les opposants ou de jeter le doute sur des adversaires.

 

Trump, spécialiste des théories du complot ?

Les américains ont recensés plusieurs dizaines de théories du complot et de fausses nouvelles émises par Trump pendant la campagne présidentielle de 2016 aux Etats-Unis. Il nous a fait rentrer dans l’ère de l’indifférence entre le vrai et le faux. « Est vrai non pas ce qui est conforme au réel mais ce qui m’arrange. » Or, ce qui est assez étonnant, c’est que Trump est apprécié par son électorat pour tenir un langage de vérité.

La difficulté de dénoncer les contre-vérités

Ce sont le plus souvent des hommes politiques qui essaient de manipuler l’information. Ce qui est exaspérant, c’est que les journalistes enquêtent, vérifient, mais que certains auditeurs continuent de croire leurs fausses informations.

Malheureusement je ne pense pas qu’il y ai une frontière si étanche entre le journalisme professionnel, fiable et sourcé et les médias alternatifs. Il peut y avoir des erreurs même dans les journaux les plus classiques. Dans l’arène politique, on a tendance à instrumentaliser les idées complotistes et les journalistes sont effectivement mis à mal par les théories du complot. Mais certains journalistes outrepassent ce qui est leur fonction en se prenant pour des justiciers ou des propagandistes. Le journaliste a pour mission de rapporter les faits et non de donner son avis.

Les moins diplômés et les extrêmes, comme la France insoumise ou le Front national sont-ils les plus touchés par les fausses informations et les théories du complot ?

Il faut nuancer car les complotistes endurcis, c’est à dire les 25% des français qui croient en 5 ou plus des théories proposées, sont sur-représentés dans les électeurs de Jean-Luc Mélenchon et Marine Lepen. Ca ne veut pas dire que tout leur électorat est concerné. Ce sondage ne fait que confirmer des informations que nous avions déjà grâce à d’autres études.

 

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Les théories du complot les plus populaires

En 2017 ce sont celles d’ordre géopolitique (exemple ce qui se passe au Venezuela est un complot de la CIA) ou en matière de santé (la vaccination par exemple).

L’exemple de la vaccination

55% des français sont prêts à croire qu’il y a une collusion politico-industrielle pour cacher aux citoyens la nocivité. Cette croyance a un impact direct sur la santé publiqeu puisque ça conduit des gens à ne pas se faire vacciner. De ce fait on assiste à la réapparition de maladies telles que la rougeole.

complotisme-endurci

attentat, Trèves, anonymisation, homéopathie

L’attentat de Trèbes et l’homéopathie : les auditeurs réagissent

L’attentat de Trèbes, mais aussi l’homéopathie, deux sujets totalement différents, mais qui ont suscité une avalanche de réactions, de questions… Pour en parler au micro du médiateur, Jean-Philippe Deniau, chef du service Police-Justice de France Inter, et Jean-Claude Ameisen, producteur de l’émission « Sur les épaules de Darwin ».

 

 

 

 

Anonymisation 

Les auditeurs ont beaucoup commenté et réagi à l’attentat commis il y a une semaine. Ce qui revient le plus souvent – comme à chaque attentat – est la question du nom du terroriste. Il y a ceux qui voudraient l’anonymisation complète et ceux, plus nombreux, comme Isabelle, qui nous disent : « Je comprends très bien votre traitement de l’attaque terroriste. En revanche, je n’admets pas que le nom du terroriste soit prononcé en permanence, et même parfois plusieurs fois dans une même phrase ». Et Hubert ajoute : « Lors de l’hommage national, le Chef de l’État demande que le nom du terroriste soit ignoré, et juste après, le présentateur du journal ne cesse de le prononcer ».
C’est utile, cette répétition du nom ?

La vraie question est : faut-il ignorer le nom de l’auteur d’un attentat ? Cela ne fait pas l’unanimité au sein de l’exécutif, car si les journalistes ont connu le nom du terroriste de Carcassonne dès vendredi après-midi,  c’est grâce à Gérard Colomb, le ministre de l’Intérieur, le premier à l’avoir révélé.

