1. Les guerres au Proche-Orient
2. « Regarder Gaza en face » : la série de Cultures Monde sur France Culture
3. Le billet de Sophia Aram : « Les voyages forment la jeunesse »
4. Soutien des auditeurs à Patrick Cohen
5. Louis Sarkozy et Bernard Cazeneuve invités de « Questions politiques »
6. Arrêt de l’émission « Signes des temps » sur France Culture
7. L’usage du terme « conclave », l’avis d’un linguiste
8. Langue française
Les guerres au Proche-Orient
A la lecture des très nombreux messages reçus sur la couverture du conflit Iran-Israël et, plus largement, de la situation au Proche-Orient, il apparait que chaque mot prononcé sur les antennes est scruté, interprété, et parfois vécu comme un positionnement politique d’où une forte polarisation des points de vue des auditeurs qui nous écrivent.
Certains critiquent un « déséquilibre perçu en faveur d’Israël », pointant la multiplication de témoignages israéliens et l’absence de voix palestiniennes, qu’ils imputent à la politique d’interdiction d’accès à Gaza. Ils dénoncent une « information partielle », d’un seul côté, et regrettent un manque de questionnement critique vis-à-vis des responsables israéliens invités à l’antenne. Pour eux, le rôle d’un média public est de rendre visible l’invisible, y compris la souffrance des populations palestiniennes.
À l’inverse, d’autres auditeurs s’indignent de ce qu’ils perçoivent comme une « hostilité systématique à l’égard d’Israël », accusant des intervenants d’ignorer la menace réelle que fait peser l’Iran sur l’État hébreu.
Quelques messages questionnent la pertinence et la diversité des voix invitées, leur représentativité, et s’interrogent sur le sens et la responsabilité des mots employés dans un contexte aussi tendu.
Ce samedi à 13h20 et 16h20 sur Franceinfo, dans “le rendez-vous de la médiatrice”, Franck Mathevon, directeur de la rédaction internationale de Radio France, répondra aux questions des auditeurs sur la couverture des guerres au Proche-Orient.
Alors que des auditeurs saluent la richesse des reportages produits sur le terrain, d’autres s’interrogent sur la manière dont les journalistes parviennent à maintenir un équilibre entre rigueur factuelle, diversité des points de vue et contraintes d’accès à l’information, dans un contexte géopolitique tendu et évolutif.
Un point revient de manière récurrente dans les messages reçus : l’impossibilité pour les journalistes de se rendre à Gaza, en raison des restrictions imposées par les autorités israéliennes, alors que des reportages continuent d’être réalisés en Israël. Ce déséquilibre subi suscite l’incompréhension de certains auditeurs, dont plusieurs estiment qu’il crée « une forme de complicité involontaire ». Ils suggèrent que l’information en provenance d’Israël soit, dans ce contexte, traitée avec la même retenue que celle, contrainte, concernant Gaza. Comment le directeur de la rédaction internationale de Radio France analyse-t-il une telle suggestion ?
Cette interview sera l’occasion pour Franck Mathevon d’expliquer les choix éditoriaux, les conditions concrètes de travail des correspondants, et les principes qui guident, malgré les obstacles, le traitement journalistique de ces événements sensibles.
“Regarder Gaza en face”
Des auditeurs plébiscitent la série « Regarder Gaza en face » réalisée par Julie Gacon et son équipe. Ils soulignent la « qualité remarquable » du travail journalistique, à la fois « rigoureux », documenté, « humain et percutant ». Certains estiment que cette série offre aux auditeurs des clés de compréhension solides sur une réalité complexe et bouleversante.
Julie Gacon sera l’invitée du “rendez-vous de la médiatrice” ce vendredi à 18h50 sur France Culture. Elle évoquera le fil rouge choisi pour construire cette série documentaire, les critères qui ont guidé la sélection des voix entendues — civils, historiens, chercheurs, humanitaires, artistes, analystes —, ainsi que les difficultés rencontrées lors de la préparation de ces quatre heures d’émissions.
