Voici les principales thématiques abordées par les auditeurs dans leurs courriels envoyés du 12 au 19 novembre 2021.
Nous publions une sélection de leurs messages ci-dessous :
1. Covid le retour
2. Jean-François Delfraissy, invité du Grand entretien de France Inter
3. L’hôpital public en danger ?
4. Les Gilets jaunes, trois ans plus tard
5. Trop de place accordée à Éric Zemmour
6. Nicolas Carnot et Pierre Blavier invités des Matins de France Culture
7. Vers une pénurie de professeurs ?
8. L’association négaWatt sur France Inter
9. Charles Stépanoff, anthropologue, invité du Grand entretien de France Inter
10. Thierry Breton, invité de Questions Politiques
11. Disparition de la jeune fille en Mayenne
12. Le match de l’équipe féminine de rugby
13. La langue française
14. Les résultats d’audiences : félicitations des auditeurs
15. Coup de cœur des auditeurs : “Les Passantes” dans Tubes N’co
Le maelström de l’actualité
Au menu de cet édito : le retour du Covid, Éric Zemmour trop évoqué sur les antennes, “le nucléaire ou le renouvelable : quel est le plus cher ? », les publicités vertueuses sur les antennes, la formulation « se faire violer », « La nuit du 13 novembre racontée par les appels au Samu » prix du reportage Radio France 2021.
Covid le retour
La France est frappée par une nouvelle vague du Covid. Depuis deux semaines, le nombre de contaminations progresse très rapidement, de l’ordre de 40 à 50% par semaine. Le sujet revient donc dans le courrier des auditeurs avec, comme première thématique, l’utilité du port du masque à l’école. Depuis lundi, les élèves des écoles élémentaires de toute la France doivent à nouveau le porter afin d’enrayer l’augmentation des contaminations par le Covid-19. Le port du masque diminue le risque de contracter le virus. Rappelons qu’un cas de Covid dans une classe en primaire entraîne une fermeture. En cas de contamination au collège ou au lycée, seuls les élèves cas contacts non vaccinés doivent s’isoler sept jours.
Le nombre de classes fermées à cause de l’épidémie de Covid-19 est remonté nettement cette semaine, au plus haut depuis la rentrée de septembre, pour s’établir à 4 048, soit 0,8% des classes du pays, a annoncé ce matin le ministère de l’Education nationale. C’est plus que trois fois supérieur au précédent chiffre, datant du 22 octobre, avant les vacances de la Toussaint, qui était de 1 246 classes fermées.
L’autre sujet abordé par les auditeurs à propos du Covid concerne les chiffres annoncés sur les antennes :
« Vous donnez le chiffre de 20 000 nouveaux cas et des chiffres d’hospitalisation et de décès, mais j’aimerais savoir le nombre de personnes vaccinées, ou non vaccinées, parmi ces catégories. Histoire de savoir si les vaccinés sont vraiment à l’abri et si les non vaccinés sont plus touchés. Merci. »
« Pourquoi indiquez-vous le nombre de décès dus au Covid-19 sans indiquer le pourcentage ou le nombre des non vaccinés ? »
Nous avons transmis aux directions des rédactions le fait que les auditeurs souhaiteraient désormais connaître le pourcentage des vaccinés, ou non-vaccinés, pour les nouvelles contaminations, les hospitalisations, et en particulier les entrées en réanimation, et les décès.
Éric Zemmour trop évoqué sur les antennes
Après un démarrage fulgurant, Éric Zemmour pourrait annoncer sa candidature à l’élection présidentielle fin novembre. Très suivi par l’ensemble des médias, l’ancien éditorialiste bénéficie d’une visibilité qui met en lumière son ascension continue depuis la rentrée, mais également ses récentes difficultés.
Dans les sondages, le polémiste est confronté à de premiers tassements. Il perd jusqu’à deux points et reste derrière la candidate du RN Marine Le Pen, selon deux instituts, Odoxa et Elabe, qui le donnent entre 13 et 15%.
Condamné à deux reprises pour provocation à la haine raciale, Éric Zemmour n’est, en outre, pas toujours le bienvenu dans ses déplacements. Une conférence à la Royal Institution à Londres vendredi a été annulée par cette dernière après « examen approfondi » de l’événement, qu’Éric Zemmour tiendra finalement dans un hôtel. Le maire de Londres, Sadiq Khan, interrogé jeudi par un élu Vert sur la venue du polémiste, a répondu que « toute personne désireuse de diviser nos communautés et d’inciter à la haine (…) n’était pas la bienvenue ».
