- « Place nette XXL » : le témoignage d’un trafiquant de drogue depuis sa prison, sur franceinfo
- L’infox sur Brigitte Macron sur France Culture
- Manon Aubry invitée dans Questions Politiques
- Le ramadan sur les antennes
- « Outside Kaboul » le podcast de Caroline Gillet sur France Inter
- La publicité sur les antennes
- Langue française
L’interview d’un trafiquant de drogue incarcéré
« Tous les prisonniers on a bien rigolé derrière la télé », a déclaré ce mercredi au micro de Franceinfo un détenu marseillais, au lendemain de la visite d’Emmanuel Macron à Marseille pour le lancement de l’opération « Place nette XXL ». Ce dispositif vise à porter un coup d’arrêt aux trafics de drogues qui gangrènent la deuxième ville de France. L’opération doit durer plusieurs semaines, avec des centaines de policiers, gendarmes et douaniers déployés dans la cité phocéenne.
Interviewé par Stéphane Pair, journaliste chargé des enquêtes à Franceinfo, le détenu marseillais, âgé d’une trentaine d’année et condamné à une lourde peine pour trafic de stupéfiants et blanchiment, a témoigné sous couvert d’anonymat depuis sa cellule, à l’aide d’un téléphone portable clandestin. Il raconte avoir suivi la couverture médiatique de l’opération « Place nette » avec les autres détenus en regardant la télévision. » Ça nous a fait rire », dit-il. Il estime que ce dispositif inefficace est fait » pour les médias, pour montrer que [les forces de l’ordre] sont présentes, qu’elles font leur travail« . Mais il considère que » ça ne change pas grand-chose » (…) On perd 20 jours ou un mois« , soit » l’équivalent de 200 000 ou 300 000 euros la semaine« , détaille-t-il. Il précise que lorsque les forces de l’ordre arrivent en » petites patrouilles, le guetteur prévient de leur arrivée« . » Ils font un petit tour de 15-20 minutes (…) et avec un peu de chance, ils attrapent le petit ‘charbonneur’ ou celui qui a la sacoche, mais rien de plus« , ajoute-t-il.
Se décrivant comme « haut placé », ce détenu continue à garder le lien avec l’extérieur. Il explique que la prison n’est pas un frein aux trafics de drogue. Au contraire, » tout se passe en prison (…), on s’élargit, on se développe, on a plus de contacts, il y a plus d’argent qui se génère et il y a plus de consommateurs », assure-t-il.
Les auditeurs ont été nombreux à réagir à ce témoignage :
« C’est inacceptable de donner la parole à ce genre d’individu qui fait de la publicité pour son trafic tout en bafouant le travail de la police… Sans parler du portable en cellule ! »
« Que Franceinfo, de surcroît un média d’information payé par nos impôts, se paye le luxe de mettre à l’honneur des criminels en prison est une honte ! »
« Je ne vois pas trop l’intérêt de faire la Une sur les propos d’un délinquant en prison. En quoi sa parole est plus importante que celle de tout autre citoyen honnête ? »
Le rôle des journalistes est de rendre compte de la réalité telle qu’elle est, même si cela peut parfois être dérangeant ou controversé. Dans le cas de cette interview d’un trafiquant de drogue en prison par un journaliste de Franceinfo, il est important de comprendre que cela s’inscrit dans le cadre du devoir d’information du public.
Tout d’abord, diffuser un témoignage de ce genre ne revient pas à faire la promotion de la délinquance. Au contraire, cela permet de donner la parole à ceux qui sont impliqués dans ces activités criminelles, afin de mieux comprendre les mécanismes qui les sous-tendent et les réalités du terrain, hors des murs de la prison ou bien au cœur de celle-ci. Ces témoignages peuvent également mettre en lumière les défaillances du système carcéral et les défis auxquels sont confrontés les autorités pénitentiaires.
En outre, de tels documents sonores peuvent avoir un vrai intérêt journalistique en ce sens qu’ils permettent de donner une perspective unique sur des sujets complexes, tels que le trafic de drogue et la criminalité organisée. Ils peuvent fournir des informations précieuses sur les motivations des criminels, leurs méthodes de travail, ainsi que les dynamiques sociales et économiques qui les influencent.
Il est également important de souligner que les journalistes sont tenus par un code déontologique strict qui les oblige à exercer leur métier avec rigueur et objectivité. Dans le cas de cette interview, le journaliste a contextualisé les propos du détenu dans le but de présenter une analyse équilibrée de la situation.
Enfin, il est normal que cette interview ait suscité des réactions vives de la part des auditeurs, étant donné la sensibilité du sujet et les préoccupations légitimes quant à la glorification de la criminalité. Cependant, il est essentiel de reconnaître que la diffusion de tels témoignages contribue au débat public et à la compréhension des enjeux sociaux et politiques auxquels notre société est durement confrontée.
