- Attentat de Moscou : Jordan Bardella diffusé dans le 13h de France Inter
- L’annonce du cancer de Kate Middleton :
- Hiérarchie de l’information sur Franceinfo le 22 mars
- Hiérarchie de l’information dans le journal de 9h le 23 mars sur France Inter
- La famille royale sur France Inter
- Les élections européennes
- Le retrait provisoire de l’antenne de Léa Salamé
- François-Xavier Bellamy, invité du 7h50 de France Inter
- Pierre Moscovici, invité du Grand entretien de France Inter
- Nicole Belloubet, invitée du 7h50 de France Inter
- Stanislas Dehaene, invité du Grand entretien de France Inter
- Langue française
L’attentat à Moscou versus le cancer de Kate Middleton
Dans la soirée de vendredi dernier, deux sujets, d’importance très différente, mais simultanés dominaient l’actualité : la mort de plusieurs personnes – on ne connaissait pas alors le nombre exact de victimes – dans une fusillade suivie d’un incendie dans une salle de concert en banlieue de Moscou. Plusieurs hommes armés avaient pénétré dans le Crocus city Hall. Les autorités russes dénonçaient alors « un attentat terroriste sanglant ».
Et l’annonce, par la princesse de Galles, âgée de 42 ans, de son cancer nécessitant un traitement de chimiothérapie préventive.
Dès vendredi soir, les messages exprimaient une critique forte quant au choix éditorial de donner un large écho à l’histoire personnelle de Kate Middleton sur un événement géopolitique majeur et tragique.
Ce choix a été perçu comme un alignement sur le contenu des magazines people, des auditeurs ayant eu le sentiment de glisser d’un traitement journalistique sérieux, telle que doit être la mission d’un service public d’information, vers une logique de presse à sensation. Dans leurs messages, ils s’interrogent sur les critères de hiérarchisation et l’intérêt d’informations liées à la famille royale britannique, estimant que le focus sur la santé d’un membre de la royauté, ne devrait pas éclipser des sujets de plus grande envergure sociale, économique ou politique.
« Stupéfaction en écoutant le journal de 9h le samedi 23 mars 2024 : le premier titre de toute la presse mondiale concerne la tuerie terroriste de la veille au soir à Moscou mais pas pour France Inter qui annonce en titre principal et détaille l’annonce du cancer de Kate Middleton ! Certes, c’est un sujet de compassion mais franchement très mineur par rapport au nombre de victimes à Moscou et aux implications géo politiques de cet attentat de Daesh, non ?
Merci, pour une fois, de bien vouloir reconnaître cette erreur au lieu d’être « la défense et illustration » de cette erreur affligeante. »
« Les informés de 20h le 22 mars. Ouverture de l’émission et les 20 premières minutes sur « l’événement de la soirée », à savoir le cancer de Kate Middleton, alors qu’un attentat à Moscou fait état d’au moins 40 morts à la même heure avec les conséquences géopolitiques que tout le monde peut imaginer. Les bras m’en tombent : aucune hiérarchie de l’information. »
Pourquoi relayer l’annonce du cancer de Kate Middleton ?
La couverture médiatique de la santé des personnalités publiques suscite souvent un débat sur l’équilibre entre l’intérêt public et le respect de la vie privée. En l’occurrence, la décision de Kate Middleton de parler publiquement de l’existence de son cancer change la nature de cette information de privée à publique. Cette communication transparente peut être perçue comme un acte d’authenticité et de responsabilité publique, afin de réduire les spéculations la concernant.
Au-delà de la simple volonté de faire cesser les affabulations, le témoignage de Kate Middleton peut avoir un effet significatif sur la sensibilisation du public au dépistage. Rappelons que lors de l’annonce du cancer du roi Charles III, le site d’un organisme britannique d’aide aux malades a enregistré une augmentation de 42% de ses connexions et la fréquentation du site des services de santé publique consacré à cette maladie a été multipliée par dix. L’annonce de la princesse de Galles peut également contribuer à briser le tabou parfois encore associé au cancer.
Dans le 13/14 ce vendredi, Marc Fauvelle, directeur de l’information de France Inter, a répondu aux remarques des auditeurs sur le traitement éditorial de cette information. Le rendez-vous de la médiatrice sur France Inter est à réécouter ici.
Nous évoquerons également la couverture journalistique de ces deux informations tombées en soirée, vendredi dernier, sur l’antenne de Franceinfo, demain dans le rendez-vous de la médiatrice, à 13h20 et 16h20 avec Florent Guyotat, directeur adjoint de l’information.