La maire de Genève, Frédérique Perlier, ne mettra aucune salle communale à la disposition du possible candidat, qui doit s’y rendre les 24 et 25 novembre, pour ne pas se rendre « complice de la propagation de ses messages haineux ».
Des conférences qui ressemblent à des meetings fiévreux, aux propos radicaux égrenés au fil des jours, en passant par l’instrumentalisation du Bataclan au soir des six ans des attentats avec sa présence médiatisée, Éric Zemmour occupe le terrain, et il est trop cité sur les antennes regrettent des auditeurs :
« C’est surprenant la façon dont vous tombez dans le piège Zemmour en ramenant toujours les interviews en fonction des dires de ce monsieur, vous lui faites une publicité de dingue et lui donnez de l’importance. »
« Franchement, je n’en peux plus d’entendre parler d’Éric Zemmour à longueur de journée dans vos émissions. Pourquoi lui faire une telle pub, en faire le centre du débat ? Même les comiques à 17h et tous les autres ou presque. Trop, c’est trop, amusez-vous à faire un comptage quotidien. »
« Je vous écris, car je ne supporte plus la publicité qui est faite à Éric Zemmour, propulsé par les médias de tous bords, sur la scène politique, alors qu’il n’est pas même candidat déclaré à la présidentielle (mais souvent présenté comme tel). Radio France fait, comme ses concurrentes, le jeu de ce triste sire. »
« Navré que France Inter « obéisse » au tempo et aux thèmes souhaités par Monsieur Éric Z. »
« Quel est le plus cher, le nucléaire ou les énergies renouvelables ? »
Débat lundi matin avec Yannick Jadot, invité du Grand entretien de Léa Salamé et Nicolas Demorand sur France Inter. Au cours de l’interview, le candidat EELV à l’élection présidentielle a déclaré : « Le nucléaire que propose Emmanuel Macron est au moins deux fois plus cher que les énergies renouvelables ».
Lundi, le 13/14 est revenu sur le sujet. La question a été posée à Yves Marignac, directeur du service d’étude et d’information sur l’énergie Wise-Paris, expert dans l’association négaWatt qui regroupe des professionnels de l’énergie et des citoyens.
« Les renouvelables sont-t-ils moins chers que le nucléaire ? » l’interroge Bruno Duvic qui précise au cours de l’entretien que l’invité « plaide pour le développement des énergies renouvelables ». Le journaliste lui demande : « si on n’intègre pas seulement les coûts de production, il y a davantage bataille entre nucléaire et renouvelables ? ».
« Effectivement, reconnaît Yves Marignac, au niveau des coûts, c’est relativement serré et c’est très dépendant des hypothèses retenues sur les renouvelables d’un côté et le nucléaire de l’autre. C’est le taux de rémunération du capital, des investissements, qui est un taux qui reflète le risque associé à des investissements beaucoup moins risqués aujourd’hui dans des renouvelables que dans du nouveau nucléaire. RTE a appliqué le même taux de 4% pour toutes les filières. Dans une analyse de sensibilité, RTE indique que, si on applique un taux de 7% pour le nucléaire, ce qui reflète davantage la réalité économique, l’avantage de coût pour des scénarios avec des nouveaux réacteurs par rapport à des scénarios avec des renouvelables est annulé. »
Cette interview a suscité un certain nombre de réactions d’auditeurs extrêmement sensibles au sujet du nucléaire et des énergies renouvelables. Ils ont regretté que la contradiction n’ait pas été apportée à Yannick Jadot par un interlocuteur d’un point de vue opposé.
« négaWatt s’affiche explicitement contre le nucléaire et pour un 100% renouvelables. Les membres de cette association sont pour l’essentiel actifs dans des associations ou groupes de pression agissant pour le développement des renouvelables et la sortie du nucléaire. On ne peut donc pas considérer que les experts de négaWatt puissent seuls apporter une réponse objective à la question posée sur la compétitivité respective de deux sources d’énergie. Je m’étonne donc de l’absence de contradiction.