Après l’attentat de Nice et les centaines de messages reçus par le médiateur, les rédactions des différentes chaines de Radio France avaient adopté une charte, refusant, entre autres, l’anonymisation des terroristes.

La rédaction s’est beaucoup questionnée à l’époque, car révéler le nom d’un terroriste, c’est lui donner une gloire posthume. Mais la question essentielle est: pourquoi ne pas donner une information que l’on détient ? Cela peut-il  changer la perception que le grand public peut avoir de l’horreur des faits qui ont été commis ? Comment rendre compte du procès sans prononcer le nom de Mohamed Merah? A partir de là, ne faudrait-il pas, dans ce cas, anonymiser tous les auteurs de crimes ?
La position à Radio France, c’est de ne pas renoncer à publier le nom des terroristes, l’inverse serait une censure, dont on ne mesurerait pas les conséquences… Notamment, avec le risque de développement du complotisme…

Un autre point a choqué un certain nombre d’auditeurs : «Vous ayez fourni, disent-ils, des informations utiles pour les prochains terroristes ». Mathilde, par exemple, dit : « Je suis effarée de l’inconscience quasi criminelle des journalistes. Ils expliquent que le malheureux gendarme avait laissé son portable allumé pour guider ses collègues ». Précisons que France Inter n’est pas le seul média à avoir donné cette information. Mais peut-on se dire que, désormais, les terroristes savent qu’il faut détruire tous les téléphones portables d’otages?

C’est encore grâce au ministre de l’Intérieur Gérard Colomb que cette information a été donnée.

Les informations proviennent de nombreuses sources qui vont du témoin à l’enquêteur. Mais on retient une information tant qu’elle n’est pas vérifiée.

L’homéopathie: les pour et les contre ?

L’éditorial de Mathieu Vidard, puis le Téléphone sonne consacrés à l’homéopathie ont déclenché une vague considérable de réactions. Tout cela après la tribune publiée dans le Figaro par 124 professionnels de santé demandant l’exclusion des médecines alternatives du champ médical.

Peut-on encore parler de tels sujets sereinement et scientifiquement ? Pour y répondre, Jean-Claude Ameisen producteur de l’émission « Sur les épaules de Darwin » et médecin, chercheur et président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique.

Mathieu Vidard a estimé dans son « Edito au carré » du 20 mars dernier, que l’homéopathie pouvait quand même apporter des bienfaits, tout en précisant qu’aucune étude scientifique n’a prouvé une quelconque efficacité.

Une analyse objective ?

Il faut parler de tels sujets sereinement et scientifiquement et humainement. Aucune étude scientifique n’a prouvé l’efficacité des produits homéopathiques en tant que tel, elles ont montré l’efficacité de l’effet placebo. Car lorsque le médecin a confiance, le corps trouve le moyen de soulager sans les effets secondaires des médicaments. (des études américaines l’ont prouvé). Cela aide le corps et la personne à se sentir mieux. Il est évident que cela marche pour des troubles psychosomatiques, des troubles fonctionnels, pour certaines douleurs, mais pas pour des maladies graves.  Il ne faut pas se soigner tout seul !

Il ne faut pas non plus parler de médecine douce alternative, mais de médecine complémentaire. C’est un soin qui est donné à la place de ou en plus…
La médecine ne consiste pas seulement à prescrire. Cela nous dit quelque chose de ce manque dans la médecine classique.
Le Comité Consultatif National d’éthique a travaillé sur le déficit d’accès aux soins palliatifs, la prise en compte de la personne.

 

 

 

De nombreux auditeurs et patients croient plus ce qu’ils ont lu sur des sites peu sérieux et sur les réseaux sociaux que ce que leur disent les professionnels de santé ou les journalistes spécialisés…C’est le cas pour les « anti-vaccins ». Leur principal reproche : « Vous soutenez les lobbys pharmaceutiques ». Il est vrai que des laboratoires pharmaceutiques sont à l’origine de scandales et ont entamé une forme de confiance.

