Les coulisses du « Téléphone Sonne »

Chaque semaine, du lundi au vendredi de 19h15 à 20h, les auditeurs retrouvent l’émission « Le Téléphone sonne » et nous écrivent. Pour parler des coulisses de cette émission phare de France Inter et répondre aux questions que se posent les auditeurs, Emmanuelle Daviet reçoit Fabienne Sintès.

L’émission dont nous allons parler aujourd’hui, vous la connaissez tous, elle fait partie du patrimoine de la radio. 43 ans après son lancement, le succès est toujours là, avec plus d’1 900 000 auditeurs qui écoutent chaque jour.

Une émission « patrimoine »

Emmanuelle Daviet : Vous et « Le téléphone sonne », ça fait combien d’années maintenant ?

Fabienne Sintès : C’est la cinquième. C’est la cinquième saison qui vient de commencer.

Emmanuelle Daviet : Et « Le téléphone sonne », ça représentait quoi pour vous, avant, de l’autre côté du poste ?

Fabienne Sintès : Justement, c’est le mot que vous avez prononcé : il y avait un côté patrimoine, un côté totem autour de cette émission. Et en commençant, j’ai eu peur de la casser. J’ai eu peur de casser le totem, le truc dont on n’a pas le droit de changer une virgule, et à juste titre. Et puis, ce qui est intéressant, c’est qu’en la faisant, on se rend compte que cette émission appartient justement à celui qui la fait et qu’on peut y mettre aussi une patte sans avoir l’impression de se dire « il faut absolument que je fasse comme Alain Bedouet ou comme ceux qui ont suivi ». Et puis surtout, c’est tellement les auditeurs qui font l’émission de toute façon, qu’on apprend très vite à se laisser embarquer. Et c’est ce qui en fait tout le sel, d’ailleurs, parce qu’il n’y en a pas une qui ressemble à l’autre.

Emmanuelle Daviet : Alors avec vous, Fabienne Sintès, ce matin, on va parler des coulisses de l’émission, sa fabrication, le choix des sujets et des auditeurs qui vous écrivent et bien sûr, vous appellent chaque soir.

Les invités du « Téléphone Sonne »

Le 16 septembre dernier, « Le téléphone sonne » était consacré au salaire des enseignants, invités en studio : le secrétaire général du SNPDEN, qui est proviseur à Saint-Denis, et une analyste à la direction de l’éducation de l’OCDE, et dans les mails reçus, un reproche récurrent « pas de professeurs invités autour de la table ». Je vous lis le message d’une auditrice : « J’ai été sidérée par le fait que parmi les intervenants, il n’y avait pas le moindre enseignant. Suivant le principe de l’émission, cela faisait des enseignants des non-spécialistes réduits à leur prénom et exposant des situations particulières, mais non habilités à tenir un discours sur la situation d’ensemble ni à la comprendre. » Fabienne Sintès, que répondez-vous à ce type de remarques ?

Fabienne Sintès : Cette émission, nous la voulions dépolitisée. Et il y en a eu des émissions très, très politisées autour de l’Éducation nationale, ne serait-ce qu’avec Jean-Michel Blanquer. Celle-ci, nous la voulions dépolitisée. Nous la voulions autour du travail des professeurs et nous la voulions à plat, sur des comparaisons, sur des chiffres, sur des disparités. C’est bien à ça que servait le proviseur qui était à côté, on ne peut pas dire qu’il soit étranger non plus, à la fois au travail des profs et aussi fin connaisseur évidemment de leurs salaires. Et pardon auprès de cette dame, mais il y a le standard et ce soir-là, nous avons choisi de ne passer que des profs au standard qui parlaient chacun effectivement, qui donnaient des vrais exemples concrets sur leur situation. Et moi, je crois qu’on est là vraiment dans ce qui est, à mon avis, en tout cas dans ce que j’ai moi, envie de faire du « Téléphone sonne ». C’est un débat à trois, cette émission. Ça veut dire qu’il y a des gens qui sont dans leur couloir, mais qui ne sont pas forcément oui et non, blancs et noirs, parce que sinon moi, je considère que ça ne sert à rien. Et puis, il y a l’auditeur derrière et ça marche à trois, ça va et vient dans tous ces sens-là. C’est tout sauf une émission de clash. Ce n’est pas une émission où on affronte les idées, c’est une émission où on les confronte, encore une fois avec une place pour l’auditeur qui doit toujours être prépondérante. Il faut qu’il ait une place à l’intérieur de ce débat.

Emmanuelle Daviet : Et l’auditeur s’invite dans ce débat.

Fabienne Sintès : Mais il a raison et c’est bien pour ça qu’on a envie de le faire comme ça. Parce que s’il a le sentiment d’entendre chacun des arguments, ce sur quoi il est d’accord, ce sur quoi il n’est pas d’accord. Qu’est-ce qui fait qu’il intervient, en fait ? Et pour dire quoi surtout ?

Emmanuelle Daviet : Cette émission a suscité beaucoup de messages d’auditeurs et en voici un qui vous est adressé et que je partage : « Quelle performance, ce débat! Juste quelques mots pour vous exprimer combien je suis en empathie avec vous lors d’émissions comme celle ci. J’imagine la tension psychique que vous ressentez. Je suis admiratif du courage que vous mobilisez pour affronter des auditeurs, comme il s’en est présenté ce soir. Le direct expose ceux qui acceptent de le vivre. Le moins qu’on puisse dire est que vous prenez régulièrement le risque de vous exposer et vous le faites avec brio. Votre travail est remarquable et nécessaire pour informer les auditeurs en utilisant plusieurs angles d’observation des faits. »

Fabienne Sintès : Il fallait me l’envoyer ce message, je l’aurais fait encadrer !

Emmanuelle Daviet : Eh bien, on va vous l’envoyer par le service de la médiation. Ce message évoque les conditions du direct en radio. Fabienne Sintès, quelles ressources le direct nécessite de mobiliser et que l’on ne perçoit pas forcément lorsqu’on est de l’autre côté du poste ?