La chronique de Sophia Aram
Diffusée le 16 juin dernier, cette chronique a suscité un grand nombre de réactions. Des auditeurs expriment un « profond malaise » à l’écoute de ce billet, perçu comme « moqueur » à l’égard d’initiatives citoyennes en faveur de Gaza, dans un contexte humanitaire particulièrement dramatique. S’ils reconnaissent la nécessité de l’humour et de la satire sur l’antenne, beaucoup dénoncent ici un « manque de nuance », avec des formules minimisant la gravité des événements en cours. Plusieurs messages évoquent un ton jugé « blessant », dans un contexte de guerre où la souffrance des civils appelle, selon eux, à davantage de « modération ».
Certains auditeurs estiment que ce type de chronique s’éloigne de la mission de service public. D’autres, tout en saluant l’excellente plume de Sophia Aram, estiment qu’elle a perdu le sens de « la satire constructive », préférant s’attaquer à des citoyens engagés plutôt qu’aux puissants. Plusieurs témoignages évoquent une forte déception personnelle, notamment de la part d’auditeurs eux-mêmes impliqués dans des initiatives solidaires, qui se disent « humiliés » ou « blessés » par des propos perçus comme « caricaturaux ».
Si les auditeurs reconnaissent la liberté d’expression des chroniqueurs et la tradition satirique de France Inter, ils rappellent aussi l’importance d’un « ton juste et d’un équilibre », notamment lorsque des sujets aussi sensibles sont abordés.
Soutien des auditeurs à Patrick Cohen
L’éditorialiste politique de France Inter est massivement soutenu par les auditeurs. Ils saluent la qualité de ses chroniques sur France Inter, en particulier celle consacrée à l’audiovisuel public mardi dernier. Ils ont été nombreux à apprécier son sang-froid face aux attaques de la ministre de la Culture, Rachida Dati, lors de leur échange, le soir même, sur le plateau de « C à vous » sur France 5.
Beaucoup jugent l’attitude de la ministre « agressive », voire « intimidante », et estiment qu’elle a tenté de détourner le débat en recourant à « des attaques personnelles » au lieu de répondre sur le fond. Certains auditeurs jugent son comportement disqualifiant pour une ministre, évoquant une « posture de règlement de comptes » et une forme de « stratégie de diversion » face aux critiques. Leurs messages traduisent une inquiétude quant à la manière dont le débat sur l’audiovisuel public est mené au plus haut niveau politique.
Louis Sarkozy sur France Inter
Dimanche dernier, sur l’antenne de France Inter, Louis Sarkozy a réagi à l’exclusion de son père, Nicolas Sarkozy, de la Légion d’honneur. L’ancien président de la République s’est vu retirer sa grand-croix – la plus haute distinction de l’ordre – à la suite de sa condamnation définitive à un an de prison ferme pour corruption dans l’affaire des écoutes, une décision entérinée par un arrêté publié au Journal officiel.
Invité dans l’émission “Questions politiques”, Louis Sarkozy a tenu à défendre son père en rappelant que cette décoration lui avait été remise en 1993 par Jacques Chirac, alors président, pour son rôle lors de la prise d’otages de Neuilly. Et de conclure avec cette déclaration : « À tous ses détracteurs, je leur souhaite un centième de son courage.» Il a également affirmé : « Il n’y a aucune difficulté à être le fils de mon père, il n’y a que fierté et honneur, tous les jours. »
C’est précisément cette filiation qui a suscité de très nombreuses réactions critiques de la part des auditeurs. Beaucoup s’interrogent sur la « légitimité » d’une invitation fondée avant tout « sur un nom », regrettant qu’une « tribune sur une chaîne du service public » soit accordée non à un auteur, un penseur ou un acteur engagé du débat public, mais à un « fils de », dont la notoriété repose moins sur des travaux que sur « l’héritage familial ». Ils contestent la légitimité de cette tribune, accordée à une personnalité perçue comme « sans mandat électif », sans « reconnaissance intellectuelle établie », ni « engagement avéré dans le débat public ». Ils regrettent un traitement jugé « complaisant », « sans questionnement critique » sur certaines de ses prises de position controversées sur « le climat, l’Algérie ou Gaza ».