C’est pourtant une question de santé publique. Apprendre au corps à lutter lui-même contre les microbes, c’est de la prévention. Dans notre pays, 95 % du budget de la santé publique est consacré à la réparation et 5 % à la prévention des maladies. On n’a pas de culture de prévention. On sait que les vaccins sont efficaces (exemples de la mortalité infantile dans les pays pauvres). Un vaccin protège différemment. Un vaccin antitétanique protège la personne et pas les autres, contrairement au vaccin contre la rougeole qui protège également les autres. En matière de vaccin, on est resté dans une médecine du 19ème siècle et non dans une médecine du dialogue et d’information.

 

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La certification des savoirs et des connaissances

Quand on évoque les théories du complot, les fausses informations, on pense immédiatement à la politique. Or, la politique n’est pas le seul domaine d’information à être gangrené par ces fameuses « fake news » : la science également. France Culture et franceinfo se sont associées pour lancer un programme de certification des savoirs et des connaissances. Nicolas Martin, le producteur de « La méthode scientifique », en est le maître d’œuvre.

Nombre d’auditeurs, après diffusion d’un sujet scientifique, écrivent pour contester ce qui a été dit en s’appuyant sur des arguments puisés sur internet ou les réseaux sociaux…

 

Comment allez-vous vous y prendre pour certifier les informations ?

Sur la forme : grâce à différents formats de diffusion, radiophoniques (10 minutes environ), « podcastables », diffusés ensuite sur la grille d’été de France Culture et sur la grille de franceinfo et via les réseaux sociaux. C’est sur ces réseaux sociaux que circulent le plus les fausses informations. (+ 70% de diffusion des fausses informations sur ces canaux). Une vidéo de 3 ou 4 mn sera diffusée via ces réseaux.

Sur le fond : la question de la vérité en sciences est une vaste question. « La vérité est une erreur rectifiée », disait Bachelard. Il n’y a pas une vérité scientifique. La science permet d’attester un certain nombre de questions. Il faut distinguer les « fake news » des idées reçues, des théories du complot.

NOUVEAUTE ! « Les idées claires » : une démarche engagée

Des exemples …

Le créationnisme, c’est dire qu’il n’y a pas eu de préhistoire, de théorie de l’évolution… Pourquoi parle-t-on de « théorie de l’évolution », car c’est ainsi que Darwin l’a formulée?  En fait, c’est une des théories les plus sûres que la science ait pu produire.

Comment trancher à propos des neurosciences ?

Ce 26 mars, dans la Grande Table, à propos des neurosciences, un psychologue, a été très agacé qu’elles soient « présentées, écrit-il, uniquement comme le fruit d’une idéologie capitaliste, alors qu’il s’agit d’une science poppérienne ». La vision poppérienne préconise le doute scientifique et la recherche des erreurs (la science est réfutable).

La science est vraie jusqu’à la preuve du contraire. On distingue la science de la méthaphysique qui est, elle, indiscutable.
On va se demander par exemple : quel est le consensus scientifique autour des pseudosciences ? Que dit la science à propos des méthodes d’apprentissage ?

 

Sur les sujets clivants, comment certifier les connaissances ?

Quand on voit la virulence des messages reçus d’auditeurs anti-vaccins, persuadés des dangers de la vaccination parce qu’ils ont lu de fausses informations sur internet, il semble difficile de leur conseiller de plutôt lire des informations validées et vérifiées.

La plupart du temps, les producteurs ou journalistes vont donner la parole à des chercheurs qui n’ont pas de conflits d’intérêt avec le privé. Il n’y a pas une vérité, mais des vérités. Il y a toujours un panel de réponses qu’apporte la science pour expliquer le réel.

La cellule investigation de franceinfo et sa mise en cause par Jean-Luc Mélenchon : explications

L’enquête sur les comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon a suscité un certain nombre de réactions, à commencer par le principal intéressé. Il s’en est pris violemment aux journalistes en général, à franceinfo et à la cellule Investigations de Radio France, traitée d’ « équipe de bras cassés ». Sylvain Tronchet, qui fait partie de cette équipe, est au micro du Médiateur des antennes.