Fabienne Sintès : Je ne sais pas très bien quoi répondre à cette question. Dans une émission comme celle là, c’est qu’il faut s’attendre à ce qu’elle parte en vrille. Parfois, il faut savoir la rattraper. C’est pour ça qu’il faut être extrêmement attentif à ce que disent les gens. Il faut s’attendre à ce qu’elle aille dans une direction qui n’était absolument pas celle qu’on avait anticipé. Et pareil, il faut essayer de retomber sur ses deux pattes. Moi, je me souviens, quand j’ai commencé, je préparais cette émission comme si ma vie en dépendait. Aujourd’hui, je le fais très différemment. Au début, je croyais qu’on pouvait donner une orientation même en disant « on va parler de ça au début, après, on va enchaîner là dessus, puis la troisième idée, ce sera celle là. » Aujourd’hui, je ne le fais plus. En fait, aujourd’hui, si vous voyiez ce que j’ai devant moi, j’ai une sorte de vrac avec les points importants du sujet, les chiffres et un certain nombre de questions que j’ai, moi, et que j’aurais envie qu’on aborde. Et puis après, on laisse partir et il arrive que la discussion prenne un tour qui n’était absolument pas celui qu’on avait anticipé. C’est la vie. C’est le principe d’une émission avec des auditeurs et dans ces cas-là, évidemment qu’on laisse faire, qu’on ne retient pas les chevaux. On y va et on voit où ça nous emmène.

Les choix des sujets traités à l’antenne

Emmanuelle Daviet : « Le téléphone sonne », c’est aussi l’occasion d’évoquer des phénomènes de société, voire d’alerter les parents sur des pratiques qui existent, mais qu’ils n’ont pas encore repérées. Et je pense notamment à votre émission la semaine dernière, consacrée à la série coréenne Squid Game, diffusée sur Netflix. Une auditrice écrit : « Je suis enseignante dans une école élémentaire, même si cette série est interdite aux moins de 16 ans. Son influence se propage chez les plus jeunes. J’ai pu voir des élèves jouant à 1-2-3 soleil, ce qui n’était jamais le cas avant le succès de cette série, rouer de coups de pieds, un écolier au sol. Le jeune âge de ces élèves et leur manque absolu de recul inquiète beaucoup ».

Alors là, on est typiquement dans le témoignage qui enrichit votre émission. Mais une telle programmation fait aussi inversement réagir des auditeurs. Je vous lis un extrait de leurs courriels : « Je ne regarde pas cette série et je ne comprends rien à vos échanges ». Et puis, un autre auditeur écrit « Je ne comprends pas un mot de ce que vous dites ». Fabienne Sintès, est-ce que vous percevez le moment où des auditeurs sont un peu perdus par le thème de l’émission ?

Fabienne Sintès : C’est marrant parce qu’on l’a tournée dans tous les sens Squid Game avant d’y aller, en se demandant justement par quel bout il fallait le prendre. Et en s’interrogeant là-dessus effectivement : « qui va être perdu ? » On la connaît, la moyenne d’âge de nos auditeurs. On sait que ce n’est pas forcément le public de Squid game, loin s’en faut. Mais on sait aussi qu’ils ont des enfants.

Emmanuelle Daviet : Quelle est la moyenne d’âge ?

Fabienne Sintès : C’est plutôt entre 53, 54, 55 ans, on est à peu près dans ces eaux-là. Donc on n’est pas dans le cœur de cible de Squid Game. En même temps, est-ce qu’on peut passer à côté de quelque chose qui, qu’on le veuille ou non, est un véritable phénomène de société ? Donc on se dit qu’on y va. On se dit que oui, peut-être qu’en route on perdra des gens, mais peut-être qu’il y en a d’autres, et j’espère bien d’ailleurs, qui apprendront des choses et découvriront ce phénomène-là et sauront de quoi on parle quand ils l’auront lu dans les journaux ou ailleurs. Ce que je trouve intéressant dans la remarque des deux auditeurs ou auditrices d’ailleurs, c’est que quand on se pose et qu’on se dit, « comment c’est « Téléphonesonnisable » ? », c’est notre expression favorite avec Amélie Stadelmann qui s’occupe de la programmation. « Comment c’est « téléphonesonnisable » ? » Et on aurait pu prendre le premier biais, et au fond, on a trouvé que c’était facile. Le premier biais, c’était d’inviter un pédopsychiatre qui nous explique que la violence, parfois, c’est compliqué, etc. On s’est dit on va essayer de le prendre par un autre morceau, on va essayer de voir si cette série nous parle, si elle dit quelque chose, si elle nous apprend des choses sur la société dans laquelle on vit, ce qu’elle nous dit aussi de la société coréenne. Donc, on a vraiment plutôt été dans cette direction-là. Alors on les a posé les questions sur la violence, mais on a vraiment sciemment choisi ça. Alors effectivement, peut-être qu’il y a des gens qui sont perdus, mais je suis convaincue, et c’est d’ailleurs l’extrait que vous avez diffusé tout à l’heure, qu’il y a aussi des gens qui ont appelé pendant cette émission, qui sont des auditeurs, mais pas des gens qui appellent au « Téléphone sonne », en règle générale, et qui là, l’ont fait parce qu’on leur parlait.

Emmanuelle Daviet : Plus généralement, et d’ailleurs, c’est la question d’un auditeur qui souhaite savoir comment vous choisissez les thèmes du « Téléphone sonne » ?

Fabienne Sintès : Pour que ça marche, vous aurez remarqué que sur dix appels, il y a deux personnes qui posent des questions, il y en a huit qui témoignent de quelque chose. Donc, s’ils ne peuvent pas se sentir concernés et arriver en disant « moi, je », ça ne marche pas. Je vous donne un exemple : en ce moment, on est en train de se demander comment on prend la hausse de l’énergie, par exemple. Alors oui, c’est un sujet, la question ne se pose pas. Les factures sont en train d’exploser, le pouvoir d’achat est revenu dans la campagne électorale et tant mieux, on en est là. OK, donc, c’est un vrai sujet, la question se pose pas. Mais comment on l’emmène nous au « Téléphone sonne » ? Par quel bout on le prend, pour répondre à quel type de question ? Avec quel type d’interlocuteurs autour de la table ? Si on se contente d’entendre des gens qui disent « ma facture a augmenté, c’est quand même terrible. » Et ils auront raison, d’accord, mais alors on répond comment ? On répond avec quoi ? Avec qui ? etc. Et on s’est posé cette question sur Squid Game, ça a duré plusieurs jours. On se pose la question sur l’énergie. On n’a pas encore trouvé la clé. Il faut attendre de trouver la clé qui permettra de tirer la ficelle.

Emmanuelle Daviet : Quels sont les thèmes qui génèrent le plus d’appels ?

