Voici les principales thématiques abordées par les auditeurs dans leurs courriels du 15 au 22 janvier 2021. messages ci-dessous :
1. Les anglicismes
2. Alain Finkielkraut sur France Culture
3. Xavier Gorce, invité de l’Instant M sur France Inter
4. Christine Angot, invitée du Grand Entretien sur France Inter
5. Olivier Véran, invité du Grand Entretien sur France Inter
6. Coronavirus : la campagne vaccinale
7. Coronavirus : les établissements scolaires
8. L’investiture de Joe Biden
9. Les magasins Biocoop : l’enquête de Secrets d’info
10. La mort de Jean-Pierre Bacri
11. Coup de coeur pour le témoignage de Roxane dans Les Pieds sur Terre
12. La langue française
Les dictatures consenties
La prolifération d’anglicismes sur les antennes, le Blue Monday, la mort de Jean-Pierre Bacri, le dessinateur Xavier Gorce dans « l’Instant M » sur France Inter, le maintien d’Alain Finkielkraut sur France Culture, Christine Angot dans le « Grand entretien », les invités de la matinale de France Inter, les aléas de la campagne vaccinale et la générosité des auditeurs de l’émission « Les Pieds sur terre » sur France Culture sont au menu des thématiques cette semaine.
Chaque jour vous êtes très nombreux à nous écrire. Vous pouvez retrouver une sélection quotidienne des courriers sur le site de la médiatrice.
Cluster d’anglicismes
En ce début d’année, les messages évoquant le piteux niveau de langage sur les antennes de Radio France ne tarissent pas : « avalanche d’anglicismes, fautes de grammaire grossières, expressions infantiles, familiarité à la limite de la vulgarité » nous écrit un auditeur qui, en quelques mots, synthétise la teneur globale des nombreux messages que nous recevons.
Si des reproches sont fondés, il convient cependant de nuancer. Les critiques ne concernent pas l’ensemble des journalistes, animateurs ou producteurs, cependant elles rejaillissent incontestablement sur l’ensemble des intervenants de Radio France : « La langue française est admirablement belle, il faut choyer cette beauté, ne pas la souiller, la dénaturer, l’enlaidir. C’est également une langue précise, à la grammaire bien établie. On n’abîme pas un trésor, on le sauvegarde. Or, loin d’être convaincus du soin qu’il convient d’apporter aux paroles qu’ils prononcent, la plupart de vos journalistes paraissent animés d’un souverain mépris pour la langue de Racine, de Voltaire, de Proust, de Valéry ou encore de Mauriac. Ce sont des écorcheurs d’oreilles. »
En point d’orgue des plaintes, la prolifération d’anglicismes :
« Entendre au réveil, ce vendredi 22 janvier, que les “viewers” peuvent regarder les “gamers” en “live” et même en “replay” ! Whaouh ! “En termes de timing” (également entendu ce matin), il est à peine 7h30 et j’ai déjà les oreilles qui saignent !!!!! »
« Ces anglicismes à répétition sont vraiment pénibles à entendre. Pour le journaliste, ce n’est bien sûr qu’un anglicisme en 5 minutes de commentaires, mais pour l’auditeur, c’est un anglicisme toutes les 5 minutes ! »
« Je suis scandalisée par tous ces mots, termes anglais utilisés sur votre antenne de service public. Je pense que c’est par paresse car l’anglais est plus court. Ce qu’il faudrait c’est que TOUS les journalistes, animateurs parlent français et reprennent ceux de leurs invités qui par habitude, utilisent l’anglais pour communiquer, et immédiatement traduisent en français. Nous sommes des millions à vous écouter. Pensez-y, moins d’entre soi serait tellement mieux. »
« Les bloquebeustères sont en strimingue, qu’est-ce à dire ? »
« Je remarque que très très souvent des mots anglais sont utilisés lors de débats ou autres émissions, je n’ai rien contre la langue anglaise mais je ne la connais pas, et c’est très gênant de ne pas comprendre l’intégralité de ce qui est dit. Serait-il possible de faire une traduction simultanée des mots étrangers employés ? »