L’enquête

Des auditeurs, comme Jean-Marc, nous écrivent : « Pourquoi reprendre les mêmes insinuations que le journal Le Monde ? ».

Plusieurs médias ont travaillé sur ce dossier. Nous avons apporté des éléments supplémentaires d’enquête, cela fait plusieurs mois que nous travaillons sur cette enquête. Nous avions notre calendrier qui n’était pas nécessairement le même que celui du journal Le Monde.
L’enquête nous a menés à Médiascop, la société de la directrice de communication de Jean-Luc Mélenchon: quelles sont les relations entre Jean-Luc Mélenchon, son mouvement, sa campagne, et cette structure ?

Des journalistes manipulés ?

Pour André, un autre auditeur : « Vous n’avez qu’une seule source à charge : celle d’un ancien directeur de cabinet d’un ministre socialiste qui veut régler des comptes ».

Il y a de nombreuses informations qui ne proviennent pas de la Commission Nationale des Comptes de campagne. Pour plus d’information, l’enquête à retrouver sur le site de franceinfo

Albert, lui, estime suspect le fait que « vos « informations » mettant en cause la France Insoumise soient données le jour où le magazine Marianne nous apprend que certains versements excessifs sur le compte de campagne de Macron ont été signalés à la justice ».

C’est une enquête qui s’est déroulée sur un temps long. L’information, donnée par Marianne, n’était pas connue de la cellule Investigations de Radio France.

Dans son blog, Jean-Luc Mélenchon affirme que votre enquête est une commande politique. Sous-entendu : on vous aurait demandé d’enquêter sur lui et vous n’auriez pas pu refuser…

C’est faux. Un exemple : la dernière grande enquête effectuée par la cellule Investigations, l’affaire dite « des assistants parlementaires » du Modem. Elle a conduit à la démission du gouvernement Macron de 3 ministres : François Bayrou, Marielle de Sarnez et Sylvie Goulard. Comment imaginer que nous ne faisons pas notre travail d’une manière totalement indépendante?

 

hulot, ebdo, france culture

« Affaire Hulot » : information ou rumeur ?

S’agit-il d’une information, d’une rumeur, d’une affaire ? Les accusations du nouveau magazine « Ebdo » contre Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, font beaucoup réagir les auditeurs. Frédéric Barreyre, directeur de la rédaction de France Culture, leur répond. Le traitement de cette actualité provoque critiques ou questions. « Pourquoi, nous écrit Jeanne, vous êtes-vous tous – même… Lire la suite

Fausses infos, éducation aux médias et « Affaires sensibles »

Les fausses informations, la crédibilité des journalistes, l’éducation aux médias…

Beaucoup de questions que les auditeurs posent au Médiateur. Pour y répondre Emmanuelle Daviet,  déléguée de France Inter à l’éducation aux médias, à l’égalité des chances et à la diversité.
A écoutez tous les dimanches matin à 6h23 dans la chronique Interclass’

Les questions des auditeurs concernant les fausses informations

Emmanuel Macron y tient beaucoup : il veut une loi contre les fameux « fake news ». Des auditeurs, plutôt « militants », s’en réjouissent, mais à contre-sens, argumentant justement sur de fausses informations. Pour Germain, « au moins, vous serez obligés d’arrêter tous vos mensonges sur Trump ». Ou Adeline, « enfin, vous ne pourrez plus mentir sur les bienfaits des vaccins ». En fait, tout cela ne concerne pas les journalistes professionnels… Un journaliste digne de ce nom ne publie ou ne diffuse aucune information qui ne soit pas vérifiée ; donc, une information juste. Une erreur peut évidemment se produire, mais elle est rapidement corrigée.

Un renforcement de l’éducation aux médias

Comment arrivez-vous à montrer, par exemple, que les journalistes, eux, sont exigeants avec l’information ?  À l’inverse, les réseaux sociaux ou internet diffusent des informations souvent attirantes, mais très souvent fausses, non vérifiées, voire malveillantes et qui ont une influence néfaste sur de nombreux collégiens ou lycéens ?