Fabienne Sintès : Il ne vous a pas échappé qu’il y a beaucoup de profs qui nous écoutent. On les embrasse. Donc, tous les sujets qui tournent autour de l’Education nationale, à la fois les gens sont là et ils sont effectivement ensuite là sur les courriers qui viennent derrière, sur les tweets, etc. que je peux recevoir. Les sujets liés à l’environnement marchent très bien. Après, il y a aussi quelques grands témoins. Moi, j’ai été très étonnée, par exemple, qu’un jour où il y a un T Rex au Musée de l’Homme, on a été submergé d’appels. Le jour où on invite Jean-Louis Etienne, par exemple, c’est le premier nom qui me vient en tête, les gens adorent aller discuter avec ce monsieur-là et voir un peu ce qu’il pense et ce qu’il a dans le ventre, sur un tas de thèmes qui dépassent d’ailleurs, son champ de compétence et ce qu’il fait volontiers. Après, il arrive parfois quand j’allume l’ordi, on a un logiciel qui s’appelle Neoscreener et c’est là qu’on voit qu’il y a eu des appels où il y en a pas, ou peu. Des fois, on l’ouvre et il y a une foule d’appels qui sont là, on se dit « on aura que l’embarras du choix et ça sera même compliqué de choisir ». Des fois, il y en a 3, 4, 5, 6 qui se battent en duel. Puis, des fois, il y a une ou deux questions et pas plus. Et là où c’est génial, c’est quand, au fil de l’émission, le tableau se remplit. Ça veut dire que les gens sont rentrés dans la conversation et là, ça veut dire qu’on a gagné.

Emmanuelle Daviet : De nombreux appels également lors des émissions consacrées au Covid et plus particulièrement à la vaccination.

Beaucoup de courriels à chaque émission consacrée au Covid, je vous lis un message : « J’écoute souvent « Le Téléphone sonne » et j’apprécie beaucoup Fabienne Sintès. Pourtant, je suis très déçu de constater son parti pris pour la vaccination, quoi qu’il en coûte, avec ses interventions très orientées pro vaccin ». Je ne vous apprends rien, Fabienne Sintès, des mails de cette teneur, on en a reçus régulièrement. Que répondez-vous à ses auditeurs ?

Fabienne Sintès : D’abord, je ne crois pas avoir jamais dit sur l’antenne, je suis sûre d’ailleurs, que je n’ai jamais dit sur l’antenne « Allez vous faire vacciner, allez y maintenant, voici les adresses. » En revanche, on a entendu des anti-vaccins. On a entendu des gens qui doutaient, entourés de médecins d’ailleurs, qui étaient là pour répondre à leurs questions. On a fait un « Téléphone sonne » qui disait en gros « venez comme vous êtes. Il y a des choses que vous ignorez encore, vous voulez reposer des questions qu’on a posé mille fois. Allez-y, n’hésitez pas. » Maintenant, est-ce qu’il est question de laisser partir des logorrhées anti vaccins, des logorrhées de fake news ? La réponse est non. Moi, je crois que là dessus, j’ai beau dire que « Le téléphone sonne », c’est une émission qui commence par « Moi, je… », sur la science, il n’y a pas d’opinions, il n’y a que des faits.

Les auditeurs à l’antenne

Emmanuelle Daviet : On dit qu’en cet automne 2021, les Français sont hyper tendus, énervés… Vous qui les avez tous les jours en ligne, est-ce que vous percevez cette tension ?

Fabienne Sintès : Alors oui, ça arrive. Ça dépend évidemment des sujets. J’ai l’impression qu’en fonction de l’ambiance qu’on met justement à l’intérieur de l’émission et on revient au refus d’être au clash permanent, on a assez peu à gérer de très, très gros énervements, en fait, précisément parce que la discussion est sereine.

Emmanuelle Daviet : Il y a des messages d’auditeurs qui vous agacent ?

Fabienne Sintès : Bien sûr, quand on remet en cause mon honnêteté journalistique et intellectuelle, ça m’énerve. Quand on fait exprès d’avoir, parce qu’en général les gens le font exprès d’avoir écouté de travers ou entendu de travers. Oui, ça m’énerve.

Emmanuelle Daviet : Et selon quels critères un auditeur est choisi pour passer à l’antenne ?

Fabienne Sintès : Il n’est pas choisi. C’est le thème qui choisit les auditeurs. Ça veut dire qu’il faut qu’il soit dans le thème, il faut qu’au fur et à mesure de l’émission, on puisse avoir des questions qui ne soient pas toutes les mêmes. C’est en fonction de ça que les choix sont faits. Mais, je devance la question que j’entends, la petite musique que j’entends beaucoup, il n’y a pas de parti pris ni de décision de dire « on ne prendra que les gens qui sont pour », « on ne prendra que les gens qui sont contre ». A aucun moment. On prend les gens qui font avancer la discussion. Cette fameuse discussion à trois dont je parlais au début.

Les éditions spéciales

Emmanuelle Daviet : Le 6 septembre dernier, « Le téléphone sonne » était en édition spéciale à l’occasion de la mort de Jean-Paul Belmondo. Beaucoup de messages d’auditeurs : « Merci pour l’émission hommage que vous lui avez rendu et qui a fait remonter plein de souvenirs, si bien qu’on en avait le sourire aux lèvres ». Et une auditrice souhaite savoir comment « Le téléphone sonne », passe en édition spéciale, comment on prépare une émission en si peu de temps sans filet, Fabienne Sintès ?

Fabienne Sintès : En radio, Belmondo on a appris sa mort il était 16h30, c’est pas si peu de temps, c’est beaucoup de temps, en fait. Entre 16h30 et 18h, pour la moyenne des gens, ça ne fait pas beaucoup, mais en réalité, si, ça aurait été dramatique, si on avait appris sa mort à 19h12, là, ça aurait été beaucoup plus compliqué. Donc là, on a le temps d’aller chercher des invités, de voir qui est là, qui est susceptible de parler, etc. Encore une fois, regardez cette Kenza, quel miracle de bonheur d’auditrice et écoutez son âge. C’est une très jeune femme. Donc il suffit de ça pour lancer une émission et pour qu’on parle tout simplement de Belmondo ou d’un autre. Alors en plus, Belmondo pourrait tout à fait honnête. C’est assez facile quand même. On est tellement dans la culture populaire et on a tous vu des films de Belmondo, donc ce n’est pas l’exercice le plus difficile. Et j’aime bien le courrier de l’auditeur qui dit « et en plus, c’était sympa, on avait le sourire aux lèvres. » J’espère bien.

Emmanuelle Daviet : Donc, c’était réussi. Précisément, quels sont les ingrédients d’un « Téléphone sonne » réussi ?