L’attentat de Moscou
Dans son journal de 13h, samedi 23 mars, France Inter a diffusé la réaction de Jordan Bardella, président du Rassemblement national, pour commenter l’attentat revendiqué par l’État islamique vendredi soir à Moscou. Ce choix a suscité déception et inquiétude. Les auditeurs ne comprennent pas que des réactions de différentes formations politiques, ou de l’exécutif, n’aient pas été proposées, donnant le sentiment d’offrir une tribune exclusive au Rassemblement national. Ils expriment leur malaise face à ce qu’ils perçoivent comme une banalisation ou une promotion médiatique de ce parti par une radio publique, soulignant un manque de pluralité des opinions au sein d’un même journal.
« Je suis choqué par la tribune offerte à Jordan Bardella, aujourd’hui samedi 23 mars, dans le journal de 13h, pour commenter l’attentat revendiqué par l’Etat islamique en Russie. N’y avait-il vraiment aucune personne politique qui aurait pu réagir de façon mesurée et digne ? Non, vous préférez solliciter cet homme. Et ensuite vous embrayez sur la famille royale britannique. Quelle déception, je suis de plus en plus réticent à vous écouter et ce genre d’anecdote me conforte dans mes choix de lecture papier. »
« Plus qu’étonné d’entendre dans votre 13/14 Jordan Bardella comme seule voix d’expression à propos des attentats à Moscou. Il a pu ainsi longuement développer sa vision de l’immigration en France. Comment ne pas penser qu’il s’agit d’une volonté particulière du journaliste de favoriser ce point de vue ? Consternant. Je ne vois pas bien la ligne éditoriale de France Inter. »
Dans le 13/14 ce vendredi, Yaël Goosz, chef du service politique de France Inter, a répondu aux remarques des auditeurs sur le traitement éditorial de cette information :
“Notre journaliste Elodie Forêt était en reportage à Belfort pour suivre la campagne de la tête de liste RN Jordan Bardella, et il a été l’un des premiers à réagir, au micro, lors d’une déambulation sur le marché Fréry. C’est pour ça qu’on a l’a entendu à 13h. Mais nous étions aussi, ce samedi-là, à Blois, avec Gabriel Attal, invité du congrès du Modem et il a réagi lui aussi, exprimant sa compassion et solidarité envers le peuple russe. Le Premier ministre s’est exprimé en fin de journée, et France Inter l’a diffusé dans ses éditions du soir. Donc, vous voyez, aucun parti-pris, simplement il y a plusieurs journaux dans une journée d’Inter, et l’équilibre se fait sur l’ensemble des éditions”.
L’intervention de Yaël Goosz dans le rendez-vous de la médiatrice sur France Inter est à réécouter ici.
Les élections européennes
Le 9 juin prochain, les Français sont invités à élire leurs représentants au Parlement européen qui comptera 720 représentants, dont 81 pour la France.
Des auditeurs souhaiteraient être davantage informés des propositions éditoriales des chaînes pour les éclairer sur les élections européennes. Au regard de l’importance de ces élections pour l’avenir de l’Union européenne et, par extension, pour les citoyens de chaque État membre, ils attendent des rédactions des analyses détaillées des programmes de chaque parti, des débats équilibrés et des explications claires sur les enjeux de ces élections dans le quotidien des citoyens.
Dans leurs messages, des auditeurs déplorent l’absence d’informations pédagogiques sur le fonctionnement et le rôle des institutions européennes, ainsi que sur les activités législatives du Parlement Européen, soulignant l’importance de comprendre comment les différents partis votent au niveau européen par rapport à leurs communications au niveau national.
Ils mettent en avant un décalage entre le peu de représentation médiatique de l’Europe et son importance réelle dans le quotidien des citoyens, dans un contexte où la montée de l’extrême droite représente une préoccupation.
Des auditeurs apprécieraient d’entendre des chroniques consacrées à l’Europe dans les matinales afin de démêler les complexités des rouages de l’Union européenne. De plus, ils questionnent l’absence de reportages sur les politiques et les réalisations de l’Union dans divers domaines tels que l’agriculture, l’éducation, la santé, et la sécurité, entre autres.