Le rôle d’une radio de service public, n’est-elle pas d’apporter une information objective ou alternativement des éléments contradictoires pour que chacun de vos auditeurs puissent se forger une opinion ? »
« Pourquoi ne pas plutôt avoir demandé à un pro nucléaire d’apporter un autre regard sur le nucléaire par exemple des scientifiques ? »
« Les émissions d’information de France Inter nous ont fait entendre ce jour Y. Jadot dans le 7/9 et Y. Marignac de négaWatt dans le 13/14. Dans les deux cas, il a été dit que le nucléaire était nettement plus cher que l’éolien ou le solaire. Cette information tronquée aurait dû être contrée par les journalistes présents. Car, RTE le précise bien, les coûts complets de gestion de l’intermittence sont tels que le nucléaire demeure nettement moins cher même au prix de l’EPR de Flamanville (dixit RTE). Cette mise au point aurait clairement été faite si vous invitiez de vrais experts et non pas des militants. Pourquoi donnez-vous si souvent la parole à négaWatt et pas à Sauvons le Climat ? »
Indiquons que l’équilibre entre les différents courants de pensées politiques, économiques, anime la rédaction de France Inter, et la recherche du pluralisme est le principe qui dicte l’invitation à une personnalité. Sur l’antenne, cet équilibre se tisse au fil des invitations et ne peut se juger à l’aune d’une seule interview entendue à un instant T. (en l’occurrence le représentant de négaWatt).
Le respect de la pluralité des points de vue est donc une priorité qui guide la direction afin d’informer le public et de favoriser son décryptage des grands enjeux qui traversent notre société. Ainsi, au sujet du nucléaire, entre la Cop 26, le rapport RTE et l’intervention télévisée d’Emmanuel Macron, confirmant la future commande de nouveaux réacteurs, il y a eu de nombreuses invitations et multiplications de sujets et de reportages.
Au total, entre la mi-octobre et aujourd’hui, la parole a été autant donnée aux « pro » nucléaires qu’aux « anti », même si cette classification peut s’avérer hasardeuse lorsque les débats tournent, surtout, autour de la question du bon mix énergétique.
Cette logique d’équilibre entre ces opinions différentes sur ce sujet sensible est à l’œuvre, mais sa lecture peut sembler perturbante : le 13/14 a, en effet, cherché à équilibrer Thomas Gassiloud (le 12 octobre) avec Yves Marignac (le 25 octobre). Au cours de la journée du 12 octobre, la rédaction a équilibré “pro” et “anti”, entre le 13/14 et le Téléphone Sonne.
Le 15 novembre, les propos de Yannick Jadot ont poussé les journalistes à organiser une vérification, dans le Journal de 13h. Il a été difficile de trouver le bon interlocuteur, libre au moment de la séquence.
Le choix a, donc, été d’inviter, à nouveau, Yves Marignac. Bruno Duvic signale bien, en débutant l’entretien et lors d’une relance, la position « pro-renouvelables » de l’invité : la séquence n’est absolument pas un « fact-cheking » (une vérification) mais bien une interview, l’invité a été poussé à préciser ses arguments. Les différents interlocuteurs invités sur ce sujet depuis le 12 octobre sur France Inter sont à retrouver dans cet encadré.
Publicités vertueuses
La cohérence est, on le sait, un vecteur de confiance. Régulièrement des auditeurs nous écrivent car ils ne comprennent pas que nous puissions d’un côté proposer davantage de programmes consacrés à la transition énergétique et de l’autre faire, dans des spots publicitaires, la promotion de véhicules émetteurs de CO2. Les auditeurs paient la redevance audiovisuelle. Ils se sentent un peu propriétaires de Radio France. A ce titre, leur attente à l’égard du service public audiovisuel se traduit par une exigence de qualité et de cohérence.
Depuis le mois de janvier 2021, Radio France a donc décidé d’aligner ses pratiques publicitaires avec ses engagements éditoriaux pour l’environnement. Concrètement la régie publicitaire du groupe valorise les initiatives agissant activement en faveur de la transition écologique avec la création d’une série de nouveaux espaces publicitaires responsables. Une démarche vertueuse, qui s’entend sur les antennes, remarquée par des auditeurs:
« Je voulais vous remercier pour ces nouvelles publicités dans le cadre de votre « effort pour soutenir la transition écologique ». Elles sont réellement plus pertinentes et plus agréables à écouter. Je me retrouve même à ne plus éteindre la radio quand arrive l’heure de la pub ! Sans parler de la merveilleuse disparition de celles pour acheter des SUV « écologiques ». Bref, continuez, content que vous ayez décidé de commencer à réellement avoir de l’impact sur ce plan. »
« Très fidèle auditeur, je voulais vous féliciter pour les espaces de publicité offerts à « Zéro waste France » et autres associations. Ce discours est salutaire. Continuez tout ce que vous faites ! »
« Je voudrais vous féliciter pour cette initiative. Ces dernières années j’avais été très déçu de cette tendance de France Inter à augmenter les temps de publicité car c’est n’est pas le rôle d’un service public de faire de la publicité pour des entreprises privées. Avec cette publicité pour des actions vertueuses vous retrouvez votre rôle. Bravo et n’hésitez pas à continuer dans ce sens. »
« Se faire violer » ?