Fabienne Sintès : Eh bien, il faut sortir du « Téléphone sonne » en ayant le sentiment d’avoir appris des choses, et pas juste encore une fois, avoir entendu des gens aboyer. Il faut qu’on ait lancé le débat, qu’éventuellement, il se poursuive à table après, puisque les gens vont se mettre à table ou éventuellement sur les réseaux sociaux. Il faut que les gens aient le sentiment qu’on leur a donné de quoi dire leur opinion et qu’ils en sortent encore une fois plus intelligents qu’ils l’étaient en entrant, comme moi en fait, qui a appris des choses au fil de l’émission quand elle est vraiment réussie ?

Emmanuelle Daviet : Et vous nous avez appris beaucoup de choses ce matin encore. Merci à vous, Fabienne Sintès.

Les invités politiques sur Franceinfo

Le choix des invités politiques, les principes du temps de parole et la parité : en cette année d’élection présidentielle : les règles du débat public avec Emmanuelle Daviet et Estelle Cognacq, directrice de la rédaction de Franceinfo.

Emmanuelle Daviet : On démarre une année de campagne présidentielle, comment choisissez-vous vos invités politiques ? Combien en recevez-vous en moyenne par jour ? Selon quels critères, quel calendrier ?  

Estelle Cognacq : Alors, nous avons deux rendez-vous politiques fixes par jour : le 8h30, qui est une interview qui dure 25 minutes à peu près, qui est diffusée sur la radio et sur la télévision, le canal 27. Et puis le 18h50, qui est un rendez-vous politique plus court, qui fait moins de dix minutes et qui est diffusé uniquement sur la radio. Ce sont des rendez-vous qui sont présents aussi le week-end, pour le 8h30 notamment. Et en dehors de ces rendez-vous politiques, nous avons aussi des élus, députés, maires sur l’antenne qui sont présents toute la journée sur des sujets d’actualité. Ça peut aller, par exemple, d’un maire sur un événement climatique par exemple une inondation ou bien un sénateur, un député qui est spécialiste d’un domaine, comme récemment sur l’affaire des sous-marins australiens, par exemple. Sur le 8h30, qui est quand même notre rendez-vous phare, on a des invités politiques, mais pas seulement, on a aussi des patrons, on a aussi des acteurs de la société, on peut avoir des sportifs, c’était le cas pendant la Coupe du monde, par exemple, où on a pu avoir des anciens joueurs de l’équipe de France comme Marcel Desailly. On choisit principalement ces invités en fonction de l’actualité. Alors en ce moment, par exemple, avec la primaire des écologistes, c’est sûr qu’on les a tous invité et on a fait deux émissions avec eux pour justement respecter aussi la pluralité. En ce qui concerne la présidentielle, plus largement, on invite aujourd’hui les candidats qui sont déclarés soit à cette élection, soit à une primaire.

Emmanuelle Daviet : Le CSA a également édicté des principes que vous êtes tenus de respecter. Pouvez-vous nous rappeler les règles auxquelles votre antenne est soumise pour les invités politiques? 

Estelle Cognacq : Effectivement, en dehors des campagnes électorales où il y a des règles précises, nous devons respecter là un temps d’antenne à peu près d’un tiers du temps total d’intervention. C’est-à-dire là, ce n’est pas que les interviews politiques, ce n’est pas que 8h30, c’est les journaux, c’est tout ce qu’on peut avoir. Un tiers d’antenne pour le pouvoir exécutif : ça veut dire que le président de la République, les ministres, que ce soit des discours qu’on retransmet en direct ou dans ces cases d’invités et le reste du temps, il est réparti selon un principe d’équité entre les partis et les mouvements politiques qui représentent les grandes orientations de la vie politique nationale. C’est des critères fixés par le CSA. Alors, ça prend en compte des résultats de consultations électorales, du nombre d’élus, l’importance des groupes parlementaires et des indications de sondages. La contribution de ces formations politiques à l’animation du débat politique est aussi pris en compte. Donc, nous, on a des grands équilibres, on va dire à respecter. On a un compteur un peu qui monitore ses interventions. Et puis on recale un peu chaque jour, quand on voit qu’on est un petit peu trop ou pas assez sur certains équilibres.

Emmanuelle Daviet : Au delà de ce pluralisme, la question de la parité est également sensible. Vous veillez à cet équilibre? Vous faites en sorte que les femmes élues, dirigeantes, impliquées dans la société s’expriment aussi sur l’antenne? 

Estelle Cognacq : Alors oui, c’est vrai qu’on a des représentants de plus d’une trentaine de formations et courants politiques sur l’antenne à peu près chaque trimestre et on essaye d’avoir une représentation des femmes, le plus important possible, ça n’est pas toujours facile parce qu’on se rend compte que dans certains partis politiques, en fait, il y a assez peu de femmes de premier plan, on invite des patrons du CAC 40, là aussi, la représentation féminine est plutôt faible et donc on essaye nous aussi d’aller détecter aussi des femmes qu’on voit peut être moins que l’on teste dans certains partis où on se dit « bien voilà, là, il y a une femme qu’on a entendu qui est devenue maire, qui est devenue présidente de région ». Et on essaye de l’inviter, de voir, de lui donner, je dirais, une exposition pour que derrière, elle devienne elle aussi incontournable. Mais il est vrai que malgré tout le volontarisme qu’on peut, on est quand même soumis, nous aussi, à la représentation de la parité au sein des partis politiques. Certains ont un nombre de femmes plus important que d’autres. Et comme on doit respecter les équilibres du CSA, c’est parfois très compliqué.

Pour aller plus loin :

Extinction Rebellion, Rokhaya Diallo et Le Cours de l’histoire

Cette semaine, plusieurs sujets ont fait réagir les auditeurs. Pour répondre à leurs messages, Emmanuelle Daviet reçoit Sandrine Treiner, directrice de France Culture.

Le mouvement Extinction Rebellion

On commence avec ce message de Pierre-Jean : « J’ai appris mercredi dans différents journaux matinaux de France Culture qu’une action de blocage au centre de Londres initiée par le mouvement Extinction Rébellion était en cours et que la police avait évacué 400 manifestants. En revanche aucune information sur ce qui se passe à Paris dans le même cadre. Est-ce la volonté de la rédaction en chef ? Des journalistes chargés du journal ? De la Direction de France Culture ou de Radio France d’occulter ces informations ? »

Il n’y a aucune sorte d’intervention. C’est une question de hiérarchie de l’information. À Londres, l’évacuation était en train de se passer alors qu’à Paris, le mouvement s’installait.