Ces observations pointent la nécessité de démystifier l’Union européenne, souvent perçue comme une entité lointaine et « coercitive », en raison d’un déficit d’information qui empêcherait une compréhension approfondie de son impact et de ses bénéfices pour les citoyens européens :
« Je me permets de vous écrire car je regrette qu’à l’approche des élections européennes, le sujet de l’Europe soit aussi peu traité. Malheureusement : pas d’information pédagogique et explicative sur ce que sont, représentent et le rôle qu’ont chacune des institutions européennes. Pas d’information sur ce qui se vote de façon régulière au Parlement Européen et sur le résultat des différents votes en précisant comment ont voté les différents partis. Il me semble que cela est très important car certains partis communiquent d’une façon au niveau national et votent de façon différente au niveau européen. On le sait très peu. Pas d’information systématique sur l’actualité des institutions européennes. En fait, l’Europe est oubliée et elle est bien loin du coup dans nos imaginaires alors que le danger d’une extrême droite victorieuse se profile.
Pourquoi ne pas glisser de façon urgente dans le 7-10 sur France Inter, 5 minutes d’information sur l’Europe appelé par exemple » les 5 minutes Europe » ? Ces minutes ne seraient pas superflues et permettraient aux citoyens de mieux comprendre pourquoi il est primordial de voter aux Européennes. »
« Quand allez-vous informer de ce qui se passe dans les 26 autres pays ? En matière d’agriculture, d’éducation, de santé, de mobilités, d’industrie, de sécurité, de préservation des paysages… Comment voulez-vous que l’Europe ne soit pas vue comme une administration coercitive si vous n’aidez pas les auditeurs à mieux comprendre l’Europe ? Pourquoi n’y a-t-il pas de reportages réguliers sur l’Europe à la fin de chaque journal par exemple ? »
Il est important de préciser que ce travail d’information et de pédagogie a déjà été largement amorcé sur les différentes antennes. Florent Guyotat, directeur adjoint de Franceinfo a décrit tout le dispositif de la chaine dans le rendez-vous de la médiatrice diffusé le 2 mars.
Le programme de Franceinfo pour couvrir les élections européennes est à retrouver ici.
Hier, Florian Delorme, délégué aux programmes de France Culture, a répondu aux interrogations des auditeurs sur la couverture des élections européennes dans le rendez-vous de la médiatrice diffusé dans « Le Temps du débat » d’Emmanuel Laurentin.
Le programme proposé par France Culture à l’occasion des élections européennes est à retrouver ici.
France Inter décline également de nombreuses propositions éditoriales pour ces élections européennes à découvrir ici.
François-Xavier Bellamy dans le 7h50 sur France Inter
Lundi matin, Sonia Devillers interviewait François-Xavier Bellamy, tête de liste du parti Les Républicains, pour les élections européennes. Nous avons reçu un abondant courrier d’auditeurs se disant surpris par la tournure prise par cette interview au cours de laquelle la journaliste demande à plusieurs reprises à son invité pour qui il a voté au second tour de l’élection présidentielle en 2022. Il ne répond pas et évoque le principe de confidentialité du scrutin.
De nombreux auditeurs n’ont pas compris cette insistance journalistique :
« Je suis choquée qu’une journaliste sur France Inter insiste lourdement pour connaître les choix de vote d’une personne. S’il y a un isoloir, c’est pour pouvoir choisir sans aucune pression, que je sois un homme politique ou non. »
« Mon message concerne l’interview de François-Xavier Bellamy.
Il est demandé à M. Bellamy pour qui il a voté au deuxième tour de l’élection présidentielle en 2022. M. Bellamy refuse de répondre en invoquant explicitement le principe de confidentialité du scrutin.
La journaliste insiste alors, à sept reprises, sur un ton comminatoire, pour savoir pour qui M. Bellamy a voté. Faut-il rappeler aux journalistes de France Inter la loi concernant la confidentialité du scrutin ? »
Marc Fauvelle, directeur de la rédaction, a évoqué cette séquence dans le rendez-vous de la médiatrice de France Inter ce vendredi et Sonia Devillers a également souhaité répondre aux auditeurs et indiquer pour quelles raisons elle a demandé à François-Xavier Bellamy quel bulletin de vote il avait glissé dans l’urne lors de l’élection présidentielle de 2022 : « Les éléments de contexte sont importants : c’est la seconde fois que j’interviewais François-Xavier Bellamy. La fois précédente, la question de son vote à la dernière présidentielle ne lui a pas été posée, ça ne m’était même pas venu à l’esprit ! Lorsqu’il est l’invité de France Inter lundi 25 mars, la situation est différente. Durant le week-end, a eu lieu le meeting de lancement de campagne des Républicains à Aubervilliers. Sur scène, Céline Imart, numéro 2 sur la liste, clame fièrement « Je suis fière de n’avoir jamais voté pour Emmanuel Macron, ni en 2017, ni 2022 ». Là, une salle de 3500 spectateurs applaudit à tout rompre. La séquence a été reprise et commentée par tous les médias. Comme François-Xavier Bellamy est tête de liste, je lui pose naturellement la question : « Et vous ? Vous êtes comme votre n°2, fier de ne jamais avoir voté Macron ? » Voilà d’où est venue la question.