Cette influence néfaste est surtout constatée par les enseignants et sociologues qui ont tiré la sonnette d’alarme pendant 15 ans, sans être entendus. Il a fallu l’Hyper cacher et Charlie Hebdo… pour se rendre compte que des jeunes remettaient en cause des faits et relataient une toute autre lecture du monde grâce aux thèses conspirationnistes. Cette génération construit son rapport au monde sur des bases fondées sur la manipulation. La principale source d’informations, ce sont les réseaux sociaux, car ces jeunes n’ont pas souvent les clefs pour décrypter une information.

Ce qui plaide pour un renforcement de l’éducation aux médias, comme le souhaitent 7 Français sur 10, selon l’enquête de La CroixC’est d’ailleurs ce qu’Emmanuelle Daviet a lancé il y a trois ans avec l’opération Interclass’. De quoi s’agit-il ?

Opération lancée après les attentats de janvier 2015 par la volonté de la directrice de France Inter, Laurence Bloch, pour une action citoyenne en créant des classes médias. Ce dispositif engage une partie des journalistes et producteurs de France Inter, en suivant pendant une année une classe. 800 personnes ont déjà participé depuis le début à Interclass.
« Bien informés, les hommes deviennent des citoyens,  mal informés, ils deviennent des sujets », disait Alfred Sauvy.
Grâce à Interclass, on apprend aux jeunes à développer leur esprit critique. On leur fait faire du reportage, on les confronte au terrain.
Pour les enseignants qui souhaitent développer ces classes médias, il faut se rapprocher du CLEMI.

 

Fabrice Drouelle. produit chaque jour à 15h « Affaires sensibles », l’émission qui revient sur de grands événements des 50 dernières années

Les auditeurs en redemandent, à tel point que certains, comme Joris, s’étonnent des rediffusions : « Pourquoi rediffusez-vous des émissions anciennes ? Cela n’apporte rien ».
Autre remarque d’auditeurs, comme Bénédicte : « Vos sujets soulèvent souvent des questions, des polémiques ; or, vous ne recevez qu’un seul invité. Donc une seule opinion… Pourquoi ne pas organiser de débats ? ».

La règle : une rediffusion par semaine pour apporter un nouveau regard sur une affaire déjà traitée. L’idée est de générer du débat et non de la cacophonie.

Le choix des sujets :  qu’est-ce qui fait une bonne émission ?

Une bonne « histoire » qui a des résonances sur l’actualité. Exemple : le Larzac a des résonances avec Notre Dame des Landes.

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L’agence franceinfo et la vérification des faits

Emmanuel Macron l’a annoncé : il y aura une loi pour bloquer les fausses informations, principalement pendant les campagnes électorales. Les auditeurs font le lien entre journalistes et « fake-news »; or, le principe de ce métier est justement de vérifier une information avant de la donner. Pour en parler, Estelle Cognacq, directrice de l’Agence franceinfo, au micro du Médiateur.

Les fausses informations sont-elles propagées par des groupes idéologiques tel que Trump, Daesh ou les anti-vaccins ? La faute aux réseaux sociaux ?

Les réseaux sociaux ont amplifié ce phénomène. Selon l’étude IFOP (commandée par Conspiracy Watch et la Fondation Jean-Jaurès) , 79% des Français croient à au moins une théorie du complot. Auparavant, elles circulaient dans le cercle familial ou au « Café du commerce », les réseaux sociaux leur donne une ampleur considérable. Et ce phénomène est deux fois plus important chez les jeunes. On retrouve les mêmes thématiques dans les « fake-news ».

L’Agence franceinfo est au cœur de la vérification de l’information. Vous ne faites confiance à personne ?

Nous faisons confiance à tout l’univers Radio France et France Télévisions. Nous partageons un même document qui qualifie notre rapport aux autres médias et aux sources d’informations, en fonction de la crédibilité à accorder. Nous assumons des erreurs possibles (cela peut arriver), mais les nôtres uniquement. Nous revérifions systématiquement les informations lorsque les sources ne sont pas clairement identifiées.