Rokhaya Diallo, invitée de France Culture

Nous avons reçu plusieurs messages au sujet de l’invitée du 9 octobre dans les Matins : « Je trouve déplacer d’inviter Madame Rokhaya Diallo dans votre matinale . Cette personne tient des analyses qui incitent à la haine , au racisme anti blanc. Pourquoi l’avez-vous invitée ? »

Une question intéressante. Pendant toute l’émission, Guillaume Erner a tenu a poser toutes les questions à Rokhaya Diallo sur les polémiques dont elle est l’objet.

Les sujets que développent Rokhaya Diallo sont des sujets importants. L’ouverture à d’autres idées que les siennes font partie de ce que doit faire une antenne. Dès lors qu’elles sont discutées avec un esprit critique.

« Le Cours de l’histoire », la nouvelle émission de France Culture

On termine avec l’émission « Le Cours de l’histoire ». Les avis sont partagés de manière assez équilibrée entre ceux qui apprécient et ceux qui émettent quelques petites réserves.

« Dans cette émission la proportion d’invités est très nettement en faveur des hommes et c’est regrettable surtout dans un domaine où les femmes ne manquent pas. C’est dommage sur une chaîne publique exigeante. »

J’indique à cet auditeur que, vérification faite, lors des dernières émissions la parité a été régulièrement assurée.
Accordez une vigilance particulière à cet équilibre Sandrine Treiner ? Faites-vous des recommandations aux producteurs?

Je suis vigilante à ces questions, mais les productrices et producteurs aussi. Pendant la semaine consacrée à l’environnement, il y a en effet eu plus d’hommes que de femmes, mais c’est un milieu dans lequel ils sont plus présents que les femmes. Mais les producteurs tendent à faire en sorte de porter toutes les paroles, en particulier dans le monde de la science.

Le traitement par Franceinfo de la « grève des notes » au bac

Alexis Morel journaliste, spécialiste éducation à franceinfo est au micro de la médiatrice des antennes, Emmanuelle Daviet 

Grève des notes : qui a pris la parole sur franceinfo ?

Jean-Louis : « La rédaction tend souvent le micro aux professeurs très, très, minoritaires, qui ne corrigent pas les copies. On n’entend jamais les professeurs, très très majoritaires qui corrigent les copies. Pour quelles raisons ? »

Alexis Morel : Il est vrai que les correcteurs grévistes étaient très minoritaires, ils le reconnaissent eux-mêmes. Le ministre affirme qu’ils étaient 2000 correcteurs grévistes sur 175000 au total. Même peu nombreux, leur mouvement a entraîné des perturbations bien réelles sur la correction et sur les résultats du bac. à tel point que le ministère a envisagé une solution de dernière minute pour que les résultats soient publiés vendredi 5 juillet comme prévu. Ces perturbations ont été bien réelles dans les académies de Paris, Créteil, Versailles, Toulouse, Dijon. (on parle des académies les plus importantes en nombre d’élèves). Chose importante également, c’était une grève inédite : pour la première fois depuis 1968, on a osé toucher au bac. qui était jusque-là une sorte de tabou. C’est ce qui a intéressé les journalistes.

Question autour de la perte de sens de la démocratie

Philippe : « Le traitement par France info de l’épisode peu glorieux de la « grève des notes » au bac  m’amène à m’interroger sur la perte du sens de la démocratie, du sens de l’éthique et de la morale par votre rédaction. Ma critique est un peu rude Je m’explique : Perte du sens de la démocratie : ne donner la parole qu’aux ultra minoritaires à longueur de journée, sans le moindre débat contradictoire, et monter en épingle la moindre rumeur d’incident  me paraît relever d’une conception assez particulière du traitement de l’information…  N’est ce pas là faire précisément le jeu des populistes de tout bord ? Perte également du sens de l’éthique et de la morale car personne ne s’interroge sur l’absence de sens moral clairement manifesté par des personnes en charge de l’éducation de nos enfants. Dérive déjà constatée lors du traitement du mouvement des gilets jaunes. Énormément de similitudes : Beaucoup d’émotion et peu de réflexion. »

Alexis Morel : Sur le premier aspect de la question, on a fait intervenir des opposants à ce mouvement de la rétention des notes, d’abord la fédération des parents d’élèves (la PEEP) franchement opposée qui a expliqué les conséquences que ça auraient sur les élèves, le syndicat des chefs d’établissement (le SCPDEN), et le Sgen CFDT (invité de franceinfo au lendemain de la publication des résultats). Le ministre également est intervenu à l’antenne, et a dit tout le mal qu’il pensait de ce mouvement.
Sur le sens de l’absence morale des enseignants, ce n’est pas aux journalistes d’apporter un jugement sur cette question. Notre rôle est de donner tous les éléments d’information aux auditrices et auditeurs pour qu’ils puissent ensuite se faire leur propre avis.

La réforme du bac dans tout ça ?

Valérie : « Je regrette que les arguments de lutte contre la réforme du Bac ne soient pas développés. Il ne nous est pas permis de nous rendre compte des motifs sous-jacents aux revendications des enseignants grévistes qui retiennent les copies. Or j’aimerais pouvoir me faire un avis éclairé quant aux craintes évoquées par ce mouvement. On entend uniquement parler du remplacement des notes manquantes et pas des motifs de grève. Pourquoi ? »

Alexis Morel : Il y a eu plusieurs temps dans ce mouvement. Il est vrai que ces 15 derniers jours, on s’est focalisé sur ce mode d’action inédit. Il y a eu ensuite la solution trouvée par le ministre : la note de la moyenne de l’année, plutôt que la note du bac pour les candidats victimes de la rétention des notes. Solution qui a fait débat, donc qui a occupé l’antenne.
Concernant la réforme du bac, on en a parlé tout au long de l’année, en matinale : à quoi ressembleront les épreuves du bac en 2021, le contrôle continue tout au long de l’année, les critiques émises par les syndicats… Mais dès la rentrée on en reparlera encore.

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Le traitement éditorial de la canicule sur franceinfo

Les auditeurs cette semaine estiment que les journalistes en font trop avec la canicule, pour leur répondre Emmanuelle Daviet reçoit Jean-Philippe Baille, le directeur de la rédaction de franceinfo.

 

 

Arrêtez avec la canicule !