Mon insistance s’explique par le fait que François-Xavier Bellamy commence par me répondre qu’il n’a rien à cacher, puis me dit qu’il l’a déjà raconté au micro de France Inter, puis il ne répond finalement rien, puis il finit par asséner que c’est le secret de l’isoloir.
Ses propres contradictions, d’une phrase à l’autre, m’ont poussé à lui faire dire les choses clairement. »
Au cours d’une interview, l’insistance à poser une question spécifique, comme celle de savoir pour qui un homme politique a voté lors d’une élection présidentielle, peut susciter des critiques mais s’explique souvent par plusieurs raisons ou objectifs journalistiques. La journaliste peut chercher à établir un lien entre les déclarations publiques de l’homme politique et ses actions personnelles, comme le vote, pour vérifier la cohérence de ses positions politiques. Cela peut aider les auditeurs à mieux comprendre les convictions réelles de la personne interviewée.
La question peut être jugée pertinente si le candidat occupe une position influente ou si ses choix électoraux peuvent refléter ou influencer des tendances politiques plus larges. Ce qui est précisément le cas de François-Xavier Bellamy.
Lors d’une interview politique, les journalistes cherchent souvent à poser des questions qui ne sont pas prévisibles et qui poussent l’interviewé à sortir de ses réponses préparées. Par ailleurs, la manière dont une personne répond à une question difficile ou sensible peut en dire long sur sa capacité à gérer la pression et sa transparence. Cela peut être particulièrement révélateur pour un homme politique.
Cela dit, il est compréhensible que des auditeurs aient pu trouver l’insistance sur la question du vote personnel de François-Xavier Bellamy intrusive. Dans notre société, le vote est considéré comme un acte profondément personnel et confidentiel, un principe fondamental qui garantit la liberté et l’intégrité de nos choix politiques. Insister pour obtenir une réponse à une question aussi personnelle peut être perçu comme une atteinte à cette intimité. Mais, comme l’explique clairement Sonia Devillers, la question a uniquement été motivée par la déclaration de Céline Imart, numéro deux de la liste LR : « Je suis fière, plus que jamais, de n’avoir jamais voté pour Emmanuel Macron, ni en 2017, ni en 2022. ».
La critique des auditeurs peut refléter un souhait du respect de la vie privée alors qu’il s’agissait pour Sonia Devillers de la quête d’une information rendue publique par l’une candidate du parti « Les Républicains ».
Léa Salamé dans le “7-10” pendant la campagne des Européennes
Dans le rendez-vous de la médiatrice ce vendredi, Marc Fauvelle, directeur de l’information, est revenu sur la présence de Léa Salamé, journaliste vedette de France Inter, alors qu’elle partage sa vie avec Raphaël Glucksmann, tête de liste PS-Place publique au scrutin européen.
Des auditeurs nous écrivent en effet à ce sujet depuis plusieurs semaines et s’interrogent sur son maintien dans le « 7-10 » lors des rendez-vous politiques. Ils évoquent un potentiel conflit d’intérêt :
« Pourquoi continue-t-elle à participer à des interviews politiques dans la matinale de France Inter alors que son conjoint est tête de liste pour les élections européennes ? Léa Salamé s’était mise en retrait lors du dernier scrutin européen pourquoi n’en est-il pas de même cette fois ci ? »
« Compte tenu de la campagne pour les élections européennes qui maintenant est bien engagée, l’ensemble des têtes de liste ayant lancé leur campagne il est difficile de comprendre le maintien pour les interviews politiques de Léa Salamé compagne de l’une des têtes de liste. Quelques soient les qualités de Mme Salamé. »
La réponse de Marc Fauvelle est à réécouter ici. Pour répondre de manière responsable à cette situation, France Inter va procéder en deux temps :
A partir de la semaine prochaine, Léa Salamé cessera de participer aux interviews et débats politiques. Cette première étape vise à éviter tout risque de conflit d’intérêts dans la couverture de la campagne électorale et des sujets politiques sensibles. Cette mesure est essentielle pour garantir l’objectivité du contenu de l’antenne pendant cette première période.
Ensuite, à partir du mois de mai, Léa Salamé quittera l’entretien phare de 8h20 ainsi que le débat de 9h05 sur France Inter. Ce retrait complet assure aux auditeurs l’engagement de France Inter envers une couverture équitable et non partisane des événements politiques, en particulier en période électorale.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France