Stéphane Pair répondra demain aux questions des auditeurs dans le rendez-vous de la médiatrice sur Franceinfo à 13h20 et 16h20.
L’infox sur Brigitte Macron
Mercredi, la séquence « France Culture va plus loin, l’invitée des Matins » était consacrée à la théorie complotiste selon laquelle la Première dame, Brigitte Macron, serait en réalité un homme contrôlant son mari, le président de la République, dans le but de promouvoir la théorie du genre dans l’agenda politique. Cette infox, loin d’être anecdotique, a dépassé les frontières de la sphère complotiste pour devenir un véritable phénomène médiatique.
Pour éclairer cette affaire, France Culture a accueilli le sociologue Laurent Cordonier et la journaliste Emmanuelle Anizon, grand reporter à L’Obs, auteure d’une enquête sur les origines de cette rumeur : “L’affaire Madame. Le jour où la Première dame est devenue un homme : Anatomie d’une fake news” (Studiofact éditions, mars 2024). Son analyse a révélé deux étapes dans la propagation de cette fausse information. Tout d’abord, son émergence sur une vidéo YouTube, où cette théorie a commencé à se développer. Ensuite, sa reprise par des complotistes professionnels, lui donnant ainsi une ampleur sans précédent.
Les réactions du couple présidentiel, s’exprimant devant micros et caméras pour démentir ces allégations, témoignent de la dimension prise par cette fausse information, la transformant en un fait politique. En effet, lorsque le chef de l’Etat prend la parole sur un sujet, cela transcende le simple discours, et confère au dit sujet une légitimité et une importance particulières, a fortiori lorsque cela relève de sa vie privée.
Emmanuel Macron a ainsi dénoncé le 8 mars dernier les rumeurs sur les réseaux sociaux, prétendant que son épouse est une femme transgenre : « La pire des choses, ce sont les fausses informations et les scénarios montés, avec des gens qui finissent par y croire et qui vous bousculent, y compris dans votre intimité », a commenté le président de la République, interrogé par des journalistes sur le sujet à l’issue de la cérémonie scellant l’IVG dans la Constitution.
Depuis 2017 et l’élection d’Emmanuel Macron, des théories conspirationnistes essaiment régulièrement sur les réseaux sociaux clamant que Brigitte Macron, née Trogneux, serait en réalité une femme transgenre dont le prénom de naissance était Jean-Michel. Un vaste complot serait à l’œuvre pour masquer ce changement d’état civil, à en croire cette rumeur qui s’est également déclinée en accusations, plus graves, de pédocriminalité portées contre la Première dame.
« Contre ce machisme, il faut utiliser le droit, la justice » a indiqué Emmanuel Macron, appelant à un renforcement de « l’ordre public numérique » sur les réseaux sociaux, « un formidable lieu d’expression des plus fous » qu’il estime encore être » sans règles.” Deux femmes seront d’ailleurs jugées le 6 mars 2025 au pénal en diffamation à Paris pour avoir diffusé des rumeurs transphobes sur l’épouse du chef de l’Etat.
Indiquons que Brigitte Macron n’est pas un cas isolé. L’ex-Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern et l’ex-Première dame américaine Michelle Obama avaient elles aussi été ciblées par des rumeurs prétendant qu’elles étaient nées assignées homme, en 2017 et 2018.
Des auditeurs de France Culture ont donc été indignés par le choix de ce sujet, perçu comme farfelu et sans intérêt.
« Comment pouvez-vous, sur France Culture, faire un écho à des propos délirants concernant Brigitte Macron (serait-elle un homme ?) par une enquête dont on se moque ? Qu’est ce qui restera de votre émission ? Une rumeur stupide, infâme, calomnieuse. N’y a-t-il pas d’autres sujets que relayer, encore une fois sous couvert d’une enquête, un propos complotiste ? Vous alimentez une curiosité malsaine pour la vie privée, ce que vient aussi de faire l’Obs. Que nous restera-t-il si même France Culture se vautre ? Dommage, et c’est peu dire. »
« Arrêtez de propager ces mensonges en faisant des émissions sur, par exemple, Brigitte Macron, homme ! Vous ne faites qu’aider ces charlatans, quel que soit une de ces fausses nouvelles ! Vous relayez, et tous ces vils personnages sont ravis ! Ils n’ont même plus besoin de paraître. Vous l’aurez compris, je suis en colère, fausse bonne idée de disserter sur ces gens. »
De prime abord, nous pourrions nous rallier aux avis des auditeurs. Cependant, il est important de comprendre que l’analyse des mécanismes de diffusion des infox est nécessaire dans notre société contemporaine, et il apparaît que c’était l’intention de ce choix éditorial. Ces fausses informations peuvent avoir un impact considérable sur l’opinion publique et la politique, même si elles semblent à première vue absurdes et sans valeur informationnelle.