… »Vous en faites trop…  Vous nous serinez les mêmes évidences en y ajoutant une psychose grandissante au fil des jours. Buvez de l’eau, ne faites pas de sport en plein soleil, inquiétez-vous des personnes âgées. C’est devenu insupportable entre les reportages et les spots divers Vous ne pensez pas que les français sont capables de bon sens ? (Marie) »

Jean-Philippe Baille : Quand les records de température sont atteintes, nous n’avons pas le sentiment d’en faire trop, que les écoles sont fermées, que les épreuves du brevet des collèges sont reportées pour la première fois pour cause de canicule, que des mesures de restriction de la circulation sont mises en place. Je n’ai pas le sentiment de créer une psychose, au contraire, j’ai le sentiment de raconter une réalité. Nous sommes dans l’exceptionnel, c’est notre métier de le souligner. La canicule a des conséquences sur notre société. Cette situation permet d’ouvrir le débat et de nous poser les questions sur les causes et les conséquences de ce dérèglement climatique. Cela fait partie de nos missions de rappeler les conseils de santé publique, nous sommes une radio de service public, il n’est jamais superflu de rappeler ces gestes qui sont parfois nécessaires.

Quelles solutions pour la planète à rappeler 

Vous rappelez à tous les bons gestes pour la canicule, ce qui est très bien. En revanche , vous suggérez des solutions qui peuvent aggraver les dérèglements climatiques et donc potentiellement contribuer à l’augmentation de ces épisodes de canicules dans les prochaines années. Vous parlez de « bouteilles » d’eau, ou de climatisation par exemple or il y a de d’autres solutions simples, et bonne pour la planète a court moyen et long terme, qui pourraient être rappelées (Perrine)

Jean-Philippe Baille : Dans le cas présent il y a aussi un caractère d’urgence, c’est un épisode exceptionnel qui nous amène à nous poser des questions sur ce dérèglement climatique. Le Président de la République l’a rappelé lors de sa visite au Japon : « notre société va devoir s’adapter et trouver des solutions pour ne pas aggraver la situation ». Nous avons ouvert le débat sur franceinfo, en interrogeant les différents acteurs et les différents experts.

La parisianisme et la canicule

La France ne résume pas à Paris. la canicule n’épargne aucun territoire…! C’est insupportable. Arrêtez ce parisianisme (Claude)

Jean-Philippe Baille : c’est faux. dans les bulletins météos nous donnons toujours les températures de plusieurs ville du pays. Nous avons envoyé plusieurs de nos reporters sur le terrain.

 

L’enquête Odoxa-Dentsu consulting pour franceinfo et « Le Figaro » révèle jeudi que plus de la moitié des 25-49 se disent préoccupés par l’épisode de canicule qui touche le pays

Bilan de la saison radiophonique sur France Culture

Emmanuelle Daviet reçoit Sandrine Treiner, directrice de France Culture pour faire le bilan de l’année radiophonique

Comment qualifiez-vous la saison qui vient de s’écouler ?

Sandrine Treiner : « Une saison profonde et réjouissante et historique. Historique quant à ses résultats, réjouissante quant à la dynamique d’antenne qui s’est déployée jour après jour, profonde car on a fait face à des enjeux importants tout au long de l’année. Les journalistes et productrices et producteurs de la chaîne ont su mobiliser tous les savoirs, toutes les idées, tous les systèmes de création, le théâtre y contribue pour éclairer différemment ces enjeux-là.

Quelle a été pour vous la plus grande surprise de l’année ?

Sandrine Treiner : « en décembre au moment de la crise des gilets jaunes, se rendre compte que tout le monde ne s’est pas tourné vers BFM  pour chercher de l’information immédiate, mais au contraire se tournait vers France Culture et vers les autres antennes de Radio France et était en recherche d’autre chose, de temps long, d’explications, de matière à penser…
Autre surprise : nous avions décidé de consacrer une part importante de notre programmation aux élections européennes, nous avons décidé de consacrer un forum France Culture à la Sorbonne entièrement consacré à ce sujet. Quelle surprise de voir tout ce public présent sur ces enjeux de fond.

Combien d’auditeurs écoutent chaque jour France Culture ?

Sandrine Treiner : « 1, 5 million, presque 30 % de plus que l’an dernier, deux fois plus qu’il y a dix ans, pour un ancien média, c’est historique. La plus forte progression radio cette année. Le profil de nos auditeurs est représentatif de notre société. L’auditeur a 55 ans en moyenne. On s’est renforcé de manière importante vers les 25 / 49 ans : 20 % des auditeurs sont de cette tranche d’âge et moins diplômés également, c’est essentiel, car la question des fractures culturelles est aussi importante que celle des fractures sociales. Si on peut jouer notre rôle de service public et apporter de la culture générale au fil de l’actualité, on n’aura pas perdu notre temps.

Quelles tranches de la grille en particulier ?

Sandrine Treiner : « Notamment la tranche de l’émission « la Grande Table », la matinale, +25% , par ailleurs toute l’antenne a augmenté, par exemple une émission comme celle de Marie Richeux « par les temps qui court a eu des résultats magnifiques ». Comme l’a dit, il y a quelques jours Fabrice Lucchini, en citant une phrase de Barthes, France Culture, « c’est un peu de savoir et beaucoup de saveurs »…

Comment expliquez-vous ce succès ?

Sandrine Treiner : « Un travail de fond sur les grandes questions qui nous interrogent tous collectivement : la démocratie, le peuple, le vrai, le faux. L’exigence des citoyens rencontre la nôtre. »

 

Le baccalauréat et le traitement des sujets sur franceinfo

De nombreuses questions d’auditeurs sur le traitement du baccalauréat : Emmanuelle Daviet reçoit Alexis Morel, journaliste, spécialiste éducation

Aucun des sujets des séries professionnels n’est mentionné

Je trouve choquant que les sujets des séries générales nous soient communiqués et que pour les séries  professionnelles nous n’ayons que l’horaire de l’épreuve. Quel intérêt ?
Aucun des sujets des séries professionnels n’est mentionné . Je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a du mépris alors que c’est aussi la radio qui peut changer les mentalités.

Alexis Morel : C’est une question récurrente sur la visibilité des filières professionnelles et du bac pro. J’entends cette remarque. A l’antenne, nous avons bien mentionné l’horaire du bac philo mais également celui du bac français pour les filières professionnelles. Mais il est vrai que le premier jour on accorde plus d’importance au bac philo.car c’est une filière un peu unique au monde, ce sont toujours des sujets qui font réagir les auditeurs. Mais il est vrai qu’il faut encore que l’on travaille à la visibilité des filières professionnelles au sein de la rédaction de franceinfo, filières qui souffrent à tort d’une image peu valorisante et les médias y sont forcément pour quelque chose.