Franceinfo se doit d’être exemplaire. Comment fonctionne cette agence interne ?

Elle est organisée comme une chaîne d’information en continu : 7 jours sur 7 et quasiment 24 heures sur 24 avec des gens qui font de la veille concurrentielle, qui réceptionnent les informations des journalistes de Radio France. L’info est vérifiée, puis l’agence écrit une dépêche adressée à tout franceinfo, ainsi qu’aux autres rédactions du groupe, à celle de franceinfo télévision et aux équipes web.

En deux ans d’expérience, l’agence a-t-elle permis d’éviter des erreurs ? Et a-t-elle changé certains réflexes professionnels ?

Nous avons repéré des erreurs ou défauts d’informations qui nous ont permis d’éviter de relayer des informations fausses.
Les réflexes ont également changé: nous sommes prêts à retarder la diffusion d’une information, même si elle est déjà transmise par la concurrence; nous voulons être sûrs de ne pas nous tromper. Mais il est parfois difficile pour les journalistes d’attendre avant de publier ou de diffuser une nouvelle information. Cependant, certains journalistes se sentent rassurés par cette vérification. De plus, nos informations sont harmonisées sur l’ensemble de nos chaînes.

 

Finkielkraut, Ruffin, France Culture

Retour sur les propos d’Alain Finkielkraut

Dernier rendez-vous du médiateur de l’année avec la directrice de l’antenne, Sandrine Treiner. Pour l’occasion, elle répond aux réactions des auditeurs suite aux propos d’Alain Finkielkraut … Et annonce le nouveau projet culturel de la chaîne.

Alain Finkielkraut : doit-on avoir des producteurs de tous bords ?

Un producteur très décrié par message et sur twitter, Alain Finkielkraut, notamment suite à son commentaire sur l’hommage à Johnny Halliday : « Le petit peuple blanc est descendu dans la rue, les non-souchiens brillaient par leur absence ». Ces propos ont été tenus sur RCJ mais le philosophe est aussi producteur de Répliques sur France Culture. Ces propos sont considérés racistes par de nombreux auditeurs.

Que répondre à tous ces auditeurs choqués ?

Je sais qu’il y a beaucoup d’émotions tant du fait qu’il soit à l’antenne que de la peur qu’il en soit écarté. Exclure quelqu’un est une décision très grave et donc tout à fait exceptionnelle. Elle devrait être parfaitement argumentée.
Les réseaux sociaux ne seraient être les arbitres des bonnes mœurs ni des bonnes pensées.
En l’occurrence après cette émission, j’ai vu Alain Finkielkraut. Il m’a convaincu qu’il ne s’agissait pas d’une forme de racisme mais que l’expression était utilisée par lui au second degré. Il s’est expliqué durant 30 minutes la semaine suivante, dimanche 17 janvier, sur RCJ.
Le pluralisme c’est également faire entendre des avis contraires. Je fais confiance à la capacité des auditeurs pour juger de cela.

Alain Finkielkraut est régulièrement au centre de polémiques, notamment autour de l’immigration et de la religion musulmane… Mais pour cette autre auditrice, Géraldine : « Alain Finkielkraut a le mérite de lancer des débats. Tout doit pouvoir se discuter et ouvrir la contradiction ».

Doit-on laisser la parole à des producteurs de tous bords ?

Oui, mais je reviendrais sur ce « tout ». Il y a deux conditions : le respect de la loi sur la liberté d’expressions et du respect des valeurs du service public.

Un projet culturel entre France Télévisions et France Culture ?

Dans un autre domaine, plusieurs auditeurs, comme Cédric, voudraient en savoir plus sur des projets annoncés pour France Culture : « On entend parler d’un projet culturel entre France Télévisions et France Culture. De quoi s’agit-il exactement ? », demande-t-il.