Aborder ce sujet permet non seulement de sensibiliser le public à la manipulation de l’information, mais également de souligner l’importance du discernement et de la vérification des sources dans un paysage médiatique souvent saturé de fausses nouvelles et de théories conspirationnistes.
En mettant en lumière les mécanismes de diffusion des fausses nouvelles et en encourageant une réflexion critique sur la manière dont nous consommons et interprétons l’information, France Culture remplit sa mission de chaîne du service public.
Le ramadan, et le carême ?
Depuis quelques jours dans leurs messages, des auditeurs expriment un sentiment d’iniquité dans la couverture médiatique entre le ramadan et d’autres événements religieux tels que le carême et yom kippour. Certains se plaignent du manque de représentation équitable des différentes traditions religieuses, soulignant une prédominance de la couverture médiatique du ramadan par rapport à d’autres fêtes religieuses.
Certains voient cette disparité comme une forme de discrimination ou de promotion de l’islam, tandis que d’autres demandent simplement un traitement équitable et une représentation adéquate de toutes les religions :
« D’année en année les infos et les émissions concernant le ramadan sont de plus en plus nombreuses. Ce matin une émission sur le sport et le ramadan. Je ne suis pas religieuse mais je crois que les infos concernant le carême sont complètement inexistantes, et je ne souhaite pas qu’elles soient traitées d’ailleurs. »
« Pourquoi parlez-vous uniquement du ramadan ? Je vous rappelle que nous sommes en période de carême, ce dont vous ne parlez jamais. »
« Quelle mouche a piqué ce matin votre journaliste -pour qui j’ai une grande estime par ailleurs- pour nous souhaiter un bon ramadan, nous sommes en plein carême et je ne l’ai pas entendu nous souhaiter un bon carême, ce qui me paraissait plus que normal sur une chaîne du service public censée être laïque. Merci de le lui rappeler !!! C’est indigne du service public !!! »
Pourquoi évoquer le ramadan sur les antennes ? Les journalistes avancent que c’est l’une des pratiques religieuses les plus suivies en France. La communauté musulmane est estimée à plus de 5 millions de personnes dans notre pays et entre 4 et 4,5 millions d’entre elles observeraient le ramadan. Les rites associés au ramadan, tels que le jeûne quotidien, les prières collectives et les repas de rupture du jeûne sont souvent mis en avant dans les médias en raison de leur visibilité et de leur impact sur la vie quotidienne des pratiquants. En comparaison, les pratiques du carême sont moins visibles dans l’espace public, ce qui peut conduire à une couverture médiatique relativement moins importante.
Il est tout à fait compréhensible que certains auditeurs puissent exprimer leur étonnement, voire leur interrogation, d’entendre, en particulier dans une tranche d’information sur une chaîne de service public, une longue séquence consacrée à une religion spécifique, abordant des sujets tels que les croyances, les prophètes et les divinités. Cette indignation aurait peut-être été moins marquée dans une émission de programme dédiée aux questions religieuses.
Le service public, par définition, a pour mission d’offrir un contenu qui reflète la pluralité des pensées, des croyances et des opinions qui composent le tissu social. Il s’engage à présenter une programmation équilibrée qui respecte la neutralité et l’objectivité, en s’efforçant de servir l’intérêt général et de refléter la diversité des points de vue, sans favoriser une croyance ou une perspective au détriment d’autres.
Il est important de reconnaître que la religion et la spiritualité constituent des éléments significatifs de l’expérience humaine et de la culture, méritant d’être abordés sur les antennes avec les valeurs de diversité et d’équité au cœur de la mission d’un service public.
Le podcast « Outside Kaboul »
Cette semaine, coup de cœur des auditeurs pour le podcast » Outside Kaboul« , la correspondance sonore signée Caroline Gillet -de France Inter- Marwa et Raha -deux jeunes femmes afghanes au cœur de cette narration- réalisée par Anna Buy et traduit par Louise Cognard.
Les témoignages de Marwa et Raha ont non seulement touché les auditeurs, entre sourires et larmes, mais aussi profondément impliqué ceux-ci dans ces récits de vie et les défis rencontrés depuis la prise de pouvoir des talibans à Kaboul.
La puissance de la narration est saluée pour son approche sensible et humaine qui permet d’appréhender les complexités du monde, les réalités de la guerre, de la violence et de l’exil à travers les expériences de ces femmes afghanes. Les auditeurs expriment le souhait de recevoir régulièrement de leurs nouvelles.
Des remerciements sont également adressés à France Inter, qui rend possible la diffusion de ces récits, contribuant ainsi à une prise de conscience collective sur ces destins bousculés. Une fois encore, de tels podcasts confirment le pouvoir inégalé du récit audio et sa capacité à sensibiliser, éduquer et émouvoir.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France