« Des gens parlent entre eux de notre (auditeurs-lecteur-péquin moyen) incompréhension des faits de l’actualité. Moi auditeur, je ne comprends pas de quoi ils parlent quand ils disent “fastechèquingue” »
« Je trouve affligeant que les médias en soient réduits à utiliser des mots « qui claquent » pour parler de choses que l’on connaît depuis toujours, souvent dans le seul but de capter l’attention du public. Était-il vraiment indispensable d’introduire le mot « burn out » alors que les mots « épuisement au travail », ou « dépression au travail », disaient très bien ce qu’ils voulaient dire ? »
« Merci à Sonia Devillers d’avoir repris son invitée sur tous les anglicismes qu’elle prononçait à tout bout d’interview. C’est lassant quand on est retraitée et que bien connaissant l’anglais on ne comprend pas les significations de ces mots utilisés dans le milieu professionnel. »
« J’ai écouté votre invité politique, à qui on pose la question du « benchmark ». D’évidence, j’attends une explication sur ce terme et rien. Certes, vous avez une fonction d’information, de réflexion, d’éveil du sens critique, mais vous ne savez pas qui vous écoute, et l’important c’est que vous ne restiez pas dans « l’entre soi », l’important c’est que même si on n’a pas la même culture langagière que vous, on ait envie de continuer à vous écouter. Risquer poliment une explication ne me choquerait pas, ce mot ou cette notion reste encore une énigme pour moi. »
L’usage pesant et continuel d’anglicismes sur les antennes est un fait objectif. Des professionnels de la radio rétorquent que, devant un micro, il faut parler comme tout le monde, d’autres, plus sensibles à la correction de l’expression, reconnaissent que les remarques des auditeurs leur permettent de prendre conscience de cet emploi immodéré de la langue anglaise.
Rappelons qu’en tant que média de service public, la valorisation et la préservation de la langue française est au cœur des missions de Radio France. Loin de valoriser celui ou celle qui l’emploie, un anglicisme traduit l’appauvrissement du patrimoine linguistique français. Pire, il peut être la manifestation d’une paresse de l’esprit, parfois d’un vide de la pensée. L’usage d’un anglicisme tente de faire passer pour une hypermodernité du discours un propos prétentieux et, en creux, une forme de snobisme.
Cette prolifération d’anglicismes a également été constatée rue de Valois, au cœur même du bureau de la ministre de la Culture. Une anecdote rapportée cette semaine par « Le Parisien aujourd’hui en France » nous apprend que Roselyne Bachelot, très sensible à la cause de la francophonie, a posé une tirelire sur la table de la salle de réunion de son cabinet : « Et le tarif, c’est un euro à chaque mot anglais utilisé ! » lit-on dans l’article. « Les membres de son équipe contribuent régulièrement mais la ministre elle-même s’est retrouvée mise à l’amende récemment (…) en utilisant les expressions « bottom up et top down ». Elle s’est immédiatement acquittée d’une pénalité de 4 euros (4 mots anglais, c’est 4 euros). »
Lundi, un anglicisme ponctuel a connu une belle vitalité sur les antennes : le « Blue Monday ».
Blue Monday
Le « Blue Monday » est le troisième lundi du mois de janvier, jour supposé le plus déprimant de l’année. Il s’agit surtout d’un concept marketing fumeux créé il y a un peu plus de quinze ans à l’occasion de la campagne publicitaire de l’agence de voyages Sky Travel.
Une opération commerciale initialement présentée comme une prétendue étude scientifique avec des calculs absurdes basés sur « les conditions météorologiques, notre niveau d’endettement, le temps écoulé depuis Noël, le temps passé depuis l’échec de nos résolutions du nouvel an » pour déterminer le jour le plus déprimant de l’année.