Il s’agit plus généralement de l’ensemble des partenaires de l’audiovisuel public (également France Média Monde et l’INA).
Nous préparons un label culturel commun surtout sur les réseaux sociaux. Il s’agit de valoriser nos contenus et nos antennes dont France Culture. Ce seront des contenus 100% vidéo. L’objectif est de s’ouvrir à de nouveaux publics.

Pourquoi cette diversité ?

Une étude vient de tomber : l’audience de France Culture c’est 19% d’écoute via les supports numériques. Nous ne touchons pas encore assez ceux que nous voudrions toucher. Plus jeunes et plus diversifiés.

France Culture devient un véritable média global, avec un succès croissant.

Ecoutez Sandrine Treiner en parler plus longuement ce 7 décembre dans les Matins explicitant le média global à l’occasion de la sortie du nouveau numéro de Papiers>>>

 

 

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Comptage des manifestants : fin des chiffres fantaisistes ?

Selon la police, 8 000 manifestants lors du dernier défilé contre les réformes « Macron ». 40 000, selon la CGT, cinq fois plus. Même écart lors du rassemblement Fillon au Trocadéro en mars dernier. 200 000 participants selon François Fillon ; pourtant, l’endroit ne peut accueillir que 40 000 personnes. Que faire pour approcher la vérité des chiffres que réclament les auditeurs ? Réponse avec Erik Kervellec, directeur de la rédaction de franceinfo.

 

Une nouvelle alternative ?

Les chiffres transmis par les organisateurs de manifestations sont de plus en plus fantaisistes et ne correspondent à aucune réalité. De nouvelles technologies tentent de répondre à ce problème :

« Oui ! Aujourd’hui, la presse frise le ridicule en affichant ces deux chiffres, ceux de la police et ceux des organisateurs des manifestations, ce qui entame notre crédibilité. Les représentants de la plupart des médias nationaux, dont Radio France, se sont réunis à l’initiative de Jean-Marc Four, directeur de rédaction de France Inter, avec une question simple :

Quelle alternative pour que les médias gardent leur crédibilité et proposent des chiffres justes aux auditeurs ?

« Nous avons décidé de faire appel à une société de comptage de foule. C’est un savoir faire déjà utilisé dans le monde de l’entreprise. Elle utilise un système de capteurs numériques dissimulés sur le passage d’une manifestation. Il s’agit pour nous d’avoir des chiffres justes afin de savoir si oui ou non il y a eu une mobilisation pour telle ou telle manifestation. »

Des auditeurs ont déjà réagi en mettant en doute l’honnêteté d’une société privée et le fait d’ « oublier » de compter les manifestants sur le trottoir.

Il faut évidemment s’assurer que ce nouveau « thermomètre » présente toutes les garanties de sérieux et d’indépendance.

« Il faut vérifier que la société ne soit pas instrumentalisée. C’est ce qui est en train d’être fait.
Concernant les manifestants sur les trottoirs, le problème est inverse, puisque le système compte toute les personnes, y compris les éventuels passants. Donc il y a une marge d’erreur que l’on tente de corriger par une sorte de pondération. »

On peut rapprocher cela de calculs ponctuels menés il y a déjà quelques temps par des médias, des universitaires et des spécialistes indépendants. Les chiffres des syndicats ou des politiques étaient apparus totalement faux. Cela va permettre aussi de crédibiliser un peu plus les médias sérieux et professionnels face aux fausses informations qui circulent de plus en plus. Quand allez-vous mettre en place ce nouveau mode de comptage ?

« Nous avons déjà testé ce système sur trois manifestations. 

Pour la dernière mobilisation : 8 000 personnes selon la police, 40 000 selon la CGT. Notre comptage par capteurs a relevé 8 250 manifestants.

La prise en compte systématique de ces chiffres devrait commencer dans quelques semaines. Nous devons être vraiment sûrs de notre système. »

Pour en savoir plus, à lire cet article : La fin des chiffres fantaisistes des manifestations

Va-t-on réussir à compter correctement les manifestants ? (France Inter)

Les révélations des Paradise Papers sont-elles utiles ?