Pour quelle raison Louis Sarkozy a-t-il été invité sur France Inter ? s’interrogent des auditeurs.
Chaque dimanche, l’émission « Questions Politiques » accueille deux invités : un invité principal, qui occupe la majeure partie du programme, et un second invité, en toute fin d’émission, pour un format court. Ce second invité peut être un auteur, un expert, un journaliste ou une personnalité engagée dans le débat public.
C’est dans ce cadre que Louis Sarkozy a été reçu le 15 juin dernier à 12h. Son invitation, fixée depuis quelques jours, faisait suite à la publication de son ouvrage « Napoléon Bonaparte, l’empire des livres », déjà largement commenté dans les médias. La direction de l’information de France Inter a volontairement attendu plusieurs semaines après sa sortie, afin de l’aborder avec davantage de recul, dans un format court, comme c’est d’usage pour le second invité de l’émission.
Il s’avère que ce 15 juin tombe, à 1h27 du matin, une alerte de l’AFP annonçant que Nicolas Sarkozy, après sa condamnation dans l’affaire des écoutes, est exclu de la Légion d’honneur, Suivent alors plusieurs dépêches sur ce qui constitue l’une des informations de la matinée, difficile dans un tel contexte de ne pas demander au fils de Nicolas Sarkozy, accueilli en direct sur l’antenne à la mi-journée, son avis sur le sujet.
L’arrêt de “Signes des temps”
L’arrêt annoncé de l’émission « Signes des temps » suscite une vive incompréhension et une profonde déception. De nombreux et fidèles auditeurs se disent attachés à la singularité de ce programme qui, chaque semaine, offrait selon eux un espace rare de réflexion, d’ouverture intellectuelle et de débat sans caricature. Ce qui est particulièrement salué, c’est la capacité de l’émission à inviter des intervenants aux points de vue divergents, souvent en désaccord entre eux ou avec l’animateur, mais toujours dans le respect mutuel et la clarté argumentaire.
Certains soulignent qu’ils n’étaient pas toujours en accord avec les idées exprimées, et que c’était précisément ce désaccord fécond qui rendait l’écoute stimulante : penser « contre soi-même », enrichir ses repères, affiner sa propre opinion. D’autres mettent en avant le rôle formateur de l’émission, qui leur faisait découvrir des auteurs, des concepts, et leur permettait de prolonger l’écoute par la lecture ou la discussion.
Au-delà de l’émission elle-même, des auditeurs expriment une inquiétude plus large : celle de voir disparaître un lieu médiatique qui faisait « le pari de l’intelligence » et laissait place à la complexité du réel, loin des formats simplifiés ou émotionnels. Pour eux, « Signes des temps » représentait une forme d’exigence intellectuelle dont ils redoutent l’effacement dans l’espace radiophonique.
La direction de France Culture justifie cette décision par un souci de renouvellement et d’adéquation entre les programmes et leur réception par le public, même si l’audience ne détermine pas seuls les choix éditoriaux. Elle rend hommage au travail de Marc Weitzmann durant les huit saisons de l’émission, et réaffirme son engagement à faire vivre le pluralisme et le débat d’idées sur l’antenne. La réponse de la direction est à lire ci-dessous dans cette Lettre.