Ainsi posée, l’équation permet de déterminer que le troisième lundi de janvier est jour “le plus cafardeux de l’année”. Une bien jolie démonstration ! Et, pris au pied de la lettre, ce concept revête tous les atours d’une farce, guère apprécié par certains auditeurs :
« Et c’est reparti pour le Blue Monday ! Qu’est-ce que c’est que cette façon de nous imposer un concept anglosaxon dont nous n’avons que faire ! L’époque n’est pas assez anxiogène ? Qu’est-ce que cela nous apporte d’en remettre une couche ?
Aujourd’hui temps splendide sur les Alpes sous la neige, pour une fois j’oublie le gris, le froid, la pluie et le Covid alors, pitié, n’en rajoutez pas… »
Les journalistes n’ont évoqué le Blue Monday que pour s’en moquer en nous invitant au second degré.
Il n’en demeure pas moins que ce 18 janvier 2021 aura été, pour beaucoup, un lundi bien triste et morose :
« En ce jour, je rends hommage à Jean-Pierre Bacri, pour ses proches et le cinéma français. »
« Un homme d’esprit, à l’humour tendre et intelligent comme il en existe peu, engagé et certainement fatigué de ce monde des apparences. Merci Cher M. Bacri »
« Merci pour vos émissions « Popopop » et particulièrement pour celle d’aujourd’hui dédiée à cet homme immense… Humour, sincérité, générosité pour cet artiste, cet être entier que fut Monsieur Bacri… Cet acteur en qui chaque homme se reconnaît…Merci encore… »
Invité sur Franceinfo ce lundi, Jean-Michel Ribes, le directeur du Théâtre du Rond-Point, a évoqué un homme « qui avait cette capacité à toujours être lui-même, à toujours avoir ses idées, sa morale, ses valeurs qu’il défendait sans arrêt, c’était l’envers d’un people, c’était quelqu’un qui avait une densité extraordinaire”.
Le dramaturge a souligné « la grâce » de son ami : « Jean-Pierre Bacri ne devenait jamais un personnage, c’était le personnage qui devenait Jean-Pierre Bacri. La grâce c’est quelque chose qui ne s’explique pas, on l’a ou on ne l’a pas, il l’avait. Dès qu’il ouvrait la bouche même en bégayant, même avec ses approximations, il était là, on l’écoutait et il nous émouvait, il nous faisait rire”.
Comme une image
Lui aussi nous fait rire, sourire souvent, avec ses “Indégivrables », ces petits manchots à l’allure humaine, peuple d’une banquise en péril, mis en scène avec un graphisme minimaliste et un humour décalé pour dire l’absurde de l’époque.
Publié quotidiennement par le Monde, le dessinateur de presse Xavier Gorce, créateur des « Indégivrables », a quitté mercredi avec fracas le journal. Le dessinateur reproche au Monde d’avoir cédé à la pression des réseaux sociaux où l’un de ses croquis a suscité de nombreuses réactions.
Certains utilisateurs y ont vu une forme de transphobie et reproché au dessinateur de se moquer des victimes d’inceste, des critiques qu’il avait rejetées en bloc sur Twitter. La direction s’est excusée auprès des lecteurs qui auraient pu être blessés et a indiqué qu’elle n’aurait « pas dû publier » le dessin.
L’objet du délit ? Un croquis où l’on voit un jeune manchot demandant à un congénère : « Si j’ai été abusée par le demi-frère adoptif de la compagne de mon père transgenre qui est devenu ma mère, est-ce un inceste ? ». Ce dessin, voulant tourner en dérision l’inceste et la transidentité, n’a pas été censuré, il est toujours en ligne.
Xavier Gorce était, hier, l’invité de “l’Instant M” hier sur France Inter : “On met le doigt dans un engrenage terrible. A partir de quand on peut estimer que le sentiment de blessure est justifié ou pas ?”.
« A chaque fois qu’un dessin va heurter une communauté, une sensibilité, une personne qui se sent victime, on va s’excuser ? », s’interroge le dessinateur au micro de Sonia Devillers.