Les polémiques autour des sujets du bac

Des internautes ont lancé une pétition adressée au ministère de l’Education nationale  pour dénoncer le sujet de français des S et ES jugé difficile,Le sujet en histoire des terminales L et ES fait également polémique pourquoi les journaliste n’en parlent pas alors que cela concerne de nombreux élèves ?

Alexis Morel : On en a parlé au cours d’une chronique durant le 17/20 qui relayait les protestations de certains candidats sur les réseaux sociaux. Ce sont deux problématiques différentes : pour le bac de français, il s’agissait d’un poème d’Andrée Chedid qui a fait polémique par forcément connue par tous les élèves. Les élèves ne seront pas pénalisés pour cela. Les pétitions à propos du bac sont régulières à chaque session du bac. A propos du bac histoire géographie et le sujet sur le Moyen-Orient, les professeurs contactés ont tous dit que le sujet était au programme.

La grève des professeurs correcteurs au bac

Aujourd’hui c’est le bac. Je viens d’entendre une prof qui n’a pas répondu à sa convocation et à qui vous demandez sur un ton empathique pourquoi elle agit ainsi, mais je n’ai pas entendu de parent d’élève dont l’enfant passe le bac exprimer son angoisse ou sa colère! Bref, votre information est orientée et en aucun cas objective.

Alexis Morel : Sur Franceinfo on a diffusé un sujet trois jours avant le bac, « paroles de prof grévistes ». Mais j’ai également donné la parole aux familles et aux élèves (recueil de la parole devant un lycée). Sur franceinfo nous avons également interrogé des fédérations de parents d’élèves et nous avons aussi invité en plateau une enseignante qui a refusé de faire la grève de la surveillance. L’équilibre des opinions autour de cette grève a été respecté. 

 

Procès des djihadistes français en Irak : le traitement sur franceinfo

Les condamnations à mort des djihadistes français jugés en Irak : pour en parler Delphine Gotchaux,  journaliste au service justice de franceinfo est au micro d’Emmanuelle Daviet, médiatrice des antennes.

 

Ces auditeurs reprochent un manque d’équilibre dans le traitement de ce dossier, que leur répondez-vous ?

Jean, un auditeur écrit : Franceinfo fait passer en direct Marie Dosé avocate qui défend le retour en France des djihadistes d’Irak. Il aurait été intéressant de donner aussi la parole à quelqu’un défendant la thèse contraire à celle de cette avocate. Mais quand France Info veut faire passer un message, cette possibilité est facilement oubliée .
Toujours au sujet des djihadistes français condamnées en Irak, René un autre auditeur estime, je cite, que « la couverture , le traitement de l’affaire un peu trop en faveur des djihadistes ».

Nous traitons l’actualité sans parti pris, sans éditorialiser. Effectivement nous avons beaucoup parlé de ces procès de djihadistes français en Irak, pour un raison évidente, c’est la première fois depuis la chute de l’Etat islamique que des ressortissants français sont condamnés à mort. (11 en moins de 15 jours). Au-delà de ce que chacun peut penser, cela soulève de nombreuses questions, non seulement sur la justice irakienne, qui juge ces hommes en quelques minutes seulement sans véritable droit de la défense, mais aussi sur les valeurs que défend la France depuis l’abolition de la peine de mort en 1981. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian a redit à l’Assemblée Nationale, la semaine dernière l’opposition de la France à la peine de mort, tout en assurant que ces procès étaient équitables. Mais il faut sans doute écouter la parole des familles des victimes du terrorisme en France, qui réclament le respect des droits fondamentaux pour ces djihadistes, quelque soit la nature des actes commis.
Il s’agit donc d’un débat de société et, sur Franceinfo nous avons aussi fait entendre les voix, notamment des hommes politiques qui ne souhaitent pas le retour de ces Français sur le territoire national.

Vous avez évoqué ces procès, quelle est la difficulté pour les couvrir ?

Ces procès se déroulent en quelques minutes seulement. Il faut déjà obtenir un visa. L’an dernier j’ai pu m’y rendre pour suivre le procès de Mélina Boughedir, Française djihadiste, jugée en Irak, condamnée à une peine de vingt ans de prison. En France nous ne sommes pas habitués à ce type de procès, ce dernier a duré environ 40 mn. En quelques mois seulement ces dossiers sont instruits. Il y a également la question de la défense, ce sont des avocats commis d’office qui n’ont pas le droit d’aller voir leurs clients en prison, qui découvrent le dossier à l’audience. Chaque procès est une sorte de chambre d’enregistrement de l’acte d’accusation. Le juge ne se retire pas pour délibérer, il fait sortir le prisonnier, et après cinq minutes, le condamne à mort.

Entre l’acte d’accusation et l’acte d’exécution, il s’écoule combien de temps ?

Pour le moment l’Irak n’a pas mis à exécution ses condamnations à mort de djihadistes étrangers en Irak.

Dans ce contexte, comment donnez-vous la parole aux familles de victimes ?

Ce sont souvent ces familles qui nous sollicitent par voie de communiqués de presse. L’association française des victimes de terrorisme, notamment a été très claire sur le sujet : il faut que les droits fondamentaux soient respectés même pour ces djihadistes français. Ces associations disent leur espoir que ces terroristes puissent être jugés un jour en France. Pour certains d’entres-eux, ils détiennent des pièces du puzzle qui pourraient expliquer comment des Français sont partis combattre en zone irako-syrienne, et ont aussi planifiés des attentas sur le territoire national.

 

France Culture au théâtre de l’Odéon


Les coulisses de l’émission « L’Esprit public  » avec Sandrine Treiner directrice de France Culture

A propos de « L’Esprit public en direct et en public du théâtre de l’Odéon »,Sylvette écrit : « Je suis une fidèle auditrice de l’Esprit public. Même si je ne suis pas souvent en accord avec les participants, j’apprécie beaucoup la tenue de cette émission ainsi que le respect qui s’exprime entre les différents intervenants : écoute, argumentation, respect des opinions des uns et des autres. … Aussi, à chaque fois que l’ancien député européen, Daniel Cohn Bendit, est invité, tout part à vau-l’eau et l’émission se transforme en un classique de ce qui se voit de pire sur les chaînes d’infos continues : vocifération, remise en cause des personnes en tant que telles, absence d’arguments clairs, non respect de la parole des autres, et j’en passe. Est-il bien utile de continuer à inviter quelqu’un qui se montre incapable de discuter avec d’autres et , qui plus est, est toujours convaincu être en meeting à la recherche d’applaudissements alors même que de l’autre côté du poste de radio, on a qu’une envie : celle de lui rappeler les bonnes manières et la correction ?
Le service de la médiation a reçu plusieurs messages allant dans ce sens.