L’usage du mot « conclave » dans la sphère politique
Plusieurs auditeurs s’indignent de l’usage récurrent, par les journalistes de Radio France, du terme « conclave » pour désigner des réunions politiques, notamment dans le contexte des négociations sur la réforme des retraites. Ils rappellent que ce mot désigne à l’origine une réunion de cardinaux destinée à élire un pape, et critiquent son emploi dans un État laïque. Certains y voient un écho excessif au langage employé par des figures politiques proches de la culture catholique, comme François Bayrou, voire une forme de relais involontaire d’un vocabulaire à forte connotation religieuse. Ils appellent les journalistes à davantage de rigueur lexicale et à une vigilance accrue quant à la neutralité des mots utilisés dans l’espace public.
En réponse à ces interrogations, nous proposons aux auditeurs le point de vue du linguiste Bernard Cerquiglini, professeur émérite de linguistique à l’Université de Paris, ancien recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie. Cet éminent spécialiste revient sur l’évolution sémantique du mot « conclave » et son usage actuel dans la sphère politique. Sa réponse, à la fois éclairante et nuancée, ne manque pas d’intérêt et j’invite les auditeurs intéressés par le sujet, à m’écrire pour me livrer leur point de vue sur l’analyse proposée dans cette vidéo.
Le mois de « jouin » n’existe pas (mais vous êtes nombreux à l’avoir entendu)
Ah, le mois de juin ! Ce joli mois charnière entre le printemps et l’été, entre examens et vacances. Mais voilà qu’un mystère phonétique s’invite chaque saison dans les studios de… France Inter.
Vous êtes nombreux à le signaler avec le sourire et un brin de désarroi orthophonique : certains journalistes de la chaîne ont une manière bien à eux de prononcer le mois de juin. Pas tout à fait « juin », pas vraiment « juin » non plus. Plutôt… « jouin ». Oui, « jouin », comme si une voyelle égarée s’était invitée entre deux syllabes. Résultat : le sixième mois de l’année devient une monosyllabe vaguement anglo-saxonne, une variante vaguement « arrondie ».
Cette étrange prononciation se glisse dans certains journaux ou des chroniques. D’où ces messages amusés, mécontents ou carrément perplexes :
« À quand la réforme du calendrier phonétique ? »
« Juin, ce n’est pas une diphtongue ! »
« Est-ce que « jouillet » est en préparation ? »
« Ça y est nous en sommes à ce mois surnuméraire : le mois de jouin, celui qui précède le mois de jouillet. Cette année France Inter aura encore quatorze mois dont deux virtuels.»
« Une chose tracasse mon agenda : est-ce que le 30 jouin (join ?) est bien le jour qui précède le 1er jouillet? »
« Si votre humoriste du matin sur France Inter et plein d’autres intervenants pouvaient nous éviter ce JOINT qui nous écorche les oreilles ce serait bien. Ce beau mois de JUIN inviterait plutôt à batifoler dans la bonne odeur de FOIN n’est-ce pas ? Pas de FUIN !»
Faut-il s’offusquer de cette élocution impropre ? L’erreur est humaine, la langue est vivante, et la prononciation, parfois, glissante. Mais vos remarques, souvent pleines d’humour et de tendresse, nous rappellent combien la précision du mot parlé est aussi un signe de respect pour l’oreille qui écoute. Alors oui, en juin – et pas en jouin- prenons le temps de redonner à ce mois son doux « in », nasal et élégant.
Merci pour votre intérêt pour la langue française et votre vigilance linguistique !
Comme vous le savez, les messages sur la langue française sont les plus consultés sur le site de la médiatrice, nous avons donc lancé en ce mois de juin une nouvelle série de portraits vidéos de journalistes, animateurs, producteurs et humoristes dans lesquelles ces voix de Radio France, que vous connaissez bien, prennent le temps de parler de mots : ceux qu’ils choisissent, ceux qu’ils évitent, ceux qu’ils aiment, leurs tics de langage, les anglicismes et bien sûr, du mot « radio », lui-même chargé d’imaginaires. Ces vidéos sont disponibles dans cette Lettre sous la thématique « Langue française » et les prochaines seront publiées tout au long de l’été sur le site de la médiatrice.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France