Xavier Gorce n’accepte pas ce « désaveu » du journal : “Le dessin a été publié, accepté, validé. Il y a quelque chose d’incompréhensible dans la démarche du journal. Je pense qu’ils font une erreur, une grossière erreur qui est celle de s’excuser, après une campagne de bashing (NDLR: dénigrement) sur les réseaux sociaux.”
Les auditeurs ont réagi à l’émission et apporté leur plein soutien au dessinateur :
« Je suis de tout cœur avec ce dessinateur. Sidérée par l’attitude du Monde. Nous sommes déjà frustrés du manque de liberté physique mais imaginez nos vies sans humour, sans provocation… Tout cela me désole terriblement. Laissons les dessinateurs dessiner, et même Finkielkraut dire des conneries. »
« Merci de donner la parole à Xavier Gorce et bravo à lui d’avoir claqué la porte du Monde après les communiqués de la rédaction qui n’assume pas d’avoir publié un dessin humoristique et décide se boucher le nez ! Idem pour « Finki » Même si certains de ses propos sont plus que maladroits et que je les réprouve je suis encore plus choquée de son éviction »
« Non aux censures antidémocratiques de tous les néomaccarthysmes qui prospèrent sur les réseaux sociaux ! Hier le dessinateur Xavier Gorce, aujourd’hui Alain Finkielkraut… Stop ! »
« Par exemple, peut-on être « Charlie » et se ranger dans le camp des tenants de la censure et de l’anti-blasphème ? Si une communauté de genre peut obtenir des excuses, pourquoi les intégristes musulmans n’en obtiendraient-ils pas ? La direction du Monde a ouvert une brèche dans la liberté de la presse et celle de penser »
« Soutien total. La cancel culture (NDLR: culture du bannissement) est un totalitarisme. Mortifère. Bravo de ne pas s’excuser quand il n’y a pas lieu de le faire. Il faut résister à la folie. »
Dans l’Instant M, Xavier Gorce a pointé l’impasse à laquelle peut conduire une telle décision : « De quoi va-t-on pouvoir parler, sur quoi va-t-on pouvoir dessiner ? Le dessin c’est d’abord de l’humour qui n’est pas fait pour se moquer. C’est principalement fait pour démontrer des travers de la société. Avec mes dessins, « je cherche à soulever dans l’actualité les choses absurdes de notre monde actuel). Je ne veux pas d’un titre qui se couche devant des campagnes de bashing sur les réseaux sociaux, il faut que la presse soit courageuse ».
Alain Finkielkraut sur France Culture
Du courage elle n’en manque pas, dixit les auditeurs de France Culture après avoir entendu Sandrine Treiner, la directrice de la chaîne hier dans le rendez-vous de la médiatrice.
Sujet de l’interview ? Alain Finkielkraut.
Le philosophe, chroniqueur sur LCI, a été congédié de la chaîne la semaine dernière pour ses propos sur l’affaire Duhamel. En substance Alain Finkielkraut s’est dit « contre un lynchage généralisé » du politologue Olivier Duhamel, accusé dans un livre par sa belle-fille, Camille Kouchner, d’agressions incestueuses sur son frère jumeau alors qu’il était adolescent. La question du consentement a également été évoqué dans cet entretien sur LCI.
A la suite de cette interview, des auditeurs ont demandé qu’Alain Finkielkraut ne soit plus sur l’antenne de France Culture où il est producteur de l’émission « Répliques » diffusée chaque samedi.
Hier, Sandrine Treiner a exprimé le maintien d’Alain Finkielkraut sur son antenne et rappelé la place très particulière que « Répliques » occupe dans l’espace culturel et médiatique français.