L’affaire des Paradise Papers, révélée notamment sur franceinfo grâce au service Enquêtes-Investigations de Radio France, suscite de nombreuses réactions d’auditeurs. Il y a les pour, il y a les contre. Jacques Monin, le directeur de ce service qui a longuement enquêté, répond aux auditeurs.

 

 

A quoi vont servir ces révélations ?

De nombreux auditeurs félicitent l’équipe pour ces révélations à propos des usagers – on va les appeler comme ça – des paradis fiscaux, de l’évasion et de l’optimisation fiscales. Comme le dit Alain : « Vous montrez bien que lorsqu’on est déjà très riche, on fait tout pour l’être encore plus ». Mais d’autres, fatalistes, estiment que tout cela ne sert à rien : « Tous les présidents de la République qui se succèdent, écrit Cédric, annoncent la fin des paradis fiscaux, une législation plus sérieuse, mais rien ne change vraiment ». Ou Elise : « Vous dénoncez des personnalités. Mais qu’est-ce qui va changer ? ».

« Ces révélations ont déjà servi à quelque chose. Quelques exemples : une enquête du fisc lituanien, la justice indonésienne a elle aussi lancé une enquête sur les enfants de l’ancien dictateur Suharto, 4 personnes ont été incarcérées en Argentine, la Commission Européenne va lancer une enquête sur l’île de Man, les Pays Bas aussi… Le parquet financier français a lancé une investigation qui a débouché sur 25 cibles et une personne a été jugée et condamnée.
On peut rappeler que beaucoup de ces pratiques sont légales. Il y a trois niveaux de pratiques légales et illégales : la fraude fiscale, l’abus de droit (exemple la TVA), et l’exemple de Total qui rapatrie de l’argent et c’est totalement légal. Le questionnement se situe aujourd’hui sur le niveau de légalité. »

Le rôle du consortium de journalistes ICIJ 

Plusieurs auditeurs estiment que vous avez beaucoup parlé des étrangers, mais peu des Français. Pour Jean-Noël, par exemple, « Pour éviter de parler des Français, on parle de la Reine d’Angleterre, d’un proche de Justin Trudeau, de sportifs étrangers, mais peu de noms d’exilés fiscaux français sont sortis ».

« C’est un faux procès d’intention; quand on enquête, on enquête sur tout.  Cette investigation a été coordonnée pas l’ICIJ, un consortium de journalistes International (Consortium of Investigative Journalists) et basé à Washington. Nous avons évoqué les situations du  réalisateur Jean-Jacques Annaud (il a régularisé sa situation à la suite de nos révélations),  Philippe Starck, Total, Engie. Toutes ces fuites viennent d’un cabinet Appleby , anglo-saxon basé aux Bermudes »

Pour d’autres auditeurs, vous avez dénoncé des personnalités. Mais comme le dit Gilles : « Pourquoi n’avoir pas braqué les projecteurs sur ces cabinets d’avocats spécialisés qui vendent ce genre d’arrangements ? Pensez-vous vraiment qu’un sportif comme Lewis Hamilton soit au courant de toutes les opérations qui touchent sa fortune ? ».

 » Ces fuites sont parties d’un cabinet d’avocat Appleby ; la commission européenne prépare par ailleurs une directive qui imposera à ces intermédiaires de déclarer leur montage. Les avocats d’Hamilton ont dû le conseiller, mais c’est tout de même quelqu’un qui cherche à échapper à l’impôt. »

Ces révélations sont le fruit d’une collaboration journalistique mondiale

Est-ce le seul moyen aujourd’hui de pouvoir révéler des scandales financiers ou fiscaux de cette importance ? Oui, car cette évasion fiscale se fait à l’échelle mondiale, donc nécessité d’une enquête mondiale. Ces multinationales ont des moyens énormes. Par conséquent, il est plus difficile d’attaquer 96 médias qu’un seul. C’est ce qui fait la force de cette enquête.

 

Retrouvez toutes les sujets autour des Paradise Papers sur franceinfo