Pour évoquer un viol, l’expression « se faire violer » est fréquemment utilisée sur les antennes. Des auditeurs signalent, à juste titre, toute l’ambiguïté de cette formulation :
« Merci de dire qu’une victime EST violée et non SE FAIT violer ! »
« Aujourd’hui, votre journaliste parle à la mère d’une victime/survivante de viol en disant : « Une jeune fille qui s’est fait violer ». On ne « se fait » pas violer on « est violé par quelqu’un « on est « victime/survivante de viol ». Merci de changer cette tournure de phrase qui invisibilise les coupables et reporte indirectement l’action sur les victimes. Tout comme la pédophilie – la préférence sexuelle pour des enfants, c’est un crime, alors merci de l’appeler ainsi : pédocriminalité ! »
« Une femme ne se fait pas violer, elle est violée. Elle ne se fait pas siffler, elle est sifflée. Si tout le monde utilise ce genre d’expression « se faire » comment les choses changeront ?? »
« Le langage aussi diffuse la culture du viol : que signifie dire à la voix passive « elle s’est fait violée ???? » Changer pour la voix active : « elle a été violée » »
Cette construction grammaticale est en effet doublement équivoque. Elle focalise tout l’énoncé sur le sujet – la personne victime – en faisant disparaître l’auteur des faits, l’agresseur. Ce dernier est alors invisibilisé par le sens passif « se faire + infinitif », une structure très courante qui insiste sur le sujet qui subit l’action. Dans le cas qui nous intéresse, cet emploi sous-entend quasiment une forme de consentement de la victime. Par habitude, sans même que l’on s’en rende compte, cette expression est souvent employée.
La sensibilité des auditeurs à la langue française invite à nous interroger sur ce que les mots que nous employons contribuent à forger comme réalités sociales et politiques. Quand on a le pouvoir d’imposer un mot ou une expression dans le débat public, veillons à ce qu’il reflète au mieux un fait social ou le réel de nos concitoyens.
Ainsi quand on dit « elle s’est fait violer », n’induit-on pas une acceptation de la victime ? Nous avons posé la question à Laélia Véron, enseignante-chercheuse en stylistique et langue française dans cette vidéo. L’universitaire nuance l’approche, si elle indique que « se faire + infinitif » ne signifie pas toujours que le sujet est au centre de l’action, elle indique cependant que, dans la formulation de tels faits, il convient d’éviter toute ambiguïté.
« La nuit du 13 novembre racontée par les appels au Samu »
Gaële Joly, journaliste Police/Justice à Franceinfo, est cette année lauréate du prix du reportage Radio France 2021, décerné par un jury composé de journalistes des différentes antennes du groupe. Ce prix récompense son reportage “La nuit du 13 novembre racontée par les appels au Samu”, diffusé sur Franceinfo le 30 août 2021. C’est une véritable plongée dans la nuit du 13 novembre à travers l’enregistrement des appels qui, cette nuit-là, ont transité par la plateforme du Samu de Paris : témoins, victimes, services de secours, pompiers, police, hôpitaux. La réalisation est signée David Jacubowiez.
Ce reportage remarquable est également salué par cet auditeur professeur d’histoire :
« En écoutant ce matin Franceinfo, j’ai appris que vous aviez été récompensée pour votre reportage sur les appels d’urgence du 13 novembre. Je tenais en quelques mots à vous dire combien je trouvais cette distinction justifiée. J’ai été extrêmement ému par votre reportage, découvert dans sa totalité sur le site internet dès la fin août, mais surtout je tiens à souligner la dignité et la déontologie de votre approche : vous assumez votre rôle fondamental dans le devoir de mémoire nécessaire tout en prenant le recul impératif à votre mission et en refusant le sensationnalisme. Inutile d’en dire davantage, je pense que vous comprenez le sens de mon message comme j’ai cru saisir celui de votre démarche, bien réexpliquée ce matin. A la fois en tant qu’enseignant et en tant qu’historien de formation, je salue donc votre travail, et en cette heure où l’on ne prend le temps d’écrire que pour manifester son mécontentement, je jugeais essentiel de le prendre pour vous remercier. »
Cette récompense permet à Gaële Joly de représenter Radio France au Prix du journalisme des Médias Francophones Publics. Cette distinction, qui met en compétition des reportages présentés par chacune des cinq radios membres (Radio France, RFI, la RTBF en Belgique, la RTS en Suisse et Radio Canada), sera décerné par un jury international d’auditeurs le 5 décembre prochain.
Emmanuelle Daviet
Médiatrice des antennes de Radio France