Une prise de position très affirmée et saluée de façon spectaculaire par les auditeurs. Dans la foulée de l’émission nous avons, en effet, reçu un nombre très significatif de messages plébiscitant ce choix de la direction :
« Je viens d’écouter avec un très grand intérêt l’explication de Sandrine Treiner sur le sujet Alain Finkielkraut et tiens à vous féliciter pour l’intégrité de l’esprit France Culture que vous maintenez. »
« Un grand merci à Sandrine Treiner que je viens d’entendre répondre avec talent aux auditeurs au sujet de M. Finkielkraut, très grande clarté, défense du temps nécessaire au débat, parfait, merci beaucoup ! »
« Je viens d’écouter Madame Treiner… je suis 100% d’accord ! Je suis très rarement en phase avec Finkielkraut mais je reconnais qu’il aborde des sujets complexes… laissons le parler… c’est important ! Pourvu que vous soyez toujours là. »
« J’ai entendu tout à l’heure le point de la médiatrice et ai trouvé la mise au point de la directrice de France Culture, concernant Alain Finkielkraut, tout à fait remarquable. Je confesse ne pas être un grand fan de M. Finkielkraut, je le trouve assez pontifiant et ne suis pas toujours d’accord avec ce qu’il dit et, quand j’écoute Répliques, c’est plus pour les propos de ses invités que pour les siens. Pour autant, j’avoue être assez abasourdie que des auditeurs aient « demandé sa tête ». Cela, après avoir entendu, ce matin, la rupture entre Xavier Gorce et Le Monde en raison de son pingouin ironique, c’est beaucoup dans une même journée. Je suis lasse et désespérée de cet univers médiatique où la nuance, le second degré, la prise de recul, la complexité semblent des valeurs en voie de disparition. Heureusement, il y a une oasis : France Culture. Et cela explique peut-être les très bons scores que la directrice a annoncé tout à l’heure. Sans doute y a-t-il bien d’autres assoiffés, comme moi, qui viennent étancher leur besoin d’intelligence sur cette antenne. Alors un grand merci »
« J’ai été agréablement satisfait par la position très bien argumentée de Sandrine Treiner pour défendre Alain Finkielkraut et pour maintenir une des meilleures émissions de mon antenne préférée. (…) Je me réjouis que France Culture, qui peut à bon droit s’enorgueillir de son taux d’audience, ne cède pas encore à la tyrannie des spectateurs et à des biais culturels réducteurs. Si France Culture veut rester une référence sans équivalent, la qualité de ses intervenants et de ses productions doit rester sa seule boussole. Elle doit se préserver, autant que faire se peut, de tout dogmatisme y compris soft ; a fortiori intolérant. »
Il est important de mentionner que, dès le début de son interview, Sandrine Treiner a indiqué qu’elle comprenait : « les indignations et les incompréhensions que les propos d’Alain Finkielkraut ont suscitées. Et d’autant plus quand on s’en tient à l’extrait relayé par les réseaux sociaux, notamment sur Twitter, savamment composé pour choquer et créer l’émotion. J’ai tenu pour ma part et je le conseille à chacun de regarder la séquence du plateau de LCI dans son intégralité. En ouverture de sa chronique., Alain Finkielkraut condamne de façon extrêmement claire les agissements d’Olivier Duhamel et les actes pédocriminels en général. Il ne laisse aucune ambiguïté sur le sujet, ce qui est pour moi évidemment fondamental et même déterminant. »
« Inceste consenti, pas mort » alerte Christine Angot
Quinze jours après la publication du livre “La Familia Grande” de Camille Kouchner, l’écrivaine Christine Angot, elle-même victime d’inceste, a choisi, hier, le Grand entretien de la matinale de France Inter pour s’exprimer sur le sujet au micro de Léa Salamé. L’auteure de « L’Inceste », publié il y a 22 ans, souligne que les enfants veulent dénoncer, mais ne peuvent pas : « Moi, je voulais parler pendant 3 ans, de 13 ans à 16 ans, j’ai essayé par tous les moyens et j’ai voulu parler. Vous avez les mots pour dire ça ? (…) Comment vient le sujet ?”.
L’écrivaine a tenu à déconstruire l’idée reçue selon laquelle les enfants veulent garder le silence pour ne pas casser une famille. Selon Christine Angot, l’enfant prend tout à fait conscience de ce qu’il se passe : « Vous savez très bien que la petite chose fragile, c’est vous. Et vous savez très bien que c’est vous qui êtes en difficulté (…) Vous comprenez très bien ce qui se passe. »
« La personne qui s’autorise à abuser de son pouvoir sur vous, c’est qu’elle en a un », a-t-elle ajouté. « Et si c’est votre père, ce n’est pas n’importe quelle personne.” Faut-il, dès lors, parler, libérer la parole pour en venir à bout ? « Moi, j’y crois tout à fait, dès lors qu’il n’y aura plus, dans cette société, de fascination du pouvoir et que donc, les abus de pouvoir n’auront plus lieu d’être. Tant qu’il y aura une fascination de l’ensemble de la société pour le pouvoir et ses manifestations, il y aura forcément des abus de pouvoir puisque ça opère dans tout, dans tous les clans sociaux », a-t-elle conclu.
La force de cette interview a été unanimement saluée par les auditeurs qui nous ont écrit:
« Je suis encore profondément émue par le témoignage de Christine Angot. »
« Merci pour le magnifique et profond échange que vous avez eu avec Madame Angot. Laissons parler quand ils le peuvent ceux et celles qui savent et surtout sachons les écouter »
« Propos éclairants sans passion, sans haine. On comprend tout »
« Mme Angot, déterminée mais sous contrôle, émotion mais sous contrôle, révoltée, son témoignage est poignant. »
« Depuis quelques semaines je ne me retrouve pas forcément dans les discours des uns et des autres sur ce sujet. Votre invitée elle, dit juste, elle est dans la vérité du ressenti d’une enfant, et je partage chacun de ses mots, de son analyse »
« Encore merci Christine Angot pour la justesse de vos mots et de votre récit précis ! Merci pour votre courage qui m’encourage »
Les invités de la matinale de France Inter
Au sujet de la matinale de France Inter, deux types de remarques attirent l’attention :
« Dans la matinale de France Inter (le 7/9) tous les invités sont des hommes. Des hommes politiques, des hommes syndicalistes, des hommes patrons d’entreprises, des hommes « chercheurs », des hommes « experts ». N’existe-t-il aucune femme dans ces catégories ? L’humanité n’est-elle pas constituée de 50% de femmes ? Pourquoi, encore et toujours, les mettre de côté, les invisibiliser ? C’est inacceptable ! C’est indigne du service public qui a un rôle d’information ! Quelle information diffusez-vous qui « oublie » la moitié de l’humanité ? Réfléchissez ! Changez ! »
« Un peu marre dans la matinale d’entendre des médecins infectiologues, des spécialistes de… Serait-il possible d’arrêter cette sinistrose matinale et de nous faire rêver avec des invités qui nous parlent de voyages, de culture, de sport et de tout ce qui nous est interdit. Déjà qu’on doit écouter les spots publicitaires du gouvernement de la Covid… »
Qu’en est-il exactement ? Les femmes sont-elles sous représentées dans la matinale en ce début d’année ?
Depuis le lundi 4 janvier 2021, le 7h50 et le Grand entretien de 8h20 ont donné la parole à 34 personnes dont 8 femmes et 26 hommes soit 23% de femmes. On peut donc considérer qu’il y a là un déséquilibre qui illustre un constat déjà formulé : alors que la crise sanitaire a fait reculer la parité dans les médias, un rapport de la délégation aux droits des femmes du Sénat rendu public l’été dernier, estime qu’il faut fixer un objectif général de parité d’ici 2022 pour les éditorialistes et les intervenantes invitées en tant qu’expertes en plateau.
Les femmes représentent une majorité des diplômées de l’enseignement supérieur en France, mais restent pourtant sous-représentées parmi les experts s’exprimant dans les médias. Si leur part est passée de 20% en 2015 à 38% en 2019, « l’année 2020 a marqué le pas » en raison de la crise sanitaire selon une étude du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA).
Rappelons que dans son rapport sur la place des femmes dans les médias en période de crise, remis en septembre dernier aux ministres de la Culture Roselyne Bachelot et à l’Egalité femmes-hommes Elisabeth Moreno, la députée LREM Céline Calvez soulignait que, de mars à juin 2020, les femmes ont beaucoup pris la parole sur les antennes comme mères ou infirmières mais trop rarement en tant qu’expertes.
L’urgence liée au Covid-19 a « bousculé les pratiques des médias et fait reculer leur vigilance sur la présence des femmes expertes dans leur contenu », rappelait la mission parlementaire et n’a fait qu' »accentuer » des « inégalités déjà présentes en temps normal ».
A cet égard, si l’on considère les médecins invités dans la matinale de France Inter depuis le 4 janvier, on note que 37 % sont des femmes – 8 médecins parmi lesquels 3 femmes, un chiffre honorable quand on sait que la parité est loin d’être établie chez les experts médicaux.
Abordons à présent, la seconde remarque : « marre dans la matinale d’entendre des médecins infectiologues (…). Serait-il possible d’arrêter cette sinistrose matinale et de nous faire rêver avec des invités qui nous parlent de voyages, de culture, de sport ? »
Cette critique est-elle fondée ? Non. Être factuel évite les approximations et les perceptions erronées : depuis le 4 janvier 2020 la matinale de France Inter a reçu 34 invités, seulement 8 étaient médecins, les 26 autres étaient réfugiée, ministre, député, président de région, magistrat, universitaire, enseignant-chercheur, journaliste, écrivain, réalisateur, patron, etc. Donc seuls 23% des invités sont médecins.
Cependant, il est exact que des invités non rattachés à l’univers médical ont évoqué la crise sanitaire, leur périmètre professionnel étant en lien avec le COVID-19, d’où le sentiment des auditeurs d’en entendre beaucoup parler.
Le choix des invités de la matinale de France Inter relève d’une stratégie éditoriale détaillée par Catherine Nayl, directrice de l’information de France Inter :
« Nos auditeurs sont toujours d’une vigilance extrême sur le choix de nos invités et ils ont raison. Ce qui dicte notre choix c’est toujours la recherche d’un pluralisme, la mise en valeur d’une parole ou d’une histoire exemplaire, des annonces d’actualité, les réflexions de nos philosophes, sociologues, historiens. Depuis ce début d’année, nous avons pu entendre Marie N’Diaye comme Olivier Véran, Gulbahar Haitwaji, une réfugiée ouïgoure et l’ancien juge Renaud Van Ruymbeke, le sociologue et philosophe Bruno Latour et son analyse de la crise actuelle comme Christine Angot sur l’inceste, l’infectiologue Elisabeth Bouvet comme Adrien Quattenens de la France Insoumise. »
La liste des personnalités invitées depuis le début de l’année est détaillée ici.
« Ce qui nous anime c’est d’informer, décrypter, donner à réfléchir, à découvrir, ajoute Catherine Nayl, cet équilibre entre femmes et hommes, entre différents courants de pensées politiques, économiques, nous essayons de le tenir, pas toujours sur une semaine en raison de l’actualité mais globalement cette priorité nous guide.
Nous savons que nous pouvons encore mieux faire, nous devons vous proposer de nouvelles voix, de nouvelles personnalités, nous devons encore progresser par exemple sur l’égalité femmes/hommes, mais croyez bien que nous ne perdons jamais de vue cet objectif. »
Du côté de Franceinfo, c’est la mécanique d’antenne qui intrigue des auditeurs :
« Comment travaillent les journalistes qui interviennent toutes les 10 minutes. Qui valide les infos ? Sont-ils tenus par le contenu du point info précédent ? Par ailleurs, je pense vraiment qu’un point info toutes les 15 minutes serait suffisant. Cela éviterait notamment d’interrompre trop souvent les débats et interviews en direct, ce qui est frustrant pour les intervenants et dérangeant pour les auditeurs. »
Demain dans le rendez-vous de la médiatrice à 11h51, Laurence Jousserandot, directrice de l’antenne de Franceinfo répond à leurs questions et détaille les coulisses de la rédaction.
Les aléas de la campagne vaccinale
Des piqûres et surtout de la patience : la vaccination contre le Covid-19 s’est élargie à tous les plus de 75 ans, sur fond de craintes de pénurie et de critiques sur l’organisation. Cette semaine encore, des auditeurs nous décrivent leur dépit, leur incompréhension entre les informations données sur les antennes et la réalité de la situation :
« J’ai voulu prendre rendez-vous pour mes parents (90 ans, en relative bonne forme, habitant tous les deux toujours chez eux). Mais la réalité c’est qu’aucune prise de rendez-vous n’est possible (…) C’est un vrai scandale de dire que les gens peuvent prendre rendez-vous alors que ce n’est pas vrai ! Du mensonge organisé entraînant déception, colère et frustration. »
« Que pensez d’une rédaction qui ne va pas tester un petit rendez-vous sur Doctolib… le résultat de cette démarche aurait certainement pu pondérer l’ensemble des communications »
« La campagne de soi-disant vaccination pourrait être un cas d’école : les journalistes annoncent qu’il faut aller sur tel site ou téléphoner pour prendre rendez-vous. Information non vérifiée : un simple geste suffit pour constater que la prise de rendez-vous est impossible. Donc, les journalistes colportent de fausses nouvelles. Sans rancune, mais vérifiez avant d’annoncer. »
« Ce matin j’entends « vaccination à flux tendu » alors qu’après avoir passé 2 heures à trouver des rendez-vous à 30 km on nous annonce que tout est annulé sans dire pourquoi et tous les gens autour de nous sont dans la même situation. C’est honteux. »
« Concernant l’info sur la plateforme de prise de rendez-vous il n’est pas question d’incriminer les journalistes qui nous informent de la mise en route de ces centrales téléphoniques par contre lorsqu’il y a impossibilité de joindre ces standards c’est à eux de coller à l’instant T et de dire qu’il y a problème pour joindre ces dits numéros de tél, et non d’affirmer toute la matinée de la mise en œuvre de ces standards. »
La générosité des auditeurs
Coup de cœur des auditeurs cette semaine pour Roxane, 22 ans, interviewée dans « Les Pieds sur Terre” sur France Culture. Inspirée par la célébrissime émission de radio américaine This American Life, « Les pieds sur terre » propose, chaque jour, une demi-heure de récits de vie racontés à la première personne
Intitulée « Pandémie, des étudiants sacrifiés », l’émission de mardi dernier, a donné la parole à Roxane, 22 ans. Etudiante et jeune mère, Roxane est en licence de droit à Chambéry.
Après avoir obtenu un visa, au moment de venir étudier à l’université Savoie Mont Blanc, elle a découvert sa grossesse qui l’a contrainte à refaire une première année à la faculté. Depuis la naissance de son enfant, aucun membre de sa famille ne lui adresse plus la parole.
La jeune femme étudie seule chez elle, comme tous les étudiants actuellement, et doit faire face au quotidien sans ressources autre que les aides dont elle bénéficie. Roxane a été employée dans différentes sociétés, Monoprix, O’Tacos qui, à cause du confinement, ont licencié. Payer ses charges, se nourrir, subvenir au besoin de son enfant, est parfois très difficile. Son témoignage a bouleversé des auditeurs de France Culture qui proposent de lui apporter une aide :
« Comment peut-on aider financièrement la jeune femme qui souhaite poursuivre ses études. Elle témoigne d’une force morale et d’une volonté exemplaire en dépit de tous les obstacles qu’elle doit affronter. »
L’équipe de l’émission, sensible à cet élan de solidarité, communique à ceux qui le souhaitent le contact d’une association pour apporter un soutien ou faire un don aux étudiants en difficulté.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France