Sandrine Treiner : effectivement Daniel Cohn Bendit était de méchante humeur ce jour-là, donc nous n’avons pas l’habitude de ce genre de débat, donc je peux comprendre que cela choque certaines oreilles habituées à un autre ton sur France Culture.
Nous avons commencé à diffuser quelques séances en public en direct du théâtre de l’Odéon cette année. Cela nous semblait très pertinent à Emilie Aubry et aux équipes, car il s’appelle en réalité Odéon théâtre de l’Europe et en cette année européenne, cela nous semblait intéressant d’aller dans un lieu qui symbolise la culture en Europe. En accord avec son directeur, l’équipe a décidé de créer un fil rouge. Donc on a cherché un grand européen, et on s’est dit que  Daniel Cohn Bendit n’était pas le moins bien placé. Lieu idéal pour une scène politique et théâtrale.

Les délocalisations de certaines émissions de France Culture

Seconde question à propos de « L’Esprit public » posé par Loic, lui aussi très fidèle auditeur de France Culture : « Pourquoi faire cette émission au théâtre de l’Odéon alors que Radio France dispose de nombreux studios très adaptés. Ma fille a assisté à une de vos émissions à l’Odéon, vous êtes assez « précaires » autour de votre petite table et EN PLUS il faut payer l’entrée ! Utilisez donc vos moyens en faisant du service public , c’est à dire de la qualité et de l’accès pour tous, donc gratuit. »

Sandrine Treiner : Nous ne disposons pas de studios à la mesure des émissions en public car la Maison de la Radio est encore en travaux. L’auditorium est réservé aux concerts. Nous avons besoin de lieu extérieur pour accueillir notre public. L’entrée était payante pour amortir les frais de gardiennage. L’an prochain les séances seront gratuites.

 

Quelle est la part de musiques anglo-saxonnes pour génériques de fin des émissions de France Culture ?

On termine avec cette remarque de Damien : « Toutes les langues véhiculent une (ou plusieurs) idéologie, l’anglaise se caractérise par l’individualisme, le libéralisme et surtout c’est la langue du commerce, donc de la croissance. La croissance que l’on peut résumer par cette maxime « la croissance n’est qu’une prise de part de marché sur la nature « . « Il me semble parfaitement contraire de vouloir défendre l’écologie  dans le « Week-end Imagine » de France Culture et de nous passer de la musique anglo-saxonne. »

Sandrine Treiner : L’anglais est aussi la langue de Shakespeare, de James Joyce… L’habillage est conçu avec l’identité des émissions en laissant une grande marge de manœuvre aux chargés de réalisation dont c’est le travail. L’anglais n’est pas simplement la langue du commerce.

Traitement par franceinfo, des événements du 1er mai à l’Hôpital Pitié Salpêtrière

Beaucoup de messages d’auditeurs sur la séquence de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière le 1er mai dernier. Retour sur ces événements Pour en parler au micro de la médiatrice, Richard Place, directeur adjoint de la rédaction de franceinfo


« Fidèle auditeur de France Info je suis aujourd’hui profondément choqué et scandalisé par le traitement  des événements du 1er mai à l’Hôpital Pitié Salpêtrière, présentés comme une « attaque ». Il est clair maintenant, qu’il ne s’agissait pas d’une « attaque », mais d’un mouvement de repli de manifestant face aux forces de l’ordre. Doit-on en conclure que vous diffusez des informations sans aucune vérification  ou, pire, que vous êtes un simple relais d’une communication du gouvernement. Ce dernier postulat vous réduirait alors à un simple organe de propagande. Quelque soit la réponse (incompétence ou organe de presse gouvernemental) c’est réellement inquiétant. Fin du message. »

Que répondre à cet auditeur  ? Que s’est-il passé ce 1er mai ?

A l’instant où cela s’est produit nous n’avions pas de journaliste sur place. Il faut donc remonter le fil, comprendre ce qu’il s’est passé. A 20h Christophe Castaner prend la parole, nous diffusons sa déclaration en précisant bien qu’il s’agit du ministre de l’Intérieur. Ce n’est pas franceinfo qui le dit mais bien le ministre. Le lendemain Martin Hirsch, le patron des Hôpitaux de Paris,  invité de franceinfo, qui parle d’une situation dramatique qui a été évitée de justesse. Mais nous diffusons aussi des interviews qui donnent le début d’une autre version. Nous continuons à enquêter sur la journée du 2 mai en étayant nos informations qui vont nous permettre de raconter une autre histoire. Un journaliste de franceinfo refait donc le film de ce qui s’est réellement passé minute par minute des événements de la Pitié Salpêtrière. Ce qui montre bien que les propos de Christophe Castaner et de Martin Hirsch ne sont pas exacts.

Des internautes pensent qu’il  y a là une volonté d’orienter l’information. Qu’en est-il exactement ? Comment justifier le choix d’une telle photo sans lien  ?

Les auditeurs et internautes ont été également très nombreux à interpeller la médiatrice en dénonçant une manipulation de l’information notamment sur le site de Franceinfo avec la publication d’une photo sans lien avec les faits de la Pitié Salpêtrière. Sur la photo une épaisse fumée blanche, une grille noire, trois individus, l’un avec un gilet jaune, deux autres cagoulés habillés en noir, l’un d’entre eux tenant  une barre de fer en direction  de la grille.

Le choix d’une telle photo est une erreur, mais pas de volonté de désinformation. Il y a un mea culpa. La photo a été changée très rapidement. Les faits montrés sur cette photo se produisent un peu plus tôt à peu près au même endroit.

Comment avez-vous débriefé cette séquence au sein de la rédaction ?

On refait le film, on essaie d’enquêter pour savoir quel processus a mené à cette erreur. L’encadrement n’a pas joué son rôle.

Est-ce que c’est susceptible d’entrainer des changements particuliers de vos méthodes de travail ?

Sincèrement nous nous remettons en question quotidiennement, grâce aux conférences de rédaction, où l’on parle des sujets et de la manière de les traiter. On n’est jamais totalement content de se que